du 15 juillet 2004 |
VIE PROFESSIONNELLE |
Optimisme de rigueur
LHôtellerie : Que pensez-vous du relevé de décisions signé par trois
syndicats salariés (CFTC, CGC et FO) avec lUmih et le GNC ?
Beaucoup de bien. Grâce à linitiative du Premier
ministre Jean-Pierre Raffarin, le 10 février 2004 à lAssemblée nationale,
remarquablement mise en musique par notre ministre dEtat, Nicolas Sarkozy, avec une
rare vision politique, ce ballon doxygène va faire redémarrer la profession.
LHôtellerie : Dans le détail, comment analysez-vous la
situation ?
André Daguin, président de lUmih, a
remarquablement mené la négociation : alignement du Smic sur le Smic de droit commun
soit 11 % daugmentation, une 6e semaine de congés payés, 2 jours fériés
supplémentaires. Une majoration de la couverture de prévoyance de 33 %. Une image
nouvelle, dynamique de la profession, qui va non seulement attirer les jeunes (en sortant
de limage de paupérisme), mais aussi les stabiliser et les promouvoir
professionnellement et socialement.
LHôtellerie : Cependant, le Synhorcat (2e syndicat patronal),
la CPIH (les indépendants) et la Fagiht (lhôtellerie saisonnière) sont
opposés
Cest la bataille des Anciens et des Modernes, le
combat des statiques et des dynamiques. Dans une logique statique, que je qualifierais de
malthusienne, ces trois syndicats ont raison. Dans une logique dynamique, ces trois mêmes
syndicats se trompent.
LHôtellerie : Quelle portée voyez-vous à un accord incluant
les cafetiers, les hôteliers et les restaurateurs ?
Clairvoyance dAndré Daguin, remarquables synthèses
de Jacques Bellin pour lhôtellerie, pragmatisme de Philippe Villalon, collaboration
sans faille du Club TVA JB
Grâce à la baisse de la prime de 120 e à 114,40 e pour
les restaurateurs, les hôteliers et les cafetiers ont pu monter de 30 e à 57 e et
rétablir ainsi un équilibre indispensable. Cest bien joué.
LHôtellerie : Etes-vous satisfait des 39 heures ?
La pérennisation des 39 heures pour la profession est une
victoire lourde de conséquences positives pour lemploi. Ce nest pas la
moindre des victoires des négociateurs que davoir échangé la hausse du Smic de 11
% pour laligner sur le Smic de droit commun contre labandon des 35 heures.
Cest un grand succès de Nicolas Sarkozy et dAndré Daguin, fruit de quatre
années de batailles opiniâtres. En outre, deux clarifications ont été obtenues : la
durée journalière de 12 heures pour les réceptionnistes et les veilleurs de nuit, et la
majoration des heures supplémentaires à 15 % de la 40e à la 44e heure. On revient
à cette notion simple du travail, les employés sont prêts à travailler plus pour
gagner plus.
LHôtellerie : Certains présidents de syndicats reprochent
que lallégement des charges va couvrir la moitié du coût, le reste sera à la
charge du restaurateur ?
Pour les statiques et les anciens, cest vrai. Pour les
dynamiques et les modernes, cest faux. Cest oublier comment est fait un compte dexploitation de
restaurant :
80 % de frais fixes ;
Coût de la formation énorme, de 4 à 6 % des ventes.
Stabiliser la main-duvre entraîne une meilleure qualité des plats, un
accueil personnalisé, une rapidité et une efficacité du service, la chaleur de
lau-revoir.
La reprise économique en cours va entraîner une hausse de 5 à 10 % des ventes pour ceux
qui fabriquent bien et servent bien.
Si vous avez 45 % de coût de main-doeuvre, la meilleure façon de faire baisser ce
pourcentage à 39 % est daugmenter les ventes de 20 %. Or, la reprise est là, avec
2,3 % de croissance du PIB en 2004 contre 1,7 % budgété.
En 1963-1964, jai triplé les budgets de formation du personnel dans une politique
de tous les salaires supérieurs au Smic de lépoque. Conséquence : baisse de
la rotation du personnel de 150 % annuels à 80 % annuels.
Un employé qui quitte son entreprise après 6 mois coûte, lexpérience aidant, 6
semaines à son employeur, soit 23 %.
Si vous réduisez votre rotation actuelle de personnel de moitié, cela donne largement de
quoi payer 5,2 % de suppression du Smic hôtelier en plus de 5,8 % de hausse du Smic de
droit commun au 1er juillet 2004, soit 11 % en tout.
LHôtellerie : Mais dans tout cela, y aura-t-il création
demplois ?
Oui, création de 16 000 emplois dans les 18 mois à venir,
date de lobtention de la TVA à 5,5 % (hors alcools). Le Club TVA JB a obtenu
lengagement écrit de 28 chaînes dhôtels et de restaurants pour un peu plus
de 8 000 entreprises. Les lettres
dengagement individuel ont été transmises à Nicolas Sarkozy par le Club TVA JB.
Les chaînes représentent 33 % du marché, les indépendants 67 %. Il nest pas
interdit de penser que les indépendants, qui pèsent le double, créeront autant
demplois que les chaînes, soit 8 000 emplois. Soit 8 000 créations demplois
pour les chaînes et 8 000 créations demplois pour les indépendants, ce qui donne
en tout 16 000 créations demplois entre le 1er juillet 2004 et le 31 décembre
2005.
LHôtellerie : La baisse de la TVA de 19,6 % à 5,5 % (hors
alcools), cest pour quand ?
Je remercie Nicolas Sarkozy davoir rompu le cercle
vicieux, lui qui a promis solennellement, lors de la séance du mardi 18 mai que le Club
TVA JB avait organisée au profit des syndicats de restaurateurs et dhôteliers, de
relancer la baisse de TVA à 5,5 % à lEcofin de septembre 2004 à Bruxelles.
LHôtellerie : Le Club TVA sétait engagé à une
trilogie : 1/3 baisse de prix, 1/3 hausse des salaires et formation, 1/3 investissements
en conséquence de la baisse de TVA de 19,6 % à 5,5 %
Cest lenclenchement du cercle vertueux : il est
maintenu. Jai remis au Premier ministre un engagement individuel et écrit de 10
chaînes le 10 octobre 2003. Je compte remettre à Nicolas Sarkozy un engagement de 30
chaînes dhôtels et de restaurants avant la fin septembre 2004, ce qui portera à
40 lesdits engagements. Le Club TVA JB est aujourdhui fort de 43 chaînes
françaises qui le financent, et de 10 chaînes allemandes.
LHôtellerie : Comment cela va-t-il se passer ?
1/3 de lengagement de main doeuvre et
au-delà est couvert par la garantie daugmenter le Smic de 11 % pour ceux payés
aujourdhui au Smic hôtelier.
1/3 concerne la baisse des prix. Une notion simple déconomie montre que lon
ne crée de lactivité supplémentaire que si lon baisse les prix. La baisse
de la TVA de 19,6 % à 5,5 % (hors alcools) correspondra à une baisse moyenne de
lordre de 10,3 points. La baisse de prix minimale devra donc être de 10,3 points
divisé par 3, soit environ 3,5 %.
On assistera à 4 comportements : les raisonnables baisseront les prix de 3,5 %, les
dynamiques les baisseront de 5 %, les conquistadors les baisseront de 10 %, et les
inconscients se mettront la différence de TVA dans la poche.
Suivant le mémorandum transmis à Bruxelles le 22 janvier 2003 par le gouvernement
français et auquel avaient participé la plupart des syndicats
dhôteliers-restaurateurs, les raisonnables ayant baissé leurs prix de
3,5 % couplés à la hausse des salaires et de la formation, et à 3,5 %
dinvestissements, verront leurs ventes monter denviron 10,3 %. Les dynamiques,
par les effets multiplicateurs bien connus en économie, verront une hausse de leurs
ventes de lordre de 15 %. Les conquistadors verront leurs ventes monter de 20 à 25
%. Les inconscients verront leurs ventes baisser de 5 à 10 %. Ils prendront des risques
invraisemblables en pensant nen prendre aucun. Le marché sera impitoyable.
Rappelons quaux Etats-Unis, 1 repas sur 4 est pris en
dehors du foyer, contre 1 sur 7 en France. Raison : le prix. La capacité de croissance
française est donc de 7/4, soit 75 %.
En termes demplois, il sera créé environ 24 000 emplois en 2006-2007 contre 16 000
emplois en 2004-2005, soit un total de 40 000 emplois entre le 1er juillet 2004 et le 31
décembre 2007. Et ce nest quun début : en 2014, la profession aura créé
300 000 emplois pour la période allant du 1er juillet 2004 au 31 décembre 2014.
LHôtellerie : Tout cela paraît incroyable
Est-ce que
vous ne rêvez pas ?
Permettez-moi de vous rappeler une expérience vécue.
Lorsque jai acheté les 20 cafés Biarden en 1963, jen ai vendu 10 pour
refaire les 10 autres à neuf. Décision : baisse de prix de 30 %. Conséquences : hausse
des ventes de 500 %. Les 3 clients par siège et par jour sont devenus sous la marque
Wimpy 16 à 18 clients par siège et par jour en semaine, et 27 à 28 clients par siège
et par jour les vendredis et samedis. La compagnie des restaurants Jacques Borel passait
de 335 employés à 1 820 employés en 4 ans. Le profit net après impôts sur capital
investi se hissait à 31 %. Le fast-food était né. Il représente aujourdhui 15 %
des ventes en France. Le tout appuyé sur un énorme effort du Ticket Restaurant, dont je
suis le créateur en Europe continentale.
Rappelons que le Ticket Restaurant et ses 3 concurrents émettent en France 2 500 000
tickets par jour et représentent 10,5 % de toutes les ventes réalisées en France.
LHôtellerie : Comment faire baisser la TVA, qui reste le
combat fondamental ?
Comme indiqué ci-dessus, Nicolas Sarkozy mettra toute la
pression voulue à lEcofin de septembre 2004 pour relancer la machine. Commission de
Bruxelles : le Club TVA JB a établi des contacts solides depuis 40 mois. André Daguin et
moi visiterons ces contacts régulièrement à partir de septembre 2004. Je parcours
lEurope des 25 en permanence pour convaincre les 25 ministres et leurs
collaborateurs. Coût : 60 000 e par mois financés par les chaînes françaises et
allemandes.
Mise à jour de létude économique et du modèle informatique crée par le Club TVA
JB au printemps 2001. Jai demandé lassistance de la direction de la
prévision du ministère de lEconomie et des Finances. Rappelons que la précédente
étude du Club TVA JB était tombée à 30 millions deuros près (sur 3 milliards
deuros) avec celle de la direction de la prévision.
Je remercie Jacques Chirac davoir négocié positivement le 18 février 2004 avec le
chancelier Gerhard Schröder le vote positif de lAllemagne à Ecofin en faveur de la
baisse de la TVA en France. Rappelons que le dossier pour Gerhard Schröder avait été
préparé par le Mehrwertsteuer Club JB, discuté et mis au point avec la Dehoga
(Deutscher Hotel und Gaststättenverband), qui lavait présenté au ministre
fédéral des Finances, Hans Eichel, le 25 juillet 2003, qui la ensuite discuté
avec le Chancelier.
Dehoga sest engagé en contrepartie à ne pas venir importuner le ministre des
Finances jusquen décembre 2006, le temps de juger des résultats de
lexpérience française de la TVA. Le Club TVA JB a obtenu un engagement écrit de
la Dehoga à ce sujet et la remis à Jean-Pierre Raffarin le 5 décembre 2003. zzz66f
Vous réagissez Et le client ? Il faut lutter contre les
fraudeurs Cest bien que ça change La mort de la restauration
traditionnelle Mais rien ne change ! Une hôtelière désabusée Un bon accord |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2881 Hebdo 15 juillet 2004 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE