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"Le traiteur ? Je pense que c’est ma vie !"

Restauration - mercredi 1 juillet 2009 12:16
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Paris (75) Jean-Pierre Biffi est entré dans le métier à 17 ans. Après être passé par André Daguin à Auch, le Bristol, le Crillon puis Maxim's traiteur et Potel & Chabot, il célèbre cette année ses vingt ans à la tête des cuisines du plus célèbre traiteur de Paris. Il revient dans un entretien avec L’Hôtellerie Restauration sur cette double décennie de passion.



L’Hôtellerie Restauration : Vous fêtez cette année vos vingt ans à la tête des cuisines de Potel & Chabot. Qu’en retenez-vous ?

Jean-Pierre Biffi : Une progression constante, à tous les niveaux. 

Vous avez commencé par la cuisine traditionnelle, pourquoi avoir choisit de devenir chef chez un traiteur ?

J’ai commencé chez Borel, sur les ponts autoroutes, où l’on recevait les grenouilles vivantes et les écrevisses, avant d’atterrir dans le secteur traiteur par hasard, pendant les années 1990, les grandes années du ‘sous-vide’. J’étais depuis huit ans au Crillon quand on m’a proposé une place chez Maxim’s traiteur. J’avais envie de passer à autre chose, c’était une opportunité. J’ai démarré là-bas et j’y suis resté deux ans avant de passer chez Potel & Chabot. Aujourd’hui, je pense que c’est ma vie. J’ai grandi, mais mes souvenirs de table restent liés à des tablées de 80 personnes, des tables de communion... J’ai retrouvé ces émotions par hasard dans le traiteur.

Quelle est la plus grande différence entre la cuisine traditionnelle et le traiteur ?

La plus grande différence avec la restauration est que, tous les jours, nous sommes habitués aux conditions variables et à restituer les produits dans des conditions difficiles. Nous travaillons beaucoup sur ces sujets. Une autre composante importante est l’étonnement. Je dis toujours - c’est la base - qu’il faut que ce soit chaud et bon, mais qu’en plus, dans notre métier, il y a une propension au spectacle. 

Comment devient-on chef du plus grand traiteur de Paris ?

Cela s’est fait petit à petit. Je suis arrivé comme chef de cuisine, puis on m’a confié la pâtisserie et ensuite la décoration, cela m’a permis de développer des systèmes de buffets liés. Potel & Chabot est une des plus grosses maisons de traiteur, mais nous ne faisons qu’un seul métier. C’est une chance, et nous avons cinq lieux en propre. Nous développons dans ces endroits une identité et nous essayons que chacun d’entre eux soit une véritable ‘maison’. 

Comment le métier a-t-il évolué depuis vos débuts ?

C’est énorme. Il y a vingt ans, lorsque nous préparions un cocktail, on ne choisissait ni la nappe, ni les fleurs, le maître d’hôtel amenait lui-même sa veste et l’on n’avait le choix qu’entre deux sortes de plateaux, en argent ou en inox. Maintenant, les systèmes de décor sont infinis, et il existe des centaines de sortes de nappages, de vestes, de services... La complexité est multipliée par mille. Aujourd’hui, les cuisiniers sont aussi des vendeurs et le commercial s’appuie sur toutes les forces de productions. Et il faut voir à quoi ressemble un devis ! On raconte une histoire, on propose différents décors, différentes options, c’est un gros travail devenu indispensable. On a évolué aussi dans le service : historiquement, le maître d’hôtel partait avec un plat et s’occupait de tout. Aujourd’hui, ils partent à plusieurs avec un cuisinier.

Une autre évolution majeure a consisté à amener le cuisinier en salle alors que, jusque-là, ce n’était pas le cas, en traiteur. À l’époque, le cuisinier que j’étais n’était pas satisfait par cet aspect-là, donc j’ai voulu apporter des changements et, maintenant, le cuisinier a toute sa place dans les réceptions. 

Qu’est ce qui vous incite à la création ?

Les comportements, que ce soit dans le business, la sociologie des clients, la manière de recevoir et d’être... Je les étudie depuis le début, parce que c’est essentiel à la création de concepts, à la manière de servir les plats et c’est cela qui aiguise la création, plus que le commerce. Aussi, chez Potel & Chabot, chaque année, nous travaillons sur une idée que nous appelons “le thème de l’année”. Nous lançons une réflexion globale pour trouver d’autres idées, des concepts nouveaux, et chercher de nouvelles pistes. Aujourd’hui, en nous poussant à faire des économies, la crise nous incite également à la création. Nous cherchons des solutions pour protéger le produit et maintenir la qualité, tout en proposant des budgets plus accessibles. Cela aboutit à de nouveaux concepts…

Quels ont été vos meilleurs moments ?

Les meilleurs moments, au-delà des grosses affaires, ce sont les cuisiniers qui font l’équipe et qui étaient pour la plupart déjà là quand je suis arrivé. On a progressé ensemble, chacun a pris une place importante. Aujourd’hui, Potel & Chabot, c’est plus une fédération qu’une dictature : 100 personnes en cuisine, 50 en pâtisserie et 15 en atelier décor. Avoir une cuisine jeune et dynamique avec une équipe d’une moyenne d’âge de 50 ans constitue une grande aventure. Je suis heureux aussi que des jeunes nous aient rejoints et soient restés. Je pense que la richesse de la maison est liée à cette équipe qui dure.

Y-a-t-il eu une réception qui vous a plus marqué que d’autres ?

Oui, la première réception, où l’on a tranché du train de côtes de bœuf en salle pour 2 500 couverts ! Le début du tranchage en salle… C’était quelque chose !

Y a-t-il des contraintes à travailler pour une maison plus que centenaire ?

Il y a celles auxquelles j’adhère. Il faut respecter et se servir de cette histoire. Mais avoir une histoire ne veut pas dire que l’on n’a pas droit à la modernité. Au contraire, le fait de faire vivre cette histoire peut dire que nous avons droit à des grains de folie. Par exemple, sur notre catalogue, nous proposons aussi bien de la gastronomie classique que de la cuisine moléculaire.

Combien de réceptions organisez-vous par an ?

Nous organisons entre 20 et 30 réceptions par jour. 

Quelles seront les tendances de demain en matière de traiteur ? 

Les tendances de demain, c’est le retour à la simplicité, au vrai : moins d’esbroufe, moins de sophistication, plus d’efficacité, aller à l’essentiel. Si l’on ne suit pas cette tendance, on va se tromper. 

Si vous deviez résumer vos 20 années chez Potel & Chabot en un mot ?

Exaltant.

Propos recueillis par Julie Gerbet

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