du 16 octobre 2003 |
VIE PROFESSIONNELLE |
< CONGRÈS DE LA FÉDÉRATION NATIONALE DES PLAGES-RESTAURANTS
Les professionnels réunis la semaine dernière à Saint-Tropez s'estiment lésés par le projet de loi organisant l'exploitation des plages, qui devrait être adopté en fin d'année. Si ce texte marque une avancée dans le statut de plagiste, plusieurs dispositions risquent d'avoir des répercussions négatives sur le secteur.
Une partie
du bureau de la Fédération des plages-restauration, emmenée par Bernard Opinel
(deuxième en partant de la gauche).
On dénombre quelque 1 500 établissements de plage en France, dont 640 sur le littoral méditerranéen. Ce dernier représente à lui seul 3 600 emplois hors saison et 6 500 en saison pour un chiffre d'affaires annuel moyen de 243 000 000 e HT. Les 7 et 8 octobre derniers, plus d'une centaine de plagistes participaient au 3e congrès de la Fédération nationale des plages-restaurants (FNPR), qui se déroulait à Saint-Tropez, et dont le thème était 'Quel avenir pour le tourisme balnéaire en France ?'. Question complexe, au moment où l'Etat est en passe de faire adopter une loi qui, selon les professionnels, risque fort de mettre en péril une partie des exploitations. Plusieurs dispositions inquiètent sérieusement les plagistes. D'abord, la procédure d'attribution des concessions par appel d'offres systématique, qui met un terme définitif aux ventes effectuées de gré à gré jusqu'en 1999 et dans laquelle intervenait la notion de fonds de commerce. Notion tolérée en territoire maritime durant plusieurs décennies, devenue non conforme à partir de 2000, dans le cadre de la loi sur le littoral (votée quant à elle en 1986). En d'autres termes, un exploitant qui a acheté un fonds devant notaire (et souvent très cher dans le Midi) et qui a régulièrement investi dans l'outil, pourra tout perdre du jour au lendemain, sans la moindre chance d'indemnisation. Même si le décret d'application prévoit une clause de "priorité au sortant"... le moins que l'Etat pouvait faire !
Les objectifs de la FNRP
= Assurer la pérennité de la profession en obtenant une durée de concession suffisamment longue pour amortir le matériel et réaliser une exploitation conforme aux intérêts et aux attentes du public. = Elaborer un cahier des charges en concertation avec les pouvoirs publics et les élus pour la reconnaissance du fonds de commerce (et du statut d'exploitant). = Obtenir une durée d'exploitation qui tient compte des spécificités locales et aux politiques économiques et touristiques des collectivités. |
Plage vide
Il y a ensuite le projet de loi qui fixe la durée maximale annuelle d'exploitation à 6
mois, quelle que soit la région. Une mesure qui ne prend "absolument pas en
compte les spécificités climatiques et touristiques locales", martèlent les
plagistes, et se révèle, en outre, en contradiction avec les efforts entrepris par les
collectivités en matière d'accueil et soutenus par le gouvernement. Exemple d'actualité
auquel ont été confrontés les congressistes : des responsables de l'opération
Week-ends Bonheurs (initiée par l'Afit, le CDT du Var et l'office de tourisme du golfe)
ont présenté un important programme d'animation mis en place d'octobre 2003 à mars 2004
dans le golfe de Saint-Tropez, dans lequel les plagistes sont des acteurs à part
entière. Sauf que, si la loi passe telle quelle, les touristes risqueront fort de trouver
porte clause dans les restaurants de bord de mer. Si porte existe encore. Car, dans sa
grande générosité, le texte prévoit l'obligation de démontage des aménagements hors
saison. Bref, les plagistes devront faire plage vide. Si la protection de l'environnement
et l'application des normes européennes motivent les rédacteurs du projet, maître
Marie-Christine Bonnefoi, spécialiste de droit communautaire, a soulevé devant les
congressistes plusieurs interrogations de taille. Le dispositif établi par le ministère
chargé de la mer et du littoral est-il en conformité avec les directives européennes
portant sur le respect de la propriété, la priorité à l'initiative locale, ou encore
la stabilisation de l'emploi ? Carole Balligand, qui veille avec son oncle à la destinée
de l'Aqua Club (l'établissement a été créé par sa famille voici 41 ans), sur la plage
de Pampelonne (commune de Ramatuelle), témoigne d'une hausse de fréquentation le
week-end en hiver de 5 %. "La région et la municipalité font tout pour attirer
les touristes en hiver et ça fonctionne. Nous faisons partie des établissements ouverts
hors saison, et nous avons toujours tout fait pour améliorer le service à la clientèle,
mais aussi fidéliser notre personnel, en salle comme en cuisine. Nous devons avoir un
personnel formé non seulement au métier de la restauration, mais aussi titulaire d'un
brevet de secourisme. Comment va-t-on continuer d'assurer la qualité de nos prestations
si nous en sommes réduits à n'ouvrir que 6 mois ? Il est certain que le personnel
qualifié ne va pas suivre." Pour Bernard Opinel, président de la FNPR, le
dispositif va en effet accentuer la précarité du secteur.
L'Anel se désolidarise du texte
Ce qui va à l'encontre du but réclamé par les professionnels, qui souhaitent depuis
plusieurs années la reconnaissance de leur statut et de leur métier. Gil Bernardi, maire
du Lavandou, s'est d'ailleurs "désolidarisé" officiellement du projet
de loi tel qu'il est rédigé au nom de l'Association nationale des maires de France
(Anel) dont il est vice-président. "Si nous sommes pour une défense stricte du
domaine maritime, nous avions demandé une adaptation des textes en fonction de la
saisonnalité. (...) Nous avons l'impression qu'on s'est servi de nous", a-t-il
déclaré.
D'autres dispositions inquiètent sérieusement la profession, comme la durée maximale
des concessions fixée à 12 ans ou le total autorisé des surfaces concédées fixé à
20 % du littoral. "C'est un calcul impossible, qui va créer des problèmes là
où il n'y en a pas, regrette Bernard Opinel. 20 % de quoi ? Où commence et où
s'arrête la partie calculée du littoral, sachant qu'il existe de nombreux cas de
figure..." Bernard Opinel qui en appelle au bon sens et qui souhaite qu'une "véritable
concertation" soit mise en place avec tous les acteurs concernés, et puisse
aboutir à un "cadre législatif conforme aux attentes locales". A
suivre.
S. Soubes zzz22v
Sur le vif Jean-Michel Alliou, président de la fédération du Var, et propriétaire de l'Hélios Plage, Le Lavandou : "Nous sommes là pour nous opposer à ce décret très pénalisant pour notre secteur. Certains d'entre nous sont ouverts à l'année, et la loi va les obliger à fermer ! Est-ce ça la liberté du commerce ? Il est impératif que ce texte soit modifié et adouci. Nous avons une légitimité, nous apportons un service. Nos exploitations ne doivent pas dépendre d'un bon vouloir municipal ou préfectoral. |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2843 Hebdo 16 octobre 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE