du 3 mai 2007 |
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POUR PRÉPARER LA REPRISE D'UNE AFFAIRE
BIEN DISTINGUER CESSION DU DROIT AU BAIL ET CESSION DE FONDS
Au moment de reprendre une affaire, vous êtes nombreux à vous heurter au langage juridique qui entoure l'acquisition d'un fonds de commerce. Or, comprendre le sens et la portée de chaque terme est très important. Marc Gaillard, avocat au barreau de Paris, fait ici le point sur la cession de droit au bail et la cession de fonds de commerce.
Propos recueillis par Tiphaine Beausseron
L'Hôtellerie
Restauration : Quelle est la
différence entre la cession de droit au bail et la cession du fonds de commerce
?
Marc Gaillard :
La cession du fonds de commerce est la vente des éléments qui, exploités
dans un local commercial, constituent le fonds de commerce. Elle comprend donc plusieurs
éléments, notamment le bail, la clientèle, le matériel…
À l'inverse, la cession de droit de bail ne compte qu'un élément
: le droit de bénéficier d'un contrat de location pour exploiter une activité
dans un local déterminé. Si le local est vide, le droit au bail peut être
cédé par le propriétaire des murs du local (on parle alors d'un pas-de-porte).
Si le local est exploité, le droit au bail peut être cédé par
le locataire en place, à condition que le contrat de bail l'y autorise (c'est
dans cette hypothèse que l'on parle de droit au bail).
La cession du droit au bail ou la cession du fonds
sont-elles toujours possibles ?
La cession du seul droit au bail est très
souvent (dans 90 % des baux commerciaux) interdite par le bail lui-même. Quant
à la cession du fonds de commerce, elle peut être encadrée. Cependant,
elle ne peut pas être interdite, et le bailleur n'a pas le droit de s'opposer
à la cession du droit au bail quand celui-ci est vendu en même temps
que le fonds de commerce.
Pourquoi la cession du seul droit au bail est-elle
interdite ?
Parce que le droit au bail est intimement lié
au local. Il n'est absolument pas dépendant du travail entrepris par le locataire.
Dans ces conditions, il paraît normal que le locataire ne puisse pas gagner
de l'argent en cédant ce droit. À l'inverse, le fonds de commerce, parce
qu'il est l'oeuvre de l'exploitant qui, après l'avoir créé ou acquis,
l'a développé, peut être librement cédé par le commerçant
qui en est propriétaire.
Il existe néanmoins un cas, prévu
par le Code de commerce, où la cession du seul droit au bail est toujours possible.
Quel est-il ?
Il s'agit de l'hypothèse du locataire qui
a demandé à bénéficier de ses droits à la retraite
ou qui a été admis au bénéfice d'une pension d'invalidité.
Celui-ci a la faculté de céder le seul droit au bail avec un changement
d'activité, sans le fonds de commerce. Ces dispositions (article L.145-51 du
Code de commerce) bénéficient également à l'associé unique
d'une entreprise unipersonnelle
à responsabilité limitée, ou au gérant majoritaire depuis
au moins 2 ans d'une société à responsabilité limitée
lorsque celui-ci est titulaire du bail.
Dans la pratique, dans quels cas voit-on des cessions
de droit au bail sans vente de fonds ?
Essentiellement dans l'hypothèse exposée
ci-dessus, du locataire qui entend bénéficier de ses droits à la
retraite, mais également - parfois - dans le cas de la cession d'un très
bon emplacement commercial. Dans ce dernier cas, le bailleur perçoit une
indemnité pour donner son accord à la cession du seul droit au bail,
permettant ainsi au locataire cédant
de
ne pas vendre son fonds de commerce, mais de le déplacer à une nouvelle
adresse.
Mais si l'exploitant d'un fonds vend le droit au
bail sans vendre le fonds, qu'est-ce que l'acheteur acquiert ? Le seul droit
de bénéficier d'un contrat de bail commercial pour ce local ?
Tout à fait, le cessionnaire du droit au
bail n'acquiert, auprès du cédant, que le seul droit au bail. Le fonds
de commerce disparaît alors.
Cela signifie-t-il que l'exploitant qui part à
la retraite a cessé préalablement son activité, et que le fonds
de commerce n'existe plus du fait de son départ à la retraite ? Ou peut-être
qu'il l'a mis en location-gérance ?
La cession du seul droit au bail ne peut pas s'accompagner,
parallèlement de la mise en location-gérance du fonds, puisque ledit fonds
comprend le droit au bail qui est cédé.
Si l'exploitant, qui part à
la retraite, utilise la faculté donnée de céder son droit au bail,
alors le fonds disparaît en même temps que la cession est conclue.
Un exploitant de CHR est-il libre de céder
son fonds de commerce comme bon lui semble ?
Ainsi qu'il a été exposé ci-dessus,
la cession du fonds de commerce ne peut pas être interdite. Toutefois, le
contrat de bail peut encadrer cette cession et comporter, par exemple, une clause
qui oblige le vendeur du fonds de commerce à appeler le bailleur des locaux
à la cession du fonds, ou qui prévoit que la cession ne peut intervenir
que devant notaire, ou encore qui exige que le vendeur du fonds soit à jour
des loyers… zzz62
FC0607
Exemples
de clauses qui, dans un contrat de bail commercial, encadrent la vente du fonds
de commerce Clause
imposant que le locataire soit à jour de ses obligations Exemple d'une clause qui interdit la vente du seul droit au bail "Ne pouvoir céder son droit au présent bail qu'en totalité et à l'acquéreur de l'intégralité de son fonds de commerce." |
Notre conseil Avant d'acheter ou de vendre votre fonds de commerce, il est très important de bien analyser toutes les clauses du bail commercial. Pour cela, faites-vous aider par un avocat spécialisé en baux commerciaux ou en cession de fonds de commerce. |
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L'Hôtellerie Restauration n° 3027 Hebdo 3 mai 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE