du 18 janvier 2007 |
RESTO CONCEPT |
POUR BERNARD BOUTBOUL, GIRA SIC CONSEIL
LES CONCEPTS DE LA RESTAURATION DOIVENT FAIRE UNE RÉVOLUTION
Les concepts de restauration des années 1980 seraient-ils dépassés ? Aujourd'hui, des nouvelles enseignes apparaissent et se développent un peu partout en France et à l'étranger. On y retrouve la plus grande variété de produits, de thèmes, de formules, notamment en centre-ville. Mais peut-on parler de nouveaux concepts ? Comment se définissent ces nouvelles formules de la restauration ?
Auteur du sujet interactif 'Idées simples pour doper les recettes de votre restaurant'
Chez Cojean, tout semble en harmonie entre l'assiette et le décor. |
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Le
mot 'concept' en restauration est apparu dans les années 1980. Avant cette
année, déclare Bernard Boutboul directeur du Gira Sic Conseil, on se faisait
plaisir en allant au restaurant. On prenait son temps. On ne regardait pas à
la quantité, et on ne cherchait pas à tout prix des plats hypocaloriques.
C'était l'époque de la restauration plaisir, qu'il s'agisse de sorties
loisirs ou de repas d'affaires.
Le restaurant emblématique de cette période
était la petite auberge à la campagne ou bien le restaurant gastronomique.
D'un point de vue économique, c'était l'époque production.
Entre les années 1980 et 2000,
on assiste à une explosion des chaînes. Courtepaille est le premier
du genre à se lancer en 1961, suivi par Hippopotamus en 1968. L'archétype
pourtant de ces nouveaux concepts est incarné par Buffalo en 1980.
Le concept répond toujours au
même principe. D'après le Syndicat de la restauration rapide (Snarr)
: "Il s'agit de restaurer le client autour d'un monoproduit, que ce soit du
boeuf,
du poulet, ou encore de surfer sur la nouvelle vague du 'végétarien'."
L'explosion de ce type de cuisine va
être aidée par deux phénomènes conjoints : la perte de transmission
du savoir-faire en cuisine d'une part et l'évolution du temps de travail d'autre
part qui entraînent une 'féminisation' des repas, qui consiste pour le
consommateur (homme ou femme) à privilégier des repas fractionnés,
plus rapides et moins caloriques.
Une nouvelle façon
de vendre et de se vendre en centre-ville
Les chaînes qui s'engouffrent
dans cette voie vont vouloir développer très vite le réseau, notamment
au travers de la franchise. Les business plan prévoient non seulement le premier
concept, mais surtout calculent des retours sur investissements rapides pour permettre
un développement accéléré. Au cours de cette période, il
n'était pas rare d'entendre les nouveaux 'patrons des chaînes' parler
d'une croissance à 2 unités au cours de la 2e année.
Vis-à-vis du consommateur,
on joue surtout sur le côté festif, et sur les outils de communication
: cartes imaginatives et tape à l'oeil, ambiance sonorisée genre disco,
service sexy. Le mix-marketing permet de calculer des prix de revient au plus juste
(prix-produits-emplacements). Les ratios 'prime-costs' sont tirés au cordeau
et ne doivent jamais dépasser les 65 %.
Dans la foulée de cette vague
de restaurants vont se développer les 'jumbo' de la restauration (dixit Bernard
Boutboul) du type Géopoly, Circus Line… qui offrent des salles de 450
couverts par établissement. Boostés par une croissance économique
à plein régime, les restaurants tirent bien leur épingle du jeu.
Pourtant deux dates vont modifier radicalement
l'attitude des consommateurs vis-à-vis de la restauration : 1976 et 2000,
qui marquent les deux crises de la 'vache folle'. Les consommateurs réagissent
à cette époque contre une restauration qu'ils imaginent peu fiable.
Ils veulent être rassurés par la qualité des produits qu'ils consomment
plutôt que d'être abusés par des cartes alléchantes et des
environnements décalés. Les mesures de traçabilité des produits
fonctionnent à plein régime et les contrôles rassurent les clients.
Des enseignes comme Cojean, le premier à lancer la formule, mais aussi comme Jour, Casa del Campo, etc., vont montrer que la rentabilité peut être au rendez-vous, mais pas à n'importe quel prix. |
Nouvelles formules urbaines, nouveau modèle
économique
Dans ce contexte tourmenté,
et forts de l'expérience des anciens, de nouveaux restaurateurs vont ainsi
faire leur apparition, dans les années 2000. Leur formule est simple : fidéliser
les clients et promouvoir une culture d'entreprise qui permet de constituer des
équipes solides et fiables.
Ces deux ingrédients vont
modifier totalement les ratios économiques. Des enseignes comme Cojean, le
premier à lancer la formule, mais aussi comme Jour, Casa del Campo, etc.,
vont montrer que la rentabilité peut être au rendez-vous, mais pas à
n'importe quel prix. En effet, le soin apporté aux relations humaines et la
haute qualité des produits fait grimper le prime cost de plusieurs points par
rapport aux chaînes classiques. Le développement est calculé mais est plus progressif. "Je
n'ai jamais calculé un nombre d'ouvertures moyen par an. Je travaille sur des
valeurs de base qui sont l'amour du métier et du travail bien fait et la motivation
de mon équipe, déclare Alain Cojean, nous n'avons d'ailleurs jamais
fait de publicité pour nos restaurants. Le bouche à oreille me suffit."
Cela se sent. Tous semblent en harmonie chez Cojean, le sourire des serveuses, le
blanc des murs, les soupes fumantes, les salades imaginatives et fraîches,
tout semble en harmonie entre l'assiette et le décor.
Pour assurer une certaine rentabilité à
leurs établissements, de nouveaux indicateurs doivent être appliqués
: fournir de très gros volumes dans un laps de temps très court. Les horaires
d'ouverture ont une amplitude très courte, de 11 heures du matin à 16
heures, voire 19 heures selon les emplacements. Cette souplesse d'horaire a par
ailleurs des effets bénéfiques : elle permet de recruter dans des populations
diverses : étudiants, mères de famille souhaitant retravailler, etc.
Seul point faible pour le moment, le
prix moyen est un peu plus élevé que les fast-foods traditionnels, entre
7 et 15 E. Mais la formule marche. La 'restauration rapide' de centre-ville est
en train de faire sa révolution tranquille en s'appuyant sur les valeurs fondamentales
de la restauration, qui sont la qualité de l'accueil et la qualité du
produit.
La restauration thématique
choisit la périphérie
De leur côté,
les restaurants thématiques adoptent une position inverse. Prenant le contre-pied
de cette tendance 'urbaine', certains choisissent de déserter les centres-villes,
et d'investir les périphéries de ville, ce qu'explique très bien Laurent Carraux, président de El
Rancho : "Ce qui nous distingue des nouveaux concepts de centre-ville, c'est
essentiellement notre cible de clientèle. Nous cherchons à accueillir
une clientèle familiale le week-end attirée par notre concept exotique.
Dans nos restaurants, vous pourrez ainsi trouver un espace enfant, et un menu enfant.
Le ticket moyen oscille autour de 20 E.
En revanche, notre développement est devenu
plus lent car le concept du restaurant solo de grande capacité (180/200 places
assises et 500 couverts par jour le week-end) a un coût. Nous travaillons
sur des investissements de l'ordre de 1,5 ME, voire 2 ME, avec des
exigences en surfaces foncières très importantes."
Pourtant, ce concept-là marche
lui aussi et s'adapte très bien à la clientèle locale.
En termes de tendances, le panorama de la restauration
subit de profondes évolutions. La restauration rapide de centre-ville adopte
une attitude plus zen, plus feutrée, plus harmonieuse, alors qu'en périphérie
des grandes villes se développe une restauration thématique tournée
vers la restauration loisirs. Sans aucun doute, d'autres concepts devraient voir
le jour, notamment sur le créneau du service à table, en centre-ville
encore très traditionnel. Par ailleurs, il y a fort à parier que ces
nouveaux venus dans la restauration en adoptant les valeurs fondamentales que sont
l'accueil et la qualité des produits et des hommes devraient redorer l'image
de la restauration auprès des jeunes et peut-être pallier le déficit
chronique de manque de personnel. Un beau challenge pour la restauration de demain
!
zzz22t
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L'Hôtellerie Restauration n° 3012 Hebdo 18 janvier 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE