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	du 3 novembre 2005	HYGIÈNE

Pour piéger les nuisibles avec des produits chimiques (biocides), les applicateurs jouent de leur gourmandise, de leur appétit sexuel, de leur instinct grégaire. Et ces pièges sont toujours mortels.
Bernadette Gutel

Rodonticides, insecticides

Des pièges gourmets… mais mortels

POUR LUTTER CONTRE LES RATS
LES RODONTICIDES : DES ANTICOAGULANTS SAVOUREUX

Autrefois, on utilisait des poisons comme l'arsenic pour tuer les rongeurs. Mais d'une part, les rongeurs mouraient dans d'atroces souffrances et d'autre part, ces poisons étaient peu efficaces. En effet, les rongeurs qui n'en avaient pas encore mangé, faisant la relation entre son ingestion et la mort qui s'en suivait, se gardaient bien d'y mettre le museau. Par ailleurs, ces produits étaient dangereux pour l'homme. Dans les années 1940, des vétérinaires américains ont découvert les anticoagulants, des matières actives qui se sont avérées être des armes puissantes de lutte contre les rongeurs. En effet, ceux-ci doivent en manger pendant plusieurs jours avant de ressentir les premiers symptômes d'empoisonnement, et ils ne se méfient donc pas. Ces produits présentent également l'intérêt de ne pas être toxiques pour l'homme… tout du moins aux doses utilisées pour tuer les rongeurs. Et pour dissuader les enfants de les consommer, ils sont 'amerisés' par une substance très amère qui déclenche immédiatement un réflexe de rejet. La plupart des premières molécules mises sur le marché ne sont plus aujourd'hui commercialisées, car dès les années 1960, on a constaté que les rongeurs devenaient résistants à ces anticoagulants dits de 'première génération'. Le Coumatétratyl des Laboratoires Bayer présente cependant toujours un intérêt dans la lutte contre les rats. Aujourd'hui, de nouvelles molécules, découvertes dans les années 1990 et dites de 2^e génération ont l'avantage d'agir aussi bien sur les rats que sur les souris. Les deux molécules les plus actives à l'heure actuelle sont le Difénacoum ou le Brodifacoum : une seule absorption suffit pour tuer le rongeur. Viennent ensuite la Bromadiolone (pour les rats) et le Diféthialone découverts en 1989 par les Laboratoires Liphatech. Quant au Cholorophacinome, il est de plus en plus délaissé.

Des céréales en grains, pâte ou gel
Pour que ces anticoagulants puissent entrer en compétition avec les aliments que consomment les rongeurs dans leur environnement, il faut les fixer sur des matières alimentaires que les rongeurs adorent. Ce sont notamment des céréales ou de la matière grasse. "Les rats sont des granivores, explique M. Lor, Dr ingénieur entomologiste chez CG, mais on constate que s'ils ont faim, notamment en ville, ils peuvent manger de la viande ou du poulet. Ainsi, à la campagne, un appât à base de céréales convient bien, alors qu'en ville, un appât avec de la matière grasse convient mieux. Et dans une pâtisserie, on peut même parfumer ces appâts avec de la vanille ou de la pistache. On ajoute en général une très légère pointe d'anis, car ce parfum les attire." Il faut jouer aussi sur la texture de ces appâts : croustillante, moelleuse, gélatineuse… En fait, mettre au point un rodonticide demande, sur le plan organoleptique, autant de temps et de savoir-faire qu'un produit alimentaire… "Les produits rodonticides, explique M. Lor, sont testés sur des rats élevés dans des laboratoires, soit à l'Inra, soit à l'École vétérinaire de Maisons-Alfort (94). Ensuite, des tests sont effectués sur le terrain dans des fermes ou des terrains infestés de rongeurs par des sociétés agréées pour cela."

Les pâtes molles en sachets comme le Racumin de Bayer sont de nouveaux rodonticides très efficaces.

Parmi les rodonticides, on distingue :
• Le blé concassé pour les souris qui décortiquent le blé avant de le manger et du blé entier pour les rats (mais ils n'en sont pas très friands). Ces produits présentent le désavantage de se disperser si l'on renverse la coupelle ou la boîte qui les renferme.
• Le bloc hydrophobe de blé, un mélange de paraffine et de céréales. Ce produit n'est pas très appétant, mais il présente l'avantage de ne pas absorber d'eau. On l'utilise donc de préférence dans les milieux humides (égouts ou caves), où les rats sont affamés. Dans un restaurant, on peut le mettre éventuellement là où ils se nichent.
• Les pâtes molles en sachets à base de matières grasses, farines et céréales sont de nouveaux produits homologués voici 3 ans. Ils présentent une attractivité supérieure pour les rongeurs même dans des zones à forte concurrence alimentaire. Ces pâtes maintiennent leur efficacité même dans des situations difficiles (température élevée, forte humidité). De nombreuses pâtes molles sont disponibles sur le marché. On peut citer par exemple le Racumin pâte (à base de Coumatétratyl), le Rodilon Pâte à base de Diféthialone de Bayer. La société Aurouze propose en exclusivité la Pâte du diable conditionnée dans un sachet vanillé.
• Le gel pour souris en cartouches, un mélange de céréales et d'huiles végétales. Ce gel peut être parfumé à la vanille, à la pistache… ou autres pour varier les goûts.
• Les pièges à glu pour les souris, à mettre sur leur passage. Ces pièges ne comportent pas de rodonticides. Ils permettent de se débarrasser très vite d'une souris et de retrouver facilement son cadavre.

POUR LUTTER CONTRE LES BLATTES : DES INSECTICIDES EN GEL

Pour lutter contre l'invasion des blattes, le meilleur moyen est un insecticide sous forme de gel, déposé avec des pistolets ou des seringues. Sur la photo : application du Max Force de Bayer.

Pour lutter contre l'invasion des blattes, aujourd'hui, le meilleur moyen est un insecticide présenté sous forme de gel que l'on dépose en petites gouttes à l'aide d'une seringue aux endroits de passage des blattes. Ces gels, réservés aux applicateurs agréés, sont par exemple : Goliath*Gel de Rhône-Poulenc (aujourd'hui BASF) à base du fipronyl et de 27 matières appétantes (une goutte de 0,03 g par m² suffit pour tuer plus de 1 000 blattes) ou Max Force (Hydramethylnon) et Premise Gel de Bayer à base d'imidaclopride. Ces gels peuvent être déposés par les applicateurs pendant les heures d'ouverture d'un restaurant, car ils ne dégagent aucune odeur désagréable. Ce qui n'est pas le cas de la laque liquide à base de Dichlorvos ou de Chlorpyrifos que l'applicateur pulvérise dans le lieu à traiter. Cette laque nécessite de travailler la nuit, ou mieux, pendant les jours de fermeture de l'établissement, car elle dégage des odeurs trop fortes et trop désagréables. Il faut également protéger le matériel de cuisine, éteindre les veilleuses des appareils à gaz… Ce traitement est néanmoins très efficace pour éliminer de très importantes colonies de blattes ou de cafards, c'est-à-dire quand on a attendu trop longtemps avant d'agir. D'où l'intérêt de faire du préventif. Quant aux pièges à cafards ou à blattes, ne comptez pas sur eux pour arrêter la prolifération de ces insectes. Ils sont utilisés par les applicateurs pour vérifier l'efficacité de leur traitement en mesurant les réinfestations dans les zones à risques.

POUR LUTTER CONTRE LES MOUCHES, MOUCHERONS, MITES : DES INSECTICIDES EN AÉROSOL OU DES PIÈGES À PHÉROMONES

Les insecticides en aérosol comme le Digrain de Lodi vous permettent de vous débarrasser des insectes volants.

Si vous êtes envahi de mouches ou moucherons, l'applicateur pourra disperser des insecticides comme l'Actibiol Fogging de Lodi en micronébullisation.

Si vous êtes infestés de mouches ou de moucherons, vous pouvez vous en débarrasser en faisant installer
des pièges à UV ou des appareils à rideau d'air (lire L'Hôtellerie Restauration n° 2933 du 15 juillet 2005) et/ou en dispersant vous-même des insecticides en aérosol comme le Schawabex-fog, le Digrain ou l'Actibiol Fogging… commercialisés par les applicateurs. Une fois la valve enfoncée, le contenu se disperse en 1 minute. Il faut laisser la pièce fermée pendant 4 heures. Si les mouches et moucherons sont en quantité très importante, l'applicateur peut intervenir et disperser des insecticides en micronébullisation (brouillard très fin). Dans ce cas il faut tout protéger dans la cuisine. L'applicateur peut également installer des pièges à glu enrichie de phéromones sexuelles ou d'agrégation combinées à des insecticides. Les phéromones sont des substances émises par les êtres vivants ; ce sont des signaux qui servent notamment aux animaux à communiquer entre eux. Pour tuer les mites alimentaires, on met sur les pièges des phéromones sexuelles femelles qui vont attirer les mâles dès qu'ils deviennent adultes. Comme ces derniers deviennent adultes au bout de 5 jours - soit 2 jours avant les femelles -, ils ne pourront pas les féconder et les mites disparaîtront. Pour les mouches, on utilise une phéromone d'agrégation. Quand une mouche ou une abeille trouve de la nourriture, elle prévient ses consoeurs par ce type de phéromone et elles accourent la rejoindre. Cependant, contrairement à la lutte contre d'autres espèces de nuisibles qui vivent à l'intérieur des bâtiments, le traitement contre les mouches et autres insectes volants doit être aussi bien mené à l'intérieur qu'à l'extérieur. Ce n'est pas toujours facilement réalisable notamment quand il s'agit de lutter contre les moustiques.

SÉCURITÉ
ATTENTION, AUX RODONTICIDES ET INSECTICIDES

Les produits utilisés par les applicateurs sont des produits fabriqués à partir de matières actives chimiques*.
Ils doivent donc être manipulés avec précaution pour éviter tout risque sanitaire. Les produits proposés au grand public ou aux restaurateurs sont beaucoup moins efficaces que les produits destinés aux professionnels, mais, mal utilisés, ils peuvent provoquer des troubles sur la santé. Si vous achetez ce type de produits, respectez le mode d'emploi.
Certains applicateurs sont agréés à la fois pour l'application et la vente de rodonticides et d'insecticides. La Maison Aurouze à Paris qui possède ces deux agréments peut vous conseiller et vous fournir certains produits le cas échéant.

*Les matières actives chimiques ou biocides font aujourd'hui l'objet d'une directive dont le but est de permettre une harmonisation des réglementations dans le cadre de l'Union européenne afin de favoriser les échanges sans risques ni pour l'homme ni pour l'environnement. Les industriels doivent désormais monter des dossiers d'agrément très coûteux.

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L'Hôtellerie Restauration n° 2949 Magazine 3 novembre 2005 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE