du 5 juin 2003 |
ÉDITO |
Un peu lassante, la
lancinante complainte répandue depuis quelque temps sur la restauration gastronomique.
Selon certains, soi-disant bien informés, rien ne va plus dans les cuisines des chefs
dont le devenir économique serait plus qu'incertain. Au-delà de la malsaine propension
à colporter les bruits les plus incontrôlables et les plus nuisibles, il faut voir dans
ce catastrophisme de plumitifs en mal de notoriété un bon moyen de s'assurer une
audience sur le dos de la profession. Une fois de plus, hélas...
Mais il serait erroné et dangereux d'entrer dans le jeu de ces augures à qui
l'Antiquité réservait un sort moins clément qu'aujourd'hui. Non, la haute restauration
n'est pas en crise malgré une conjoncture médiocre à laquelle personne n'échappe. Elle
doit bien évidemment s'adapter aux nouvelles conditions d'exigence d'une clientèle de
plus en plus insaisissable, elle doit s'assurer de la pérennité de l'entreprise,
moderniser sa gestion, remettre en cause ses relations sociales. La tâche est immense et
seuls les authentiques professionnels parviennent à faire face aux défis de l'époque.
Ce n'est pas une raison pour proclamer avec une délectation non dénuée d'intentions pas
toujours claires la fin de la gastronomie, la disparition prochaine des grandes tables et
des maisons prestigieuses. Pour un Marc Veyrat qui se déclare prêt à tout quitter pour
s'installer à Paris - c'est son droit, d'autres l'ont déjà fait, et ont réussi dans un
passé récent - combien de chefs étoilés pour qui les affaires vont plutôt bien, en
province ou à l'étranger ? Les plus grands et les plus entreprenants ont depuis
longtemps tracé la voie du développement, que l'on songe à Paul Bocuse, sa brillante
réussite en Floride et plus récemment ses 4 points cardinaux lyonnais, à Michel
Guérard et son 'empire' de charme d'Eugénie-les-Bains, à Georges Blanc et ses
entreprises bressanes, ou Alain Ducasse et sa multinationale de la table, de New York à
Monaco sans oublier Paris et l'île Maurice. Et puis tous les autres qui, dans la
discrétion, réussissent envers et contre tout à conduire des affaires remarquables, à
Montpellier, à Laguiole, à Untermuhlthal ou... à Paris.
Inutile de poursuivre une énumération qui serait longue, mais il est faux de se
répandre en propos volontairement défaitistes, alors que la France offre encore de très
belles opportunités aux cuisiniers talentueux et inspirés. Les jeunes chefs aux dents
longues ont de grandes perspectives s'ils savent affirmer leur capacité de gestionnaire
en gardant leur âme. L'âme, c'est ce qui manque aux oiseaux de mauvais présage qui
occupent trop souvent les colonnes des journaux. zzz80
L. H. zzz80
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L'Hôtellerie Restauration n° 2824 Hebdo 5 Juin 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE