du 7 décembre 2006 |
ÉDITO |
HALTE AU RACKET
Contrairement à une idée bien
ancrée dans la mentalité française, le racket administratif ou
institutionnel n'est pas une inéluctable fatalité.
À l'instar des citoyens américains
qui, depuis longtemps, ne s'en laissent pas compter par les pouvoirs publics (les
Californiens n'ont pas hésité, il y a quelques années, à débarquer
un gouverneur dont la propension à augmenter les impôts devenait franchement
insupportable), il est temps ici de réagir et de profiter à la fois
de la judiciarisation croissante de la société et de la période électorale
pour affirmer ses droits.
Certes, on ne gagne pas à tous
les coups, mais ce n'est pas une raison pour ne rien faire.
Les heureux abonnés à
notre hebdomadaire L'Hôtellerie Restauration
n'ont pas manqué de s'attarder sur la victoire remportée par un hôtelier
parisien face à la redoutée (mais pas redoutable) Sacem chargée
de recouvrer avec des méthodes pas toujours très orthodoxes les droits
des auteurs, compositeurs de musique.
Que l'on ne s'y méprenne pas : il
ne s'agit pas de renoncer à rémunérer lesdits auteurs sans lesquels
toute création deviendrait impossible. Comme un cuisinier, un chanteur ou un
compositeur doit bien évidemment pouvoir vivre de ses talents.
En revanche, il vaut mieux
ne pas hésiter à faire valoir ses droits, y compris devant les tribunaux,
lorsque aucune solution amiable ne se révèle possible. C'est ce qu'a fait
le p.-d.g. des hôtels du groupe Frontenac en refusant de payer des droits
pour la diffusion de musique dans les chambres d'hôtel considérées
comme un lieu privé.
Car la Sacem n'a pas hésité
à poursuivre en justice
l'hôtelier,
malgré le texte pourtant très clair d'un arrêt de la Cour de cassation
de 1971 qui précise : "Les chambres d'hôtel constituent un lieu privé…
La réception par les clients des oeuvres du répertoire de la Sacem dans
leur chambre ne saurait donner lieu au paiement de redevances." Dans sa grande
sagesse, le tribunal d'instance du VIIIe arrondissement de Paris a bien
évidemment confirmé la position de la Cour de cassation.
Mais pour obtenir un tel résultat, il a fallu
beaucoup de persévérance au patron du groupe Frontenac avant d'aboutir
à ce résultat en dépit des pressions, menaces et autres manoeuvres
dilatoires de la Sacem.
Mais cette victoire n'est pas encore
définitive, puisque la Sacem a fait appel de la décision, ce qui est son
droit, mais révèle toutefois un empressement inquiétant à
refuser les évidences.
Au-delà de la simple argutie
juridique, c'est la victoire du pot de terre contre le pot de fer dont il faut se
féliciter. Et surtout en tirer pour la profession des conséquences
claires : non, les administrations, organismes sociaux et autres institutions vivant
de l'argent des entreprises n'ont pas tous les droits. Non, les contrôleurs
du fisc, de l'Urssaf, de la médecine du travail, de la sécurité,
de l'hygiène, des fraudes, des douanes, de l'inspection du travail - et on
en oublie forcément - n'ont pas tous les droits. Les organismes collecteurs
de cotisations en tout genre ne sont pas habilités à faire n'importe
quoi, contrairement à ce qu'ils semblent considérer.
Merci au groupe Frontenac pour la
profession d'avoir démontré qu'il est possible d'obtenir gain de cause
quand on est dans son droit.
L.H.R.
zzz80
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L'Hôtellerie Restauration n° 3006 Magazine 7 décembre 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE