du 22 juin 2006 |
S'EXPATRIER |
DU SANDWICH AU RESTO
Dine, le pari londonien de Thomas Han
Arrivé dans la capitale britannique à 17 ans sans qualification, il rachète une sandwicherie à 22 ans. 3 ans plus tard, il ouvre son propre restaurant, aujourd'hui référencé dans le guide Michelin.
Nouvel intérieur, nouveau mobilier, nouvelle carte. En septembre 2005, Took's devient Dine. | L'intérieur médiocre de l'ancien bar-snack fait place à un décor sobre mais élégant, mettant en valeur un bel espace qui n'attendait que cela. |
Thomas
Han n'est pas du genre à se reposer sur ses lauriers. Pourtant, assis dans
un canapé du salon de Dine, son restaurant nouvellement décoré, le
jeune chef mesure le chemin parcouru. "Je n'ai jamais aimé l'école.
À 17 ans, j'étais en 3e technologique, j'avais déjà
redoublé 2 fois. Je suis venu à Londres pour apprendre l'anglais, et
parce que je savais qu'il y avait du travail." Mais quand on n'a aucun diplôme
en poche, pas même le brevet des collèges, les portes ne s'ouvrent pas
d'elles-mêmes. "J'ai commencé par faire la plonge dans une sandwicherie
à New Covendish Street, dans le West End londonien." Beaucoup d'heures
de travail, mais le commerce tourne bien, et Thomas apprend le métier. "Je
suis resté là 5 ans à préparer des sandwiches et à
faire la plonge", se souvient-il.
Puis, à 22 ans, il se lance. "J'ai emprunté
22 000 livres à mon entourage, ma famille, mes amis. Avec ça j'ai
ouvert ma propre sandwicherie, dans le nord de Londres." Avec les mêmes
recettes et les mêmes fournisseurs que son ancien patron, l'affaire est vite
rentable. "J'ai embauché directement un employé. En un an, mes dettes
étaient remboursées et j'ai commencé à gagner de l'argent."
Thomas aurait pu en rester là.
Ses difficultés d'adaptation au système scolaire français ne l'ont
pas mis en condition pour voir grand. Mais en privé, il a toujours eu la passion
de la cuisine. C'est sa femme qui va lui donner la confiance dont il a besoin pour
franchir ce nouveau cap. "En France, pour faire de la cuisine, il faut commencer
très jeune. À 26 ans je ne me sentais pas capable d'ouvrir un restaurant,
même si j'adore cuisiner. Ma femme, Sayara, m'a poussé à faire
une formation de cuisine."
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Vin français et
risotto contre bière et bacon
En 2002, il revend son commerce
et s'inscrit à l'école du Cordon Bleu de Londres "parce qu'elle proposait
une formation rapide en 10 mois". En parallèle, il suit un stage au
Roussillon, un restaurant français implanté à Londres. C'est encore Le
Roussillon qui l'embauche pour quelques mois comme commis de cuisine à
la fin de sa formation. Il y rencontre Nicolas Quillec, chef pâtissier depuis
10 ans. Tenté par l'aventure, Nicolas rejoint Thomas quand il rachète
un bar-snack dans le coeur de Londres, à Chancery Lane.
Sous des allures modestes, Took's
Wine Bar and Restaurant propose déjà une cuisine de qualité à
base de légumes et de produits locaux. Mais si certains, remarquent d'emblée
l'originalité de la cuisine de Thomas et Nicolas,
le public ne suit pas. "La clientèle voulait de la Stella et du bacon, alors
qu'on voulait servir du vin français et du risotto", se souvient le jeune
chef d'entreprise.
Au bout de 2 ans, l'affaire ne décolle pas,
Thomas est au bord de la faillite. Quitte ou double : en septembre dernier, Thomas
prend un dernier risque, et investit 15 000 livres pour élever l'image du restaurant
au niveau de la cuisine proposée. Nouvel intérieur, nouveau mobilier,
nouvelle carte : Took's devient Dine. L'intérieur médiocre hérité
du bar-snack fait place à un décor sobre mais élégant, mettant
en valeur un bel espace qui n'attendait que cela. L'identité du restaurant
est repensée. "Nous proposons une cuisine française, à base
notamment de gibier et de légumes, que l'on peut qualifier de 'paysanne améliorée".
Le logo, représentant une scène champêtre moyenâgeuse, illustre
ce classicisme revendiqué, à contre-courant d'une tendance au modernisme.
Pari gagné ? "Il est trop tôt
pour le dire. On commence à trouver notre clientèle mais la pérennité
de Dine n'est pas encore assurée. Pour l'instant je gagne mieux ma vie dans
la sandwicherie." Pour autant, Thomas ne regrette pas ses choix, l'apparition
de Dine l'année dernière dans le guide Michelin (2 fourchettes)
est un bon présage, et une juste reconnaissance pour une équipe fidèle
et dynamique. Thomas sait que
la renommée d'un restaurant se construit avec le temps, et c'est là
sa plus grande motivation. "Nous travaillons tous les jours pour maintenir notre
niveau et améliorer nos prestations. Être mieux dans l'assiette, dans
le service, c'est pour ça que je viens travailler tous les jours."
Antoine Larzul zzz99
zzz22v
Dine
Restaurant
Tooks Court
London
EC4A 1LB
Tél. : 00 44 207 404 1818 - Fax : 00 44 207 404 3838
info@dine-restaurant.co.uk
www.dine-restaurant.co.uk
En chiffres
Investissement
: £ 110 000 (achat du fonds de commerce) + £ 15 000 (rénovation) |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2982 Hebdo 22 juin 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE