du 28 avril 2005 |
MICHELIN 2005 |
Bruno Oger · La Villa des Lys · Cannes (06) Au seuil de la quarantaine, cet élève de Georges Blanc prend son envol. Il inscrit le palace cannois sur la carte des hauts lieux gastronomiques français. Portrait d'un Breton, obstiné bien sûr, mais aussi inventif.
CLAIRE COSSON
L'étoile montante du Majestic
"Cette seconde étoile est le fruit d'un travail collectif", confie Bruno Oger |
Une heure du matin, en pleine semaine, les
lumières sont encore allumées dans les cuisines de La Villa des Lys, le restaurant
gastronomique de l'Hôtel Majestic Barrière sur la Croisette. Vous savez, la table très
en vue à laquelle le Michelin a accordé, nullement par le simple fruit du hasard,
une 2e étoile dans son guide 2005. D'un pas alerte, le chef Bruno Oger jette
un dernier coup d'oeil à ses fourneaux, caressant d'un revers de la main les inox
rutilants. Tout est ok ! Il peut y aller. Le gaillard enfourche son scooter pour rejoindre
Mougins. Dans quelques heures à peine, ce papa d'un petit François adopté en Thaïlande
sera bien sûr de nouveau à pied d'oeuvre. Une manière de vivre qu'il n'échangerait
pour rien au monde. Car la cuisine, pour cet homme-là, ce n'était même pas une ambition
à l'origine, c'était une évidence. Et jamais rien ni personne ne l'a dissuadé de se
laisser aller à cette impérieuse et précoce vocation.
Pas même l'appel du large, et il est pourtant natif
de Lorient. Encore moins sa femme, Hélène, aujourd'hui artiste peintre. Bruno l'a
rencontrée sur les bancs de l'école hôtelière de Dinard tandis qu'il préparait un CAP
et un BEP. Quant à ses parents, difficile pour eux aussi de s'opposer à leur fils. Le
couple tient en effet une brasserie, Le Skipper, en Bretagne. Lorsque leur chère petite
tête brune, avec son visage d'ange et son sourire enjôleur, leur déclare : "Mon rêve, c'est de devenir chef dans un
3 'toiles'", ils craquent, sachant toutefois que la vie de Bruno ne sera
probablement pas un long fleuve tranquille. Reste que le gamin se montre persévérant.
Décidé, il va se donner à fond, agissant avec méthode et prudence, suivant un plan
mûrement réfléchi.
"Un
traditionnel inventif"
Il se forme ainsi dans des maisons
réputées : Le Ski d'Or à Tignes (73), le Château de Locguenole à Hennebont (56)
À tout juste 23 ans, le voilà nommé chef de partie chez Georges Blanc. Une rencontre
déterminante : "Je dois tout à monsieur Blanc. Il m'a appris la rigueur, la
régularité, le sens du client et de l'innovation", avoue Bruno d'emblée.
N'empêche. Le maître avait sûrement détecté chez son élève une graine de talent.
Pourquoi sinon l'envoyer comme chef à l'Oriental de Bangkok, puis, à son retour, lui
confier les pianos de Vonnas ? Après un septennat passé aux côtés du pape bourguignon,
le jeune homme choisit de voler de ses propres ailes, histoire de se prouver qu'il peut
exister par lui-même. Aucun doute là-dessus pour Diane Barrière-Desseigne, qui lui
confie les clefs des cuisines du Majestic au printemps 1995.
Bruno Oger a carte blanche. Mais sa feuille de route
est claire. Objectif : les étoiles Michelin. Avant d'agir, le chef observe. Avec d'autant
plus d'attention qu'il a la charge de toute la restauration du palace (dont le Fouquet's
Cannes). Soutenu à 100 % par son directeur, Pascal Brun, il constitue son équipe et se
met petit à petit à changer les habitudes du prestigieux hôtel. Résultat : La Villa
des Lys obtient 1 étoile deux ans après son ouverture, en 1997. "Parti de rien,
on était enfin reconnu", souligne Bruno, ému. Une belle première victoire
d'étape pour ce "traditionnel inventif", particulièrement gourmand, qui
l'incite à poursuivre ses efforts. Sans jamais céder à la facilité. Ses plats actuels
en témoignent, comme cette Minute de loup de ligne au caviar d'osciètre ou ce Granité
au muscat du cap Corse, Sorbet lie de vin aux épices douces. C'est surprenant,
authentique et sacrément bon. Des lys au délice, il n'y a qu'un pas, que Bruno Oger et
ses collaborateurs ont franchi. Pour la plus grande joie des inspecteurs du Michelin apparemment.
De quoi ravir également son fils qui criait à son père au téléphone en apprenant la
nouvelle, "vive les 2 étoiles". D'ici à ce que Bruno lui décroche la
lune
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La Villa des Lys
10 rue de la Croisette
06400 Cannes
Tél. : 04 92 98 77 41
En chiffres
Investissement initial
1,551 E
CA 2004
750 000 E
Effectif
17 personnes
Nbre de couverts
27 en moyenne
Capacité
40 places
Prix moyen
140 E TTC (boissons comprises)
Complément d'article 2922mp14
Grosses langoustines rôties au caviar, coque d'oeuf à l'armoricaine, mouillettes aux condiments
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L'Hôtellerie Restauration
n° 2922 Magazine 28 avril 2005 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE