du 11 janvier 2007 |
GESTION |
Face à la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée et à la diminution des marges, l'externalisation du nettoyage des chambres gagne du terrain dans l'industrie hôtelière. Mais, travailler avec une société de sous-traitance ne s'improvise pas. Suivez les étapes clefs.
Claire Cosson avec l'Association des gouvernantes générales de l'hôtellerie Paris
Comment travailler avec un prestataire de services dans les étages ?
Faire
ou faire faire ? Voilà une question brûlante souvent évoquée
par les gestionnaires et propriétaires d'hôtels. Notamment à propos
de l'entretien et du nettoyage des chambres. Ce d'autant plus fortement qu'en dépit
de la reprise économique observée au cours des dernières années,
les marges bénéficiaires de l'hôtellerie française ne se
redressent pas à la vitesse grand V. De fait, les performances récentes
du secteur demeurent en retrait comparées à celles de l'an 2000. Selon
l'étude annuelle de KPMG, le résultat brut d'exploitation (RBE) a stagné
en 2005 pour les 4 étoiles supérieur (24,3 %), tandis qu'il progressait
de 1,8 point pour les 4 étoiles standard (32 %) et de 1,9 point (33,3 %) pour
les 3 étoiles. Plus mal loties, les catégories économiques ont vu
leur RBE diminuer respectivement de 1 point pour les 2 étoiles (29,8 %) et
de 0,1 point pour les 0/1 étoile.
Face à cette difficulté évidente
de maintenir les marges, à la généralisation des nouvelles technologies,
à l'évolution des modes de consommation qui entraîne des fluctuations
sensibles des taux d'occupation, et à la mondialisation de l'économie,
les entreprises hôtelières doivent s'adapter à la réalité
économique des marchés. L'affaire n'est pas simple. Parce qu'il s'agit
de rendre les organisations plus flexibles. Autrement dit, transformer des charges
fixes (comme les frais de personnel) en charges variables.
Pour
parvenir à cet objectif, plusieurs opérateurs hôteliers - en particulier
les chaînes intégrées - optent pour la sous-traitance. Une solution
déjà très répandue dans le milieu des édifices commerciaux
et bureaux qui tend à gagner du terrain dans l'industrie hôtelière.
Normal. Elle offre des avantages 'économiques' indéniables. Mais, il y
a également des inconvénients.
AVANTAGES ET INCONVÉNIENTS DE LA
SOUS-TRAITANCE SELON L'AGGH PARIS
Avantages Inconvénients |
De la qualité du cahier
des charges dépend la qualité de la réponse de la société
extérieure
"Confier une activité
et son management à un prestataire extérieur, plutôt que de le
réaliser en interne" nécessite en effet des règles de fonctionnement
clairement établies. Règles dont dépend le succès de ce type
de partenariat ! Consciente de l'importance croissante de la sous-traitance dans
le secteur hôtelier, l'AGGH Paris a pris ce dossier à bras-le-corps.
Sous la houlette de Corinne Veyssière (gouvernante générale au Sheraton
Paris Airport) et de Christine Croisard (Sin & Estes, gouvernante régionale),
un groupe de réflexion a été constitué avec : Lynda Legros,
Breda Cliche, Corinne Dufour, Florence Lafond, Snezana Roiatti, France Rougeot,
Florence Buache et Carine Verdier. Après enquête, les responsables des
services étages chargés dudit dossier ont exposé le fruit de leurs
recherches à l'ensemble des membres de l'association.
Un travail riche d'enseignement
qui - loin de se vouloir exhaustif et de porter un jugement sur le bien- fondé
de l'externalisation - présente les grandes lignes à suivre pour travailler
en bonne entente avec une société de sous-traitance. Il est vrai que recourir
à un prestataire extérieur pour assurer l'entretien et le nettoyage
des chambres (ou d'autres parties de l'hôtel) ne s'improvise pas. Loin s'en
faut. Mieux vaut agir avec méthode pour
ne pas se louper. En commençant par établir un cahier des charges qui
définit le plus précisément possible la qualité de la prestation
attendue de la société de sous-traitance.
"Le cahier des charges est un élément-clé
- voir tableau en page 38 - pour travailler avec un prestataire de services extérieur.
Dans ce dernier, la gouvernante détermine ses véritables besoins en termes
de qualité et de périodicité des travaux exigés", souligne
Corinne Veyssière. Et de poursuivre : "Le cahier des charges répertorie
les zones à traiter et les fréquences de nettoyage. Il doit préciser
les procédures à respecter quant aux horaires de travail, aux modalités
de contrôle et de rendu des chambres, l'existence de contrôles contradictoires…
De la qualité de cet outil va dépendre la qualité de la réponse
du prestataire."
UNE ACTIVITÉ DE SOUS-TRAITANCE
EST LICITE LORSQUE LES CONDITIONS SUIVANTES SONT RÉUNIES
Exécution d'une tâche spécifiquement définie qui doit être
différente de l'activité générale de l'entreprise utilisatrice. |
Lancer un appel d'offres
Cette première étape
franchie - qui réclame un investissement temps important -, contactez 3 ou
4 entreprises spécialisées dans le nettoyage en hôtellerie afin
de lancer un appel d'offres. Pour pouvoir apprécier les propositions de chacune
des sociétés démarchées, organiser une visite du site est indispensable. Aussitôt réalisée, communiquez
aux intéressés le cahier des charges. "Il est capital d'adresser des
documents identiques aux prestataires de services et d'avoir une vision de la qualité
et du service client similaire pour ensuite pouvoir les mettre en concurrence",
insiste la gouvernante générale du Sheraton Paris Airport.
En amont, un compte d'exploitation intégrant
les frais liés au choix d'une équipe en interne (salaires, produits d'entretien
et petit matériel, nettoyage
et location d'uniformes, primes de
transport, visite médicale…) aura bien sûr été dressé. Celui-ci permettant de
chiffrer le coût à la chambre. Fortes de ce dernier, les propositions des
sociétés de sous-traitance ne seront que plus faciles à étudier. Sachez
cependant qu'une fois les devis des entreprises extérieures en votre possession,
la vigilance reste de rigueur. Savoir lire entre les lignes est toujours utile…
Établir
un contrat détaillé dans le respect de la loi
Savoir intégrer le personnel du
prestataire de services à celui de l'hôtel l'est aussi. "Pour entretenir de
bonnes relations avec la société de sous-traitance, il est indispensable de
l'intégrer à l'entreprise, de bien communiquer avec elle, jouer la transparence
et lui offrir les moyens d'effectuer convenablement les tâches pour lesquelles
elle a été sélectionnée", commente Corinne Veyssière. Cela signifie la mise
à disposition de locaux adéquats (vestiaires, réfectoire, bureaux…) pour son
encadrement ainsi que ses collaborateurs. Et pourquoi pas - selon l'envie des
chefs d'entreprise - la participation à des manifestations internes à votre
entreprise tels arbre de Noël, anniversaires, etc.
Une fois le choix de la
société extérieure arrêté, un contrat liant celle-ci avec l'hôtel et le site
d'exécution doit être rédigé. Il portera sur différents axes. À commencer par
les modalités d'exécution du prestataire (description du site, directives du
client, état des lieux contradictoire, respect du cahier des charges, plan de
prévention et de sécurité) et l'organisation de son intervention (exécution de
la prestation, tenue vestimentaire exigée, respect des normes de l'hôtel, suivi
de l'exploitation, la périodicité des contrôles de qualité, l'accès à la
cafétéria ou à un local pour prendre les repas…).
Ne négligez pas le volet portant sur les
fournitures et le matériel (produits fournis par la société de sous-traitance,
agrément des produits de nettoyage par le client…). À spécifier également : les
engagements de l'hôtelier quant à l'activité de l'hôtel et son fonctionnement
(planning des chambres, consignes, taux d'occupation prévisionnel…), la
description des fournitures qu'il met à disposition du prestataire (produits
d'accueil, linge…) et les procédures en cas de non-respect du contrat. Le
contrat stipulera en outre la durée de l'engagement, les assurances et
responsabilités, le cahier des charges, les clauses particulières
(responsabilités des dommages, disparition des objets, secret professionnel…)
ainsi que le tarif (établi sur une base forfaitaire correspondant aux
compétences, savoir faire, matériels, produits et moyen de mise en oeuvre
pour la réalisation de la
prestation) et les modes de règlement.
Sans oublier d'évoquer la problématique du
personnel et de son encadrement. "Seul le personnel d'encadrement du
prestataire de services est habilité à donner des ordres à ses collaborateurs",
souligne Corinne Veyssière. Attention de fait au délit de marchandage (article
L. 125-1 à L. 125-4 du Code du travail) et prêt de main-d'oeuvre illicite.
Sachez par ailleurs qu'en cas de résiliation du contrat et d'attribution à une
autre entreprise de nettoyage, les dispositions conventionnelles font obligation
à l'entreprise prenante d'assurer la continuité des contrats de travail de
l'intégralité du personnel en place (annexe 7). Autant d'éléments à ne pas
prendre à la légère, les risques encourus pouvant être sanctionnés pénalement.
État des lieux
Viendra ensuite le
moment de réaliser un état des lieux avec le prestataire de services. "C'est
un indicateur de la qualité et de l'état du site indispensable", note la
gouvernante générale du Sheraton Paris Airport. Puis suivra une réunion de
travail pour organiser la prise en main du site avec définition des zones de
stockage, mise à disposition de matériel, moyen de communication… Restera à
présenter la nouvelle équipe au dirigeant et personnel de l'hôtel, puis passer à
l'action ! n
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LE PLAN DE PRÉVENTION
Ce document (décret n° 92-158 du 20 février
1992) recense tous les risques encourus en matière d'hygiène et de
sécurité par le personnel en sous-traitance. |
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L'Hôtellerie Restauration n° 3011 Magazine 11 janvier 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE