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Michel Portos ou le culte de l’éphémère

Restauration - mercredi 2 mars 2011 12:17
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Bouliac (33) Bouillonnant, toujours en alerte, passionné, le chef du Saint-James à Bouliac (2 étoiles Michelin) publie son premier livre. Un ouvrage qui retrace son parcours, donne des clefs sur sa cuisine à travers son témoignage et ses recettes. Quelques questions pour mieux faire connaissance.



S’il ne fallait retenir qu’un plat parmi vos créations ?
C’est une question compliquée pour moi qui ne recommence jamais le même plat. J’aime le côté éphémère de la cuisine. L’histoire ne doit pas se répéter à l’infini. J’avoue que je me lasse vite. Si tant est que cela se justifie de comparer les artistes et les cuisiniers, on ne demande pas à un peintre de refaire le même tableau.
Il y a aussi le piège du plat fétiche, celui que l’on n’ose plus enlever de la carte. Au fil des années, on peut aussi se retrouver avec une carte composée entièrement de plats fétiches. Je ne veux pas tomber dans l’immobilisme. Ceci dit, je peux entendre et comprendre la demande des clients de retrouver un plat qu’ils ont aimé, mais je ne le fais pas. M. Borgel avait été étonné de ne pas retrouver au Saint-James ce qu’il avait dégusté dans mon restaurant à Perpignan. A part la salade tiède d’encornet, artichaut barigoule, copeau de Serrano, vinaigrette balsamique qu’il m’arrive de préparer pour un petit groupe. Mais je ne l’ai jamais mise à la carte. Je fais et je défais. 

Le plat que vous auriez aimé inventer ?
La Cristalline de pommes de Michel Trama. Une déclinaison à base de pommes véritablement magique. Je l’ai découverte chez lui en 1986. C’était révolutionnaire. Ce plat a bien été repris depuis par beaucoup de cuisiniers. 

Le repas le plus éblouissant ?
Sans hésitation chez Pierre Gagnaire. Je venais d’arriver chez Pierre Troisgros et le repas de fin d’année du personnel a eu lieu à Saint-Etienne. C’était en 1994. Michel Nave était déjà là. J’en suis sorti sous le choc, bouleversé. J’aime aussi l’homme et sa personnalité hors norme. C’est le chef chez qui je suis allé manger le plus souvent. A chaque fois, il y a au moins un plat qui me procure une émotion inoubliable. 

A l’étranger ?
La cuisine de Paolo Lopriore (restaurant Il Canto, Hôtel Certosa di Maggiano à Sienne, Italie). Je l’ai connu quand il était mon chef de partie chez Troisgros. Il a travaillé avec Gualtiero Marchesi, Ghislaine Arabian, Eyvind Hellstrom à Oslo. Il a de l’or dans les doigts et un imaginaire très fort. 

Ce qui vous agace le plus ?
Les imitateurs. Quand la cuisine est une pale copie, quand cela ressemble étrangement à un plat dont on reconnaît l’inspiration, souvent c’est pathétique. Ça ne me dérange pas que l’on rate un plat quand c’est une cuisine personnelle.

Le plus beau compliment ?
Hier, un client m’a dit : « Vous venez de me réconcilier avec le risotto. Cela faisait des années que je préférais ne plus en manger après des expériences désastreuses ». Ou quand par exemple, un client m’avoue qu’il vient de découvrir qu’un aliment qu’il détestait pouvait être bon. C’est vraiment touchant.

La critique qui vous a le plus marquée ?
De temps en temps, on reçoit des lettres de personnes qui soulignent un manquement dans le service ou un plat qui n’a pas plu, un détail qui dérange. Je réponds à toutes les lettres. Cela nous fait avancer et nous remettre en question. Mais, par exemple, je viens de recevoir une lettre dans laquelle la cliente estime que ma cuisine est grasse et écoeurante. Lorsque vous recevez ce type de courrier, ça fait hyper mal. Honnêtement, c’est l’incompréhension la plus totale. Comment quelqu’un peut en arriver là ? 

Le secret de la réussite ?
Travail et passion.

Votre plus grand rêve ?
Faire un jour le tour du monde, partir un an découvrir la planète, ses habitants, ses cuisines. Ou cuisiner sur la lune.

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Michel Portos, le Saint-James en 65 recettes

« Souvent les clients nous demandent comment on est arrivé à faire ce plat. Ce livre répond à cette question. Il me permet de retracer mon parcours pour expliquer ma cuisine. Cela commence par les recettes de ma mère, mon apprentissage, les chefs que j’ai rencontrés, mes voyages, mes inspirations », explique Michel Portos. Comme une Tête de veau ravigote, grosse sole petits pois morilles, Tropézienne, kumquat confit… un voyage au cœur de la cuisine du Saint-James à Bouliac avec de superbes photos signées Hervé Lefebvre.

Editions Flammarion.
Prix : 40 euros.

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Propos recueillis par Nadine Lemoine

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