du 22 février 2007 |
RESTAURATION |
RÉVOLUTION
Les producteurs jusque dans les assiettes
Yssingeaux (43) Bannir le terroir pour s’appuyer sur un ‘territoire’, limiter le personnel, pour continuer à travailler avec plaisir, c’est la révolution d’André Perrier en Haute-Loire.
À 52 ans André Perrier a décidé de changer de cap. “J’ai fait un constat : plus le temps passe, plus je travaille. Sans gratification supplémentaire ni reconnaissance. Alors, devenant un peu philosophe, et un peu révolutionnaire, j’ai décidé de prendre un virage pour garder le plaisir de faire mon métier : arrêter la restauration classique. Diminuer le personnel pour limiter au maximum les charges.” Le tout centré sur les produits locaux. “90 % de ce que je transforme viennent de la Haute-Loire. L’appellation contrôlée (AOC) pour la lentille verte du Puy et les quotas laitiers ont poussé des agriculteurs à se diversifier : foie gras, escargots, fruits rouges, fromages, pisciculture. Tout cela a favorisé l’émergence d’une nouvelle identité culinaire.”
Mariage des passions
L’approche originale du chef consiste à mettre en avant les hommes ou les
femmes, ceux et celles qui travaillent avec une passion identique à la sienne.
Les producteurs arrivent ainsi jusqu’au bord de l’assiette ; ils sortent de
l’anonymat ; ils sont cités dans les menus ; ils se laissent deviner derrière
les légumes, les fromages, les viandes…
Concrètement, cela se traduit par six plats, organisés en trois menus et 30
couverts maximum par service, contre 50 auparavant. Les intitulés sont
évocateurs : l’envie de mon merveilleux département (26 E) ; curiosités de la
jeune Loire (20 E). Et en détail cela donne : le Cube de poitrine de porc
fermier confit aux épices, cuit lentement, chou rouge aux pommes et lardons,
crémeux de pommes de terre et choux-fleurs. Avec les précisions supplémentaires : les pommes de terre de Lucien Maître, producteur au village de Julliange ; le
porc fermier de Denis Chalendar, élevé aux céréales et en plein air au village
de Freytis – Beaulieu ; le chou et chou-fleur de Jean-Philippe et Isabelle
Valentin, notre maraîcher d’Yssingeaux.
Le chef laisse aussi à la disposition des clients deux gros classeurs avec les
press-books de ses fournisseurs, un pour les solides, un autre pour les
liquides, car pour les vins la politique reste la même que des indépendants
passionnés.
Des contraintes
“Cela peut paraître idyllique, mais il y a tout un lot de contraintes. Les
habitudes du monde agricole ne sont pas adaptées à la restauration pour les
livraisons. Donc il faut savoir jongler, et cela entraîne un surcoût. Puis la
nature reprend ses droits, les quantités ne sont pas extensibles. Je propose ‘le
coup de coeur’, c’est comme un plat du jour, entièrement dépendant des quantités
livrées et quand c’est fini, c’est fini.”
Bien ancré dans son territoire, André Perrier a repris l’affaire familiale.
C’était un bistrot construit en 1911 par son arrière-grand-père. “Les gens qui
venaient aux foires pouvaient y boire et y manger à toute heure.” Le restaurant
proprement dit a été créé en 1953 et la partie hôtel l’année suivante, avec une
adhésion aux Logis de France.
“J’ai toujours baigné dans cette ambiance, cuisine et bistrot. À huit ans je
voulais déjà être cuisinier.” Malgré les tentatives maternelles pour l’en
dissuader, André Perrier s’est retrouvé au lycée hôtelier de Nice. “J’ai choisi
la côte d’Azur pour être plongé dans une forte culture touristique.” Après
quelques maisons, le nouveau chef revient rapidement à Yssingeaux. Sa mère a
besoin de lui pour faire tourner l’affaire. Il a 22 ans. Puis il épouse Monique
dont les parents sont agriculteurs. Son premier contact avec le monde agricole.
Qui se concrétise un peu plus aujourd’hui avec cette nouvelle approche entre
cuisiniers et producteurs.
Pierre Boyer zzz22v 017h34
Le Bourbon
43200 Yssingeaux
Tél. : 04 71 59 06 54
www.le-bourbon.com
En chiffres
Logis de France (11 chambres en 3 cheminées)
Premier labellisé Qualité Auvergne
Membre des Toques d’Auvergne
CA 2005 HT : 305 000 E (chiffre affaibli par l’impact négatif du chantier qui
s’est tenu pendant 3 ans sur la place en face de l’établissement), dont 20 %
pour la masse salariée, 32 % avec les charges salariales et patronales
Menus de 20 à 42 E, plus carte
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L'Hôtellerie Restauration n° 3017 Hebdo 22 février 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE