du 5 octobre 2006 |
CONJONCTURE |
FACE AU PROBLÈME CRITIQUE DE LA TRANSMISSION
Le rôle essentiel d'Oseo dans le montage des dossiers
L'hôtellerie indépendante est en pleine mutation. Dans une note transmise au directeur du tourisme, Jean-François Tassin, président du Gefil et membre du conseil national du Tourisme, déclare : "Depuis 10 ans, le parc hôtelier accuse une perte de chambres importante, de l'ordre de 10 à 30 % selon les régions."
Ainsi, il semblerait que les régions touristiques, et surtout saisonnières, soient particulièrement visées, alors que le milieu urbain s'en tire relativement bien. Pour le groupe Oseo, issu du rapprochement Anvar-BDPME, la transmission des entreprises est une priorité, le tourisme étant considéré comme un secteur-clé de l'économie, qui représente environ 10 % des dossiers traités. Au niveau de la transmission, 71 % des dossiers concernent des restaurants contre 29 % pour les hôtels et autres types d'hébergement. Oseo intervient en partenariat avec l'ensemble des banquiers en cofinancement et/ou en garantie, qui, dans certains cas, avec l'appui d'un fonds de garantie régional, peut atteindre 70 % du concours bancaire. En 2005, le groupe a augmenté sa participation dans la transmission. Ainsi, globalement et tous secteurs confondus, Oseo a pris 600 ME de risques pour permettre à 3 600 entreprises d'obtenir 1,6 Mds E de financements. Devant la difficulté de transmission de l'hôtellerie indépendante, il est intéressant de voir quels types d'outils Oseo pouvait mettre en place en prenant 2 cas distincts : le littoral, en raison des difficultés de rentabilité liée à la saisonnalité, et enfin Paris intra-muros, où les difficultés se concentrent sur les valeurs immobilières.
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L'exemple du Capao au Cap-d'Agde
Le Capao est un hôtel
en bord de mer, situé au Cap-d'Agde, à 70 km environ de Montpellier.
Hôtel 3 étoiles de 50 chambres avec un restaurant d'une capacité
de 350 couverts, il est ouvert d'avril (vacances de Pâques) à fin septembre,
et enregistre surtout un pic de fréquentation pendant les 2 mois d'été,
ce qui lui permet de réaliser la plus grande partie de son chiffre d'affaires
annuel. Si l'histoire de l'hôtel ne date pas d'hier, en revanche, un nouveau
tournant est pris en 2003 quand le directeur de l'hôtel, Mathieu Daudet,
décide de racheter l'établissement à son propriétaire, après
10 ans passés à faire tourner l'établissement. "J'ai alors
décidé de m'associer à 50/50 avec un restaurateur du Cap-d'Agde,
M. Khalkhal, très connu dans la région. Nous avons trouvé
immédiatement un terrain d'entente." "Ce qui nous a permis de récupérer
l'enseigne du restaurant que j'exploitais, souligne M. Khalkhal, et la clientèle
a suivi."
Le montage financier a été
une réussite. Le groupe Oseo et ses partenaires bancaires - en l'occurrence
la banque régionale Dupuy de Parseval ainsi que le Crédit Agricole - ont
suivi à 100 % les deux associés. "Nous connaissions les deux acquéreurs,
et nous avons cru immédiatement en leurs capacités. De plus, nous avons
estimé très vite le fort potentiel à tirer de cet établissement",
nous confie M. Durant de la banque Dupuy de Parseval, notamment sur le plan
de la restauration.
La transmission s'est faite
en plusieurs étapes
En 2003, un 1erdossier
est présenté aux banques pour le rachat du fonds de commerce évalué
à 900 000 E TTC. Pour monter ce dossier de financement, le candidat repreneur
apportait 150 000 E, et demandait 750 000 E d'emprunt.
2 banques apportaient
leur concours à égalité : la banque Dupuy de Parseval et le Crédit
Agricole, prêt garanti par Oseo.
En 2005, un 2e
dossier est monté par les deux repreneurs pour le rachat des murs. Une
SCI répartie à 50/50 entre les deux couples (chaque épouse ayant
25 % des parts) est alors constituée. De nouveau, les banquiers apportent leur
concours. Mais cette fois, le financement demandé s'élève à
1 750 000 E, sans apport personnel.
Le montage est tout de même réalisé, et le financement réparti
entre les 3 mêmes banques : Oseo, Dupuy de Parseval et le Crédit Agricole,
avec une garantie Oseo Sofaris de 25 %. Un emprunt de 100 % est autorisé par
les banquiers.
Le résultat est couronné de succès,
le chiffre d'affaires s'emballe. En 2005, la part de la restauration, qui jusque-là
ne représentait que 50 % du chiffre d'affaires, s'élève à
plus des deux tiers. 350 à 400 couverts par jour sont réalisés
en été, et 50 couverts hors période estivale.
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
|
CA | 1 273 000 | 1 311 000 | 1 558 000 | 1 650 000 |
Prix moyen chambre | 95 | 98 | 102 | 105 |
RevPAR | 130 | 137 | 145 | 150 |
Dans ce dossier, d'après Denis Mervaille, Oseo a joué parfaitement son rôle de banque technique auprès des banques généralistes. "Il y a eu une parfaite complémentarité entre Oseo et la banque locale. Oseo a validé les dossiers transmis par le banquier local (au titre de banque spécialiste) et est intervenu en contre-garantie pour limiter le risque des banquiers." À noter que dans le même temps, les repreneurs avaient sollicité une demande de subvention auprès de la région. La réponse est intervenue 3 ans plus tard… négative.
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La
jolie réussite du Beauséjour Montmartre
Les cas de transmissions
dans Paris intra-muros présentent d'autres caractéristiques, qui peuvent
freiner le rachat des hôtels. La pression immobilière d'abord, ainsi
que la survalorisation des murs rendent souvent les transactions très difficiles.
Il existe pourtant de jolis cas de réussite. L'Hôtel Beauséjour
Montmartre en est un.
Classé 2 étoiles,
cet hôtel de 33 chambres, à 2 minutes du métro Place Clichy, appartenait
à des personnes âgées soucieuses de prendre leur retraite rapidement.
En 2003, 2 jeunes vont remporter l'affaire. L'un est diplômé de l'école
hôtelière du Luxembourg, et l'autre spécialiste dans l'immobilier.
L'affaire se conclut un 31 décembre. Le montant de la transaction murs et fonds
en rachats de parts de sociétés (SCI + SARL d'exploitation) s'élève
à 2,2 ME réalisés par UBP en partenariat à 50/50 avec Oseo
: "Le rôle d'Oseo a été déterminant, déclare l'un
des investisseurs. Leur connaissance du secteur de l'hôtellerie va permettre
au banquier d'émettre un avis fiable et circonstancié très rapidement.
Sans eux, notre banque ne nous aurait pas suivis, malgré un apport initial
de 25 %." "C'est une question de potentiel. Nous avons très vite vu
ce que nous pouvions tirer de cet établissement, déclare l'un des
repreneurs. 33 chambres à rafraîchir, un magnifique petit jardin
intérieur dans un emplacement proche de Montmartre, nous pouvions facilement
en faire un hôtel de charme. À l'époque, la clientèle était
essentiellement française et le taux d'occupation avoisinait seulement les
45 % à l'année. Nous savions que nous pouvions faire mieux (N.D.L.R.
: sur Paris, les taux avoisinent les 70 % à l'année)." L'histoire leur
donne raison. En 3 ans, le chiffre d'affaires a doublé. Entre 2004 et 2005,
il a augmenté de 27 % passant de 280 000 à 590 000 E HT. Le taux d'occupation,
pour sa part, passe de 45 à 80 % en 2004 pour atteindre 85 % en 2005. Le
prix moyen s'élève aujourd'hui à 72 E, contre 45 à 50 E
avant la transaction. Une nouvelle équipe a été mise en place. Dorénavant, l'hôtel fonctionne avec
10 personnes à temps plein, l'informatique a été installé,
les premières chambres ainsi que le hall d'accueil ont été rafraîchis,
avec un nouveau mobilier, une décoration simple et de bon goût.
De surcroît, l'hôtel dispose maintenant
d'un site internet, ce qui lui procure une clientèle étrangère, jeune
et de plus en plus nombreuse (45 % de la clientèle globale). Toutes les réservations
se font sur internet grâce aux partenariats passés avec des centrales
comme Active Hotels ou Expedia. L'établissement ne se situe dans aucun guide
ni aucune chaîne volontaire à l'exception de celle de l'office de tourisme
de Paris. "De ce fait, nous maîtrisons nous-mêmes les réservations."
/i>L'année 2007 devrait encore enregistrer des résultats record. Les
dirigeants misent sur 1 ME de chiffre d'affaires, et pensent déjà, non
pas à la revente, mais à dupliquer leur modèle dans Paris en
retrouvant une affaire identique ! Pour Oseo, cette affaire est atypique : "Elle
a été conclue au-delà des normes d'évaluation habituelles",
déclare Richard Livet, responsable marché tourisme d'Oseo BDPME.
Dans ce dossier, le rôle d'Oseo
a permis de clarifier les comptes en apportant une vraie connaissance du marché.
La décision a été prise en 24 heures, et s'est conclue un 31 décembre.
Un vrai conte de Noël. zzz36
Les facteurs de réussite
d'après Richard Livet, Oseo BDPME Ces 2 exemples de transmission, a priori délicates (pour l'une en activité saisonnière, pour l'autre, en survalorisation par rapport au compte d'exploitation), ont pu être traités pour plusieurs raisons : D'abord, les hommes qui, dans les deux cas, présentaient
des profils à la fois de professionnels et d'entrepreneurs inspirant confiance
aux banquiers. Ces 3 éléments ont favorisé et rendu possible, dans des délais très courts, l'obtention des prêts demandés, même dans des cas de transmissions souvent considérés très risqués dans la vie des entreprises. Il convient donc, en termes de transmission, de mettre tous les atouts de son côté. Pour le cédant Pour le repreneur Richard Livet |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2997 Hebdo 5 octobre 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE