du 1er décembre 2005 |
S'EXPATRIER |
Des Français investissent à Moscou
Crêperies, brasseries, cantines Chefs gastronomiques par formation et par expérience, les cuisiniers français qui investissent à Moscou ont choisi des créneaux plus modestes.
Patrice Téreygeol, le plus Auvergnat des Moscovites, a lancé 3 Crêperie de Paris. Ici avec Julie et Jeannette, deux des serveuses. |
Patrice
Téreygeol vient de lancer sa 3e crêperie à Moscou. Originaire de Blanzat
dans la banlieue clermontoise (Puy-de-Dôme), il est arrivé à Moscou, il y a une
quinzaine d'années. Il a surtout pratiqué dans la gastronomie. Il a lancé des
restaurants très mode, conseillé le numéro 1 de la restauration moscovite, Arcadie
Novikov. Mais il voulait voler de ses propres ailes. Ayant remarqué qu'au pays des blinis
il n'existait pas de crêperie, il a sauté sur le créneau. Pour le nom, la référence
à Paris est plus porteuse que celle de la Bretagne. Il a ouvert la première Crêperie de
Paris dans une galerie marchande, il y a 3 ans. Succès immédiat. À la carte, il y a des
crêpes aux cuisses de grenouilles, aux escargots ; s'ajoutent les incontournables de la
Russie : Foies de volaille aux pommes de terre sautées, saumon mariné, caviar rouge
(oeufs de saumon). Il a même mis au point une crêpe pizza en plus d'une partie plus
classique avec salades, soupes, plats chauds comme de la blanquette ou de la selle
d'agneau et desserts. Les prix oscillent de 100 à 290 roubles (3 à 8,50 E) ; la crêpe
au sucre reste à 40 roubles (1,20 E). En boisson, il propose des vins chiliens ou
espagnols, des bordeaux et du cidre.
"Il y a à Moscou une place pour des restaurants abordables et de qualité",
explique Patrice Téreygeol. Pour preuve, devant le succès de la première, il a lancé 2
autres Crêperie de Paris. Même concept, même réussite. Elles sont ouvertes 7 j/7,
emploient 80 personnes. Maintenant, avec son associée russe, Patrice Téreygeol vise une minichaîne avec une dizaine d'établissements
d'ici à 2008. Car ici, il faut exploiter rapidement une bonne idée, avant que quelques
financiers ne se l'accaparent.
Au Zig Zag, le chef André Martin
est du Burundi avec un diplôme d'ingénieur en génie civil. Mais il préfère la
restauration, cela rapporte plus. Il gagne 1 700 E par mois.
Risque
de plagiat
David Desseaux et Jean-Michel
Cosnuau pensent la même chose. Ils viennent d'ouvrir Zig Zag. L'investissement reste
raisonnable, de l'ordre de 140 000 E, mais les loyers ont bondi, rendant la rentabilité
plus difficile. Alors ils ont déjà trouvé un deuxième lieu pour une nouvelle
implantation, près d'une station de métro avec une surface doublée pour moitié moins
cher. Leur idée : lancer une petite chaîne de Zig Zag. "Ici, la copie s'effectue
à grande vitesse, avec ceux qui ont les moyens d'investir rapidement des sommes
importantes", souligne David Desseaux.
Pour le chef du Tretyakov, un des plus chic
établissements de Moscou, l'évolution va se révéler impitoyable : "Il y a trop de restaurants à Moscou et
beaucoup font n'importe quoi. Dans le haut de gamme, une dizaine va subsister. Pour les
autres, ce qu'il faut maintenant, c'est des petits cafés, bons et pas chers."
"Pour les Russes qui n'ont pas besoin de dépenser beaucoup pour montrer qu'ils
existent", ajoute Jean-Michel Cosnuau, qui a déjà lancé plusieurs restaurants
ou night-clubs à Moscou. Les tickets moyens vont de 6 E pour le business lunch le midi à
15 E le soir. Ouvert 7 j/7, de 11 h 30 à 1 heure, Zig Zag propose les incontournables
sushis très prisés des femmes, des grillades, salades et autres plats avec
Saint-Jacques, thon, filet d'agneau, etc. "C'est un moyen de faire découvrir,
d'introduire une idée de la gastronomie à prix abordable", explique David
Desseaux.
Frédérique Hénin, patron du restaurant d'entreprise après de longues années dans des
gastronomiques.
Restaurant
d'entreprise
Pour sa part, Frédérique Hénin
s'est lancé dans la restauration collective en remportant l'appel d'offres pour la MDM
Bank, une des plus importantes du pays. Après Potel & Chabot dans les années 1990,
puis l'Eldorado, un des premiers gastrocuisines français de la capitale russe, et
quelques autres, il s'y met à son compte.
Il sert 750 repas par jour, le midi seulement.
L'approvisionnement est surtout local. Mais le porc, par exemple, vient du Brésil ou de
France, car il est moins cher que les productions russes. Cela permet au chef français de
vendre un repas complet pour 135 roubles (environ 4 E). Un prix compatible avec les
revenus des salariés. Et qui permet d'appliquer un coefficient multiplicateur de 3,5.
"Nous avons encore des marges de manoeuvre, ajoute-t-il. Nous allons ouvrir
la cafétéria au public. Nous allons proposer de 'vrais' sandwiches avec du 'vrai' pain."
Le fournisseur sera Serge Innocenti, qui vient de lancer une production de pain 'à la
française' et qui sert déjà les Crêperie de Paris en dépôt de pain. < zzz22v zzz99
ÊTRE CHEF À
MOSCOU Un chef français à Moscou peut espérer gagner entre 4 000 et 6 600 E dans les grands restaurants. Mais en contrepartie, les journées sont longues : 12 heures minimum et 6 jours sur 7. De plus, les conditions climatiques ne sont pas idéales. L'hiver est long, rude. Les loyers sont chers, mais il est parfois possible d'être logé. David Desseaux se souvient d'un chef qu'il avait recruté : nourri, logé, 5 000 E par mois qui n'a pas tenu que 2 trimestres. Moins évident, il y a aussi l'ambiance : des patrons ne supportent pas le départ de leur chef. Certaines anecdotes relatent menaces verbales et physiques, coups de téléphone intempestifs, coups de poing et départ précipité dans la plus grande discrétion pour revenir en France. En face, les cuisiniers russes, avec de l'ancienneté et de l'expérience, peuvent espérer gagner entre 850 et 2 500 E par mois. |
DES INFOS POUR
TRAVAILLER À MOSCOU Pour pouvoir travailler, étudier ou effectuer un stage à Moscou, vous devez être titulaire d'un visa d'affaires. Vous pouvez l'obtenir auprès des services consulaires de la Fédération de Russie (qui dispose d'antennes à Paris, Marseille et Strasbourg). Pour en savoir plus |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2953 Magazine 1er décembre 2005 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE