“J’ai quelques années de bouteille !” David Ridgway a le sens de l’humour… anglais. Logique, puisque le chef-sommelier de La Tour d’argent (Paris, Ve) est d’origine britannique. Marié à une Française, il a posé ses bagages à Paris en 1981. Là, ce diplômé du Wine & Spirit Education Trust, à Londres, postule chez Taillevent et à La Tour d’argent. C’est l’institution du quai de la Tournelle qui l’embauche. Depuis, il n’en est jamais parti. Résultat : à l’occasion de ses 40 ans de maison, David Ridgway vient de recevoir la médaille du Sénat des mains de Catherine Dumas, sénatrice de Paris. Une récompense dont le chef-sommelier est fier, mais, confie-t-il, “je reste discret, je m’efface derrière une maison comme La Tour d’argent, qui a plus de quatre siècles”. Mémoire du célèbre restaurant, David Ridgway a vu passer onze chefs différents derrière les fourneaux. “J’en ai vu des changements. Mais, même si on évolue, on essaie de suivre un fil conducteur propre à cet établissement. Certains clients fidèles veulent retrouver les repères d’hier.” Alors il jongle entre passé et présent. Il s’adapte aussi, car la clientèle est éclectique, à la fois jeune et plus âgée, parisienne et internationale.
“On achète un vin parce qu’il est bon, pas parce qu’il est bio”
“Quand je suis arrivé, il n’y avait pas de côtes-du-rhône à la carte des vins. Désormais, il y en a une quinzaine de pages et, ça, c’est juste pour le rouge !” David Ridgway parle de 15 000 références dans la cave de La Tour d’argent : “Ce sont comme mes enfants. Je les aime tous !” Mais il regrette que les clients soient moins curieux qu’avant. “Ils veulent les bouteilles qu’ils ont vu sur les réseaux sociaux”, constate le chef-sommelier doté d’un compte Twitter qu’il utilise peu. “Nous avons de moins en moins de discussions à propos des vins avec les clients. Depuis une dizaine d’années, c’est le vin au verre qui prime. Les clients aiment goûter plusieurs vins différents au cours d’un repas, avec une préférence pour les micro-cuvées, les raretés qui vont susciter la curiosité une fois postées sur les réseaux sociaux. On n’est plus dans le partage d’une bouteille, avec l’étiquette et le nom du vigneron qui reste sur la table, comme un invité en plus. Pourtant, c’est intéressant un seul vin durant un repas : on le découvre au premier verre, on l’apprécie au deuxième, au troisième…”
David Ridgway insiste aussi sur l’art de prendre le temps : “On n’aime plus attendre entre deux plats. Alors, certes, il faut du rythme à table, mais ce n’est pas non plus une course à l’échalote ! On peut aller vite au début, mais c’est bien de ralentir vers la fin, par exemple avec un digestif.” Quant aux vins bio, le chef-sommelier s’y intéresse depuis les années 1980, avec un seul credo : “On achète un vin avant tout parce qu’il est bon, pas parce qu’il est bio.” Enfin, à propos des boissons sans alcool, il évoque les jus de fruits frais, thés et infusions, mais aussi les eaux. “Dans les années 1990, on avait des eaux du monde entier. C’est fini, aujourd’hui. On propose des eaux de proximité : c’est-à-dire minérales ou filtrée, gratuite et servie en carafe.” Changement d’époque, mais pas de métier pour le passionné : “Cette médaille du Sénat rappelle que la sommellerie fait partie de la gastronomie française.”
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Publié par Anne EVEILLARD