du 26 octobre 2006 |
LA RESTAURATION EN QUESTION
À quoi ressemblera la restauration de demain ? La question est tentante. Encore faut-il avoir des réponses concrètes à apporter. L'an dernier, les fonds de pension ont fait une entrée remarquée sur le marché de la restauration française, et plus particulièrement parisienne. Plus récemment, ces dernières semaines, un cataclysme a soufflé sur les entreprises de restauration. Adieu les 39 heures ? Tout le monde devrait-il passer aux 35 heures, avec, à la clé, peut-être des arriérés d'heures supplémentaires à payer pour les entreprises ? Certaines y laisseront certainement des plumes, voire baisseront le rideau. D'autres s'en sortiront évidemment. Pour nous aider à y voir un peu plus clair, nous avons demandé à Bernard Boutboul (Gira Sic Conseil) de faire le point avec nous sur les évolutions du secteur. Et puis impossible de s'intéresser à la restauration d'aujourd'hui ou de demain sans faire appel à ceux qui ont contribué à son essor. Christian Picart, avec Buffalo Grill, Patrick Derdérian, avec Zebra Square et Bermuda Onion et aussi Christian Guignard, créateur d'Hippopotamus. Referaient-ils aujourd'hui la même chose ? Oui car la créativité est encore là, mais ni de la même façon ni au même endroit. Des idées, ils en ont. Alors oui, il y aura une restauration demain. Place aux jeunes - trop rares - qui auront la 'niaque' et oseront se lancer. Pour eux, la recette du succès sera toujours la même : une idée simple mais présentée de façon différente. D'ailleurs, on le sait et on le constate : 'tout' marche du moment que c'est… bien, c'est-à-dire intelligemment fait et positionné en termes d'offre et de prix.
Lydie Anastassion
TOUT MARCHE… SI C'EST BIEN FAIT
3 QUESTIONS À
BERNARD BOUTBOUL, GIRA SIC CONSEIL
"Attention aux indépendants qui
investissent des niches"
L'Hôtellerie Restauration :
Quel regard portez-vous sur les 20 dernières années ? Quel est le nouveau profil du restaurateur, du créateur
de demain ? Et le consommateur ? |
Ils ont marqué la restauration française
Christian Guignard,
créateur du concept Hippopotamus
Si c'était à refaire ?
Si j'avais 20 ans de moins, je partirai créer un concept
dans un pays comme l'Angleterre ou les États-Unis, là où on peut
bosser. En France, les gens ont des idées, mais on ne les laisse pas travailler.
Trop de problèmes de législation, d'imposition. Il faut bien comprendre
que le service ne marchera que si les gens gagnent très bien leur vie. Vu la
réglementation des horaires, on ne peut plus travailler dans le service. On
fait attention aux marges, du coup, on rogne sur la qualité. Le métier
est devenu très difficile. Il faut retourner à la mine, trouver d'autres
créneaux, d'autres concepts. J'ai quelques pistes.
La restauration de demain ?
Elle sera festive. La clé consiste à trouver une idée
toute simple mais à la faire différemment. Il y a un tas de choses à
faire au niveau des produits, des concepts qui doivent être moins compliqués
et plus généreux. Tout en gardant bien à l'esprit les valeurs de
base : rapidité, simplicité, qualité et gentillesse de l'accueil.
Sortons du côté ascétique et continuons à faire rêver
et à étonner. Je crois aux lieux de grande dimension.
Patrick
Derdérian, Bermuda Onion,
Zebra Square
Si c'était à refaire ?
Je ne pense pas que je ferais de la restauration en tant qu'exploitant.
Actuellement, il y a 2 options : soit rester un artisan avec quelques employés,
soit avoir la taille d'un groupe. Les marges sont différentes, les clients
sont différents et les contraintes sont importantes. Par contre, j'ai des idées
mais je ne les exploite pas moi-même. Mon choix serait plutôt de faire
du conseil pour d'autres professionnels.
La restauration de demain ?
La consommation évolue très vite. Les produits agroalimentaires ont progressé
en qualité. Le souci de la santé va prendre une influence
considérable dans la façon de se
nourrir. Parallèlement, la restauration devra être super-festive.
Christian Picart, créateur de
Buffalo Grill
Si c'était à refaire ?
Oui, bien sûr, je le referais. Même si les choses
sont différentes car à l'époque j'étais le premier à
faire du steak house en large périphérie. Mais je crois qu'il reste encore
aujourd'hui beaucoup de place à prendre sur le marché de la restauration.
La législation et les contraintes sont ce qu'elles sont mais si elles sont
identiques pour tout le monde, alors que le meilleur gagne. Là où ça
ne va pas, c'est quand les gens trichent.
La restauration de demain ?
Le créneau du sandwich est encore à développer.
On se dirige vers des formules anglo-saxonnes. J'ai toujours pensé que nous
avions en France un petit décalage par rapport aux États-Unis. L'offre
va s'élargir. Les indépendants auront bien sûr une place dans le
futur. Si les groupes paraissent plus forts, ils ont également des hauts et
des bas. La success story est encore possible. D'après moi, il est plus facile
de trouver de l'argent maintenant qu'avant. Mais les jeunes professionnels ont
un raisonnement différent, ils ne se lancent pas. La nouvelle génération n'est
pas stimulée par l'argent. Elle veut en gagner assez pour pouvoir vivre et avoir
des loisirs.
Propos recueillis
par L. A. zzz22v
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