du 30 novembre 2006 |
PERSPECTIVES |
POUR SONNER, ENFIN, LA MORT DE "THÉNARDIER"
L'ardente obligation pour les hôteliers d'une modernisation rapide
Albert Léchevin, hôtelier à Saint-Bonnet (05), propose un 'Plan Individuel de Modernisation des Petits Établissements Hôteliers de Tourisme'.
Albert Léchevin. |
"L'utilité de la nouvelle réglementation
relative à la sécurité dans les hôtels de tourisme ne fait
aucun doute : le prochain mort survenant dans un établissement non conforme
rangerait immédiatement les dubitatifs au rang des assassins. C'est la frénésie
incompréhensible, suspecte et intolérablement cynique, du pouvoir en place
et des industriels de la sécurité qui plonge dans le désarroi la
petite hôtellerie de tourisme.
L'ensemble des petits hôtels de tourisme
devrait être propre, correctement équipé, mais aussi rentable, sans
recours permanent au grand écart entre intérêts de l'exploitant,
lois sociales, lois fiscales et lois de l'hospitalité. Les clients y trouveraient
même, outre le plaisir d'y séjourner, une sécurité incendie
à toute épreuve…
Mais ce n'est là que la description
d'une rareté : celle d'un hôtel… moderne ! Celle que tente d'ailleurs
de promouvoir le prometteur et très opportun Comité de modernisation de
l'hôtellerie française créé par Mark Watkins.
Hélas, le détonnant rapport
de Coach Omnium de juillet 2005, révisé en 2006 qui fit tant de vagues
chez nos représentants et fit baisser honteusement la tête de nombreux
exploitants (y aurait-il des fondements de vérité ?) est affligeant :
30 % des hôtels sont à bout de souffle, 25 % sont dépassés,
voire vétustes… 1/6e seulement seraient irréprochables !…
et à présent : 65 % sont des contrevenants !
Et si la nouvelle réglementation
était une occasion inespérée de réaliser les rêves du
Comité de modernisation : une hôtellerie française, moderne, répondant
aux attentes de sa clientèle ? Et si
on
faisait renaître la fierté chez les exploitants de beaux établissements
? Et s'il était maintenant branché et enrichissant de travailler dans
l'hôtellerie ? Et si on sonnait la mort de Thénardier ?
Comment faire ?
Imaginons ensemble, s'il
vous plaît, un 'Plan Individuel de Modernisation des Petits Établissements
Hôteliers de Tourisme', que j'appellerais PIMH.
On l'a deviné, les nouvelles
règles vont influencer sévèrement la décoration, la distribution,
l'organisation sinon l'exploitation quotidienne des petits hôtels. Mais ajoutez-y
une bonne literie, des robinets neufs, quelques équipements de qualité
et la mise à jour des procédures d'exploitation quotidienne, nous ne
serons pas loin d'avoir des hôtels presque modernes, conformes en grande partie
aux attentes d'une clientèle enfin ravie de payer le prix affiché. Rappelons-le,
celle-ci ne demande pas une chambre bon marché, mais une harmonie qualité/prestation/prix.
Clairement, les clients sont prêts à payer un peu plus cher, si ce
qu'on leur propose n'est pas décevant. Et curieusement cela s'appelle un 'hôtel
moderne' alors qu'on croyait que ce concept d'agrément et de sécurité
était la base historique du métier !
Comment ça marche ?
Le candidat au PIMH dresse
un audit de son établissement, portant sur le bon état, la fonctionnalité,
le confort et l'agrément visuel de son hôtel, sa signalétique, ses
abords, ses enseignes, mais aussi les affichages, la réception, la salle à
manger, les menus, la literie, les sanitaires,
les prix, l'hygiène, l'harmonie des couleurs, la sécurité incendie,
la conformité électrique, le gaz, l'eau, les poubelles, les contrats de
travail, le bruit, les horaires du personnel, l'internet, le téléphone,
les déchets, la musique, bref tout ce qui en fait, ou n'en fait pas dans 65
% des cas, un établissement moderne.
Cet audit 'de faisabilité' financé par
les 'Fonds régionaux d'aide au conseil', suggère des solutions ou des
pistes de solutions ainsi qu'une évaluation sommaire et ses implications financières.
Ensemble, auditeur, exploitant et conseils
tirent les premières conclusions : pas réalisable, c'est que l'établissement
n'est pas viable à terme et que sa reconversion ou celle de ses exploitants
est à envisager rapidement. Pour ce faire, des dispositifs sont à
mettre en place favorisant ces sorties sans drame humain. Des solutions types peuvent
même être élaborées.
En revanche, si l'audit est favorable,
un professionnel compétent assisté des spécialistes nécessaires
établit un vrai projet détaillé,
chiffré avec programmation en phases pour la remise à niveau de l'établissement
sur 7, 8 ou 10 ans, c'est le 'Projet Individuel de Modernisation hôtelière'.
Il porte sur l'accueil, l'hygiène, la qualité générale des prestations,
et intègre non seulement la mise aux normes incendie mais toutes les autres
mises aux normes et mises à niveau.
Une phase prioritaire est déterminée,
favorisant à la fois la fréquentation de l'établissement et les
mises en sécurité urgentes. Un plan de financement détaillé
étale et organise les dépenses et amortissements dans le temps.
L'auditeur, l'exploitant et ses conseils,
tirent une deuxième fois les conclusions : Faisable ou pas ? Si ce n'est pas
faisable, ils étudient la reconversion programmée de l'affaire et de ses
exploitants comme ci-dessus. Si c'est faisable, les engagements de l'exploitant,
du maître d'oeuvre technique et financier, des organismes prêteurs, des
commissions de contrôles et de sécurité, des entreprises, etc.,
sont pris sur le respect du projet tant en termes de qualité, de quantité,
de délais, de prix et de suivi financier. L'exploitant se voit accorder un
délai de 7, 8 ou 10 ans pour achever sa mise à niveau y compris les
conformités incendie et autres.
Un tel projet pour un établissement
de 20/30 chambres peut parfaitement atteindre 600 000 E. Avec des investissements
amortis sur 5, 7 ou 10 ans c'est, en réalité, grâce aux décalages
dans les réalisations, un étalement de la dépense jusqu'à
12 ou 13 ans qui en résultera. Compte tenu des aides existantes (ou à
créer pour l'occasion !) c'est environ 30 000 E par an d'amortissements et
de dépenses qui sont à prévoir.
À
noter qu'au fil de la réalisation, l'augmentation progressive des prix et de
la fréquentation clients contribuera pour une bonne part au financement.
Le PIMH est un projet 'gagnant-gagnant'
S'il est réalisable,
non seulement l'exploitant y gagnera en confort de travail, en stress et en valorisation
de son patrimoine. Les salariés gagneront en amélioration des conditions
de leur travail et parfois en qualification. La clientèle, elle, y trouvera,
enfin, son compte… Et surtout, l'élévation quasi automatique des
établissements dans les classements et les référencements sera un
atout supplémentaire pour la fréquentation de notre pays par une clientèle
étrangère que le faible niveau actuel de notre hôtellerie rebute
déjà. Elle nous le fait d'ailleurs déjà sentir dans les
recettes touristiques de la nation… La collectivité trouvera ainsi par
le PIMH le retour de ses aides et subventions.
La mise en place des PIMH suppose
l'adhésion des intéressés et aussi le relais activement enthousiaste
de leurs représentants qui trouveront là une occasion de redorer leur
blason… Acceptons les contraintes de cette réglementation surprotectrice,
imposée sans concertation. Des solutions existent. Le PIMH en est une. À
vous 'les meneurs' de l'aménager ou d'en proposer d'autres. L'enjeu, c'est
de relancer la machine à gagner des clients et de retrouver de nécessaires
bénéfices à nos entreprises hôtelières."
zzz52
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L'Hôtellerie Restauration n° 3005 Hebdo 30 novembre 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE