du 12 juillet 2007 |
L'ÉVÉNEMENT |
BAISSE DE LA TVA EN RESTAURATION
C'EST REPARTI POUR UN TOUR !
La Commission européenne propose de prolonger jusqu'en 2010 les régimes dérogatoires des taux réduits de TVA dont bénéficient certains États membres, en attendant que les 27 pays se mettent d'accord sur une simplification des taux réduits. Ce qui repousse d'autant la demande de la France de faire bénéficier le secteur de la restauration du taux réduit.
Par Pascale Carbillet et Sylvie Soubes
Depuis
plusieurs années, le régime de la TVA en Europe revient régulièrement
à l'ordre du jour des réunions des différentes instances européennes.
Seul problème : pour réformer ces règles, il faut obtenir l'accord
de la totalité des États membres. Ce qui était déjà
difficile à 15 États membres devient quasiment impossible à
27.
Au plus fort de son actualité vers la fin
de l'année 2005, le dossier du taux réduit de TVA pour certains secteurs
d'activité - dont la restauration - est une véritable 'patate chaude'
que les instances européennes se renverront à tour de rôle. Le
6 décembre 2005, lors d'un Ecofin, les ministres des Finances ne parvenant
pas aboutir à un accord, renvoient le dossier au sommet des chefs d'État
qui se tenait le 15 et 16 décembre. Chefs d'État qui parviendront in
extremis à s'entendre sur le budget de l'Europe, mais qui renverront à
nouveau le dossier aux ministres des Finances pour un examen lors d'un Ecofin qui
se tiendra le 24 janvier suivant. Ces ministres ne parvenant toujours pas à
s'entendre, décideront alors de la nomination d'un organisme indépendant
afin que ce dernier rende un rapport dix-huit mois plus tard - soit à la
fin juin 2007 - sur l'opportunité de modifier les règles en matière
de TVA, et faire bénéficier du taux réduit certains secteurs d'activité.
C'est un rapport contenant pas moins de 103 pages que rendra Copenhagen Economics
le 27 juin 2007. La principale conclusion de ce rapport est que l'établissement
d'un taux de TVA unique (par État membre) serait le meilleur choix d'un point
de vue économique. Ce qui permettrait d'améliorer le pouvoir d'achat des
consommateurs, de réduire les distorsions dans le fonctionnement du marché
intérieur, de simplifier les règles et de diminuer les coûts de
mise en oeuvre pour les entreprises. Tout en reconnaissant que le recours à
des taux réduits peut se révéler bénéfique pour certains
secteurs bien ciblés, comme certains services fournis localement, notamment
les services dits d'économie familiale.
La Commission propose plus
de flexibilité pour le taux réduit
C'est à la lecture
de ce rapport que la Commission européenne a adopté le 5 juillet une communication
dans laquelle elle déclare qu'une simplification et une rationalisation de
la structure existante des taux de TVA s'imposent, en particulier pour les taux
réduits de TVA. Elle estime qu'il faut davantage de flexibilité pour permettre
aux États membres d'appliquer des taux réduits de TVA aux services fournis
localement. "L'application de taux réduits de TVA est une question extrêmement
sensible dans un domaine où le principe de l'unanimité contraint toutes
les parties concernées à tendre vers un compromis. Je suis très
heureux de lancer aujourd'hui un vaste débat politique entre les États
membres ; nous devons connaître leur point de vue avant de définir une
politique à long terme, cohérente et réalisable", a déclaré
Laszlo Kovacs, membre de la Commission chargée de la Fiscalité et de l'Union
douanière. En attendant un hypothétique accord, la Commission propose
de prolonger jusqu'à la fin 2010 la plupart des dérogations qui arrivent
bientôt à expiration.
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Réactions
Didier Chenet, président
national du Synhorcat
Le président de la République nous a dit qu'il tiendrait
la promesse que son prédécesseur nous a faite. Nous n'avons aucune
raison de croire qu'il ne va pas le faire. Nous lui faisons confiance. Quand il
l'a dit, il a eu la prudence de ne pas donner de date. Vous savez, un quinquennat
c'est long et court à la fois. Il y a deux possibilités : soit on joue
le jeu des institutions européennes et on attend qu'aboutisse le traité
simplifié. Mais le feu vert ne peut pas, alors, avoir lieu avant 2010. Soit
on joue la subsidiarité. Aujourd'hui, c'est le président de la République
qui prend les décisions. Le régime le lui permet. Il va donc se trouver
devant un arbitrage purement politique. Est-ce que sa position vis-à-vis
de Bruxelles pourra lui permettre de soutenir ce passage en force ? C'est toute
la question. Il faut aussi prendre en compte que cet arbitrage politique va s'inscrire
dans un contexte d'autant plus délicat que la France sera à la présidence
de l'Europe. En ce qui nous concerne, nous sommes, et vous le savez, très
attachés à cette baisse de la TVA. Actuellement, nous subissons une
distorsion de TVA qui n'est pas admissible. Cela dit, il faut être très
vigilant à ce qu'une baisse ne se fasse pas au détriment d'une autre
partie de la profession. Nous ne voulons pas aller vers un taux moyen. Grâce
à Nicolas Sarkozy et à Renaud Dutreil, nous bénéficions
d'allégements de charges et nous veillerons à ce que cette baisse ne
soit pas moins avantageuse. D'autre part, le Synhorcat n'entend pas se plier à
la règle du '1/3, 1/3, 1/3' qui est pour moi le fait d'un lobbying. Je vous
rappelle que nous sommes dans une économie libérale
et que, par conséquent,
c'est le marché qui dictera aux professionnels les règles de conduite
qu'ils doivent tenir. Si la commission est restée vague nous concernant, c'est
parce qu'elle attend comme tout le monde la signature de ce traité simplifié.
À nous de peser pour que notre cas soit abordé de manière claire et précise lors de
l'élaboration de ce nouveau texte.
André
Daguin, président confédéral
de l'Umih
Laszlo Kovacs a la réputation d'être
quelqu'un de très prudent. La commission est aussi, je pense, influencée
par le cabinet danois. Chez eux, le taux de chômage est de 4,5 %. On peut
dire qu'ils sont dans le plein emploi. Au Danemark, si on baissait le taux de TVA
en restauration, on volerait les salariés des autres secteurs. En France, nous
ne sommes pas dans le même cas de figure. Nous, nous en restons à ce
que Nicolas Sarkozy, alors candidat à la présidence de la République,
nous a annoncé lors de notre congrès de Marseille. Il nous a dit qu'il
tiendrait la promesse qu'on nous avait faite. Et ce n'est pas un cadeau qu'on va
nous faire, c'est un engagement qu'on prend. 1/3 des sommes récupérées
sera destinée aux salariés, 1/3 aux clients (prix de vente), 1/3 à
l'investissement. Je souligne à ce propos que les mesures transitoires n'ont
pas été perdues. Si les restaurateurs bénéficient actuellement
de 180 E par mois par salarié et sans limitation de salaire, le secteur a tenu
promesse. Grâce à cette mesure, nous avons embauché davantage
que les autres secteurs en créant 20 000 emplois en 2006. Notre secteur est
également parmi les deux premiers à avoir augmenté autant ses salariés.
Donc, quand on nous aide, on ne perd pas sa mise. La TVA à taux réduit
pour la restauration ne sera pas un cadeau mais une mesure rentable. De toute façon,
j'ai confiance dans Nicolas Sarkozy qui a pour habitude de tenir ses promesses.
Nous avons écrit à l'ensemble des membres qui composent la nouvelle
Assemblée nationale. Nous leur avons rappelé que la baisse de la TVA était
essentielle pour la restauration. Et je peux vous dire que nous avons eu beaucoup
de réponses et la plupart étaient favorables à cette baisse. Nous
avons demandé à rencontrer plusieurs ministres ainsi que le président
Nicolas Sarkozy. Mais cela ne servait à rien de les rencontrer avant de connaître
le rapport de Laszlo Kovacs. À l'heure où je vous parle, le rendez-vous
du 19 juillet à l'Élysée avec le président de la République
est confirmé. Les présidents de branche de l'Umih et moi-même seront
reçus très précisément à 16 h. Tout ce que je peux
vous assurer, c'est que l'échéance de 2010 est inacceptable. Nous avons
été menés en bateau pendant cinq ans et ce n'est pas une croisière
gratuite de deux ans supplémentaires qui va
nous satisfaire. Pour nous,
la baisse de la TVA, c'est 2008.
Jean-François
Girault, président national
de la CPIH
On avait un premier document, qui nous a
donné un peu d'espoir et cela avait été même repris par la
presse grand public. Après lecture, on pouvait dire que la baisse de la TVA
était dans le domaine du possible. Et puis deux semaines plus tard, le
rapport tombe. On évoque l'échéance de 2010 et le pire, c'est qu'on
n'est même pas sûrs d'être concernés. Nous sommes extrêmement
contrariés car Nicolas Sarkozy nous a affirmé durant sa campagne qu'il
nous obtiendrait la baisse de la TVA. Et maintenant qu'il est élu, rien n'avance,
rien n'est dans les cartons avec optimisme. Nos élus promettent mais ne tiennent
pas souvent leurs promesses. À l'impossible nul n'est tenu, certes. Aujourd'hui,
ce dossier de la TVA est dans le flou le plus artistique qui soit. Or, on le sait,
la seule solution pour que nos professionnels sortent du gouffre dans lequel ils
sont depuis plusieurs années, c'est la baisse de la TVA. Le candidat Nicolas
Sarkozy était sûr de lui. Il nous a même envoyé un courrier
dans lequel il se dit favorable à la subsidiarité. Et voici qu'après
quelques semaines de présidence, nous repartons dans la même configuration
qu'avec son prédécesseur, qui a botté en touche. Sur le terrain,
les professionnels sont déçus et s'inquiètent. La pression fiscale
s'accentue d'année en année. On nous avance même une TVA dite sociale
qui pourrait être de 1 % par an et qui ne serait probablement pas répercutée
sur les prix comme le souhaite le gouvernement, parce qu'on ne peut pas alourdir
les factures. On se trouve dans un imbroglio franco-européen où la
faute est toujours remise sur la tête de l'autre. Nous n'attendrons pas
2010, et je peux vous garantir que nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir
pour qu'il tienne ses promesses au cours de ce mandat.
Jacques
Jond, président de la Fagiht
C'est le serpent de mer. Cette comédie du taux réduit
de TVA pour les restaurateurs dure depuis plus de dix ans. Plusieurs pistes sont
envisagées par le commissaire européen, mais toujours rien de nouveau
ni de concret. Une des pistes mentionne la possibilité de donner plus de souplesse
aux États membres en leur donnant la possibilité d'avoir 2 taux réduits
de TVA : l'un qui serait proche de 0 et l'autre aux environs de 10 - 12 %. La Fagiht
se déclare satisfaite que la restauration puisse bénéficier d'un
taux réduit de 10 %, mais s'inquiète aussi pour le taux de TVA des hôteliers.
Qu'adviendra-t-il de leur taux réduit de 5,5 % ? En conclusion, je dirais que
nous n'avons pas plus de certitudes qu'hier sur ce dossier et qu'il n'y a pour la
Fagiht rien de nouveau.
Trois
questions à… Jean-François Veysset, candidat à la succession d'André Daguin
L'Hôtellerie Restauration
: Dans quel contexte s'inscrit votre candidature ? Comment résumez-vous cette démarche ? Souhaitez-vous réagir au texte rendu par la Commission
européenne ? * Jean-François Veysset a été vice-président de la FNIH de 1988 à 1997 et président du conseil de surveillance de l'Umih de 2002 à 2004. |
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L'Hôtellerie Restauration n° 3037 Hebdo 12 juillet 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE