du 27 mars 2003 |
RESTAURATION |
Sans pitié, le GaultMillau a rétrogradé de 16 à 12 le restaurant l'Epicerie du Méridien de Bruxelles, quand le Béarnais David Martin a cédé la place au Martiniquais Marcel Ravin. Et tout est à refaire.
Marcel Ravin, au centre, avec sa brigade du jour à Bruxelles.
On parle aussi des
guides à Bruxelles. Que l'Epicerie, le restaurant du Méridien, n'ait jamais trouvé
grâce aux yeux du Guide Rouge quand le guide rival le portait très haut, Sergio
Mangini, directeur de l'hôtel, ne commente pas. Mais que le Sheraton et le Hilton aient
trois tours contre deux à son établissement, là, "je ne comprends pas",
lâche-t-il, voix de velours démentie par l'il noir et les dents serrées. Pour
Marcel Ravin, la promotion de second au Méridien Part Dieu à exécutif chef à Bruxelles
commence par une douche bien fraîche. Le GaultMillau le remet à la case départ
avant d'avoir goûté, et les critiques locaux, dépités peut-être du départ de David
Martin chez le triplé étoilé Bruneau, lui font un peu la tête. Quand il arrive en
septembre 2002, Sergio Mangini, prudent, le regarde faire avant de le présenter à la
presse. Il ne s'est pas encore fait un nom en Europe, et la Martinique, sa terre
d'origine, est loin du Périgord ou de la Bourgogne. Il prend le bateau en main, négocie
quelques virages avec son directeur, et début mars, ce dernier le présente aux
redoutables gastronomes professionnels bruxellois.
Armé de la première carte signée de sa main, il a passé l'épreuve avec les honneurs.
Sa connaissance de la bonne cuisine française d'aujourd'hui et son talent de créateur ne
sont plus contestés. Le gars du Lamentin a aussi appris les produits du pays, Sole de
Zeebrugge ou Coucou de Malines. Le débat s'est plutôt instauré sur l'ampleur des
goûts. Certains lui ont reproché de ne pas suffisamment se 'lâcher', s'attendant à
ressentir le parfum puissant des Antilles. Il faudra trouver un équilibre plus dynamique
entre la présence des saveurs, et l'exigence d'une cuisine supportable en milieu
international. Une cuisine internationale que les Belges détestent sans retenue. La
crainte de la clientèle n'est pas la seule raison. "Ici, l'originalité est
possible, mais les produits (N.D.L.R. : comparés par exemple aux poissons plus
rustiques et fermes des mers chaudes) sont vite absorbés par les épices",
explique Marcel Ravin. "Il faut donc y aller doucement, faire sentir mes origines,
mais pas en pays conquis." Il y va doucement, mais avec des raccourcis en
diagonale géographique, comme ce Carré de porcelet du Pays Basque frotté au piment
d'Espelette, accompagné de chicons au jambon et tourtelette en panoufles, jus à la
bière. Le dessert est très belge, avec un Fromage blanc au sirop de Liège, babelutte et
crème glacée au spéculoos, ou il franchit carrément la ligne, comme ce Baba au rhum au
Trois Rivières et Banane flambée, au ti punch parfumé à la vanille. "Cela a
été très dur pendant deux mois", reconnaît Marcel, désormais acclimaté.
Reste à monter la pente. Jusqu'où ? L'Epicerie ne permet guère la course aux étoiles.
Le ticket moyen doit plafonner autour de 70 e, marché oblige, avec un menu découverte à
49 e, qui change toutes les deux semaines. L'Epicerie reste aussi un restaurant d'hôtel,
qui accueille à 80 % une clientèle extérieure d'affaires à midi, et à l'inverse, les
clients de l'hôtel le soir. Mais l'étape est attrayante, le chef ne fait pas la fine
bouche. zzz36v
A. Simoneau
Le parcours
Originaire du Diamant en Martinique, il fait l'EH de Fort-de-France suivi d'un
apprentissage sur place, et débarque comme commis au Château d'Isembourg en Alsace,
Relais & Châteaux et 1 macaron, "sans avoir jamais vu un artichaut ou une
asperge", confie-t-il. Il est d'abord accablé de son ignorance, mais le chef
Alain Finkbeiner lui fait confiance et le forme. |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2814 Hebdo 27 Mars 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE