d'octobre 2003 |
TENDANCE |
Le nomadisme alimentaire est devenu un phénomène de société. Les hôteliers, restaurateurs et traiteurs s'intéressent de plus en plus à ce nouveau créneau à travers diverses propositions et formules... Lunchbox, plateaux-repas et paniers pique-nique : tout est dans la boîte.
Dossier réalisé par Katia Kulawick zzz22v zzz44h zzz44d zzz22l
C'est dans l'ancien Japon, vers 794, qu'est né le pique-nique sur l'herbe, rituel qui célébrait alors le début du calendrier agricole. Aujourd'hui, le nomadisme alimentaire est un véritable phénomène de consommation, plus souvent motivé par la frénésie urbaine. Le pique-nique du dimanche sous les cerisiers est remplacé par un repas nomade en 20 minutes top chrono entre deux réunions, deux avions, ou même une séance de shopping. Alors, plateaux-repas et pique-nique sur l'herbe, même combat ? Oui, parce que la consommation nomade se veut transversale et se dessine peu à peu comme un mode de consommation à part entière : la lunchbox (boîte déjeuner) de BE peut se déballer sur la route des vacances mais aussi en réunion d'affaires. Et si le pique-nique du XXIe siècle a lieu sur l'herbe, c'est en ville, dans un parc... Les restaurateurs parisiens le clament, les longs déjeuners 'entrée + plat + dessert' ne sont plus à l'ordre du jour. Les repas d'affaires ou de loisirs doivent être pris de plus en plus vite, doivent être toujours plus pratiques, et le nomadisme culinaire s'impose comme une nouvelle adaptation à nos modes de vie. La restauration a donc un nouveau terrain de jeu à définir : la restauration nomade comme une nouvelle concurrence, ou plutôt comme une nouvelle opportunité. A la différence que la demande des produits (plus qu'un sandwich, mais moins qu'un repas assis au restaurant), les emballages et la gestion sont spécifiques. Rapide, pratique, collective et individuelle à la fois, la restauration nomade doit (ré) inventer ses modes d'utilisation (finger-food, etc.) et de conditionnement (jetable, pliable, emboîtable, portions individuelles, contenants, plateaux à compartiments, boîtes, etc.). C'est aussi un effet de surprise que demande le consommateur, une utilisation simplissime mais ludique (comme celle des mallettes de goûters d'enfant), voire sur mesure. Avec un avantage certain, celui de la pratique d'un prix intéressant pour le consommateur et le restaurateur, avec une TVA à 5,5 %.
Les lunchbox de BE proposent 3 formules : gourmande, light ou classique.
Toujours plus rapide
Et si on veut manger vite aujourd'hui, ça n'est pas au détriment de la qualité.
BE propose 3 formules de lunchbox : gourmande, light ou classique, et de quoi faire 32
semaines de menus différents, avec des produits frais et de qualité. A Montpellier et
ses alentours, les frères Pourcel lancent un service de livraison de plateaux-repas
destinés aux entreprises et de paniers pique-nique pour adultes et enfants, centralisé
par leur nouvelle sandwicherie de luxe du centre-ville, Sens. "Pour les
plateaux-repas, il n'y a rien dans la région mis à part les traiteurs et c'est un bon
créneau à prendre", commente Jacques Pourcel, à qui aucune tendance
n'échappe.
Avec le rachat de Flo Prestige, Fauchon prépare une véritable transformation de son
offre plateaux-repas sous sa marque, et notamment une palette de prix plus larges, de
façon à respecter le positionnement de Flo Prestige. Quant à Lenôtre, la marque a
imaginé un tout nouveau design de plateau-repas également mis en service à l'automne.
Christophe Kaprélian, dirigeant de la société Madame est servie !
(www.madamestservie.com) livre des plateaux-repas depuis 6 ans. Pour le contenu, il
travaille avec 20 restaurants parisiens (Aristide, Les Dolomites, La Soupière, Tse Yang,
Kinugawa, Le Riad, Passy Mandarin, etc.). "Nous avons créé une véritable
demande", estime-t-il. Le profil du plateau-repas type : une clientèle
d'affaires, être servi froid, pouvoir être consommé rapidement et ne pas dépasser un
certain budget. "Il y a une forte évolution de vente du plateau-repas. Parce
qu'il y a de plus en plus de réunions et de demandes régulières. La moyenne de vente se
situe entre 15 et 25 e par plateau, et nous vendons essentiellement dans l'ouest
parisien. Les gens viennent de Londres, Bruxelles ou Lyon en TGV le matin même pour une
réunion à Paris et repartent le soir, alors ils ne vont pas passer 2 heures au
restaurant pour le déjeuner et ce n'est pas pour une raison de budget mais de temps.
S'ils hésitent, c'est entre des sandwiches et un plateau-repas."
Le restaurant/sushi-bar Makoto (groupe Créa), situé dans la cour Saint-Emilion, offre un
Panier kit picnic (avec serviette, verre plastique, nappe et baguettes) pour 12 e d'achat
à emporter (ou en livraison). L'offre est au choix (sushi, temaki, maki, salades, etc.),
à la carte. Ce service plus, lancé en avril dernier, marche bien, en particulier les
jours de beau temps où les clients (qui travaillent dans le quartier) filent au parc de
Bercy avec leur petit panier 'Déjeuner sur l'herbe'. Une alternative décontractée du
déjeuner entre collègues.
Le restaurant/sushi-bar Makoto offre un Panier kit picnic (avec serviette, verre
plastique, nappe et baguettes) pour 12 e d'achat à emporter (ou en livraison).
L'hôtellerie se lance sur le créneau
Les hôtels se mettent également à faire de plus en plus de 'lunchbox' pour les
séminaires, ce qui rajoute une touche 'plaisir' dans une journée de travail, même si la
plupart des hôtels de luxe proposent encore le traditionnel panier pique-nique de luxe
plutôt pour les loisirs. A Londres, l'hôtel Mandarin Oriental Hyde Park proposait durant
tout l'été des paniers pique-nique à ses clients comme aux non-résidents pour un
minimum de 84 e, version homard poché et champagne, pour filer en douce à Hyde Park. A
Paris, le Meurice prévoit de lancer ses lunchbox pour 2004.
Au Bristol, le panier pique-nique, sur mesure, n'est que très rarement demandé... Il
faut dire qu'à 500 e pour deux, ça reste un événement exceptionnel (au menu : Gaspacho
de homard breton, Guacamole relevé aux piments doux et huile d'olive, Assiette de
charcuteries, Asperges vertes et blanches, vinaigrette aux herbes, Poulet fermier rôti à
la broche, fromages, assortiment de pâtisseries, château petit bouquey-saint-émilion
1996, champagne Bristol - cuvée des Caudalies, eau minérale). Mais l'hôtellerie de luxe
n'a plus l'apanage des paniers pique-nique et l'ultramoderne Hi Hotel à Nice propose
désormais pour 32 e un pique-nique très tendance servi en verrine (poulet tandoori, un
mix de légumes poêlés, pain aux figues, une boîte à fromages, un Orangina avec son
verre et sa paille, une salade de fruits en verrine, le tout dans un sac en plastique Hi
www.hi-hotel.net).
Hi Hotel à Nice propose à 32 e un pique-nique très tendance servi en verrine.
Le Sheraton Paris Airport, situé dans le Terminal 2 à Roissy, a lancé en avril dernier un service de plateaux-repas livrés dans un rayon de 15 km. Pour 'exporter son art culinaire', des repas frais (marché du matin) et équilibrés (du light au plus élaboré), tendance gastronomique, du chef Jean-Michel Kirche installé au restaurant gastronomique Les Etoiles. Au menu, des paniers sandwiches et plateaux-repas haut de gamme dans un packaging adapté pour la clientèle d'affaires installée dans les bureaux alentour. "On fait gagner du temps, et on gagne des clients qui n'avaient pas pensé venir jusqu'à nous. De plus, ça leur permet de manger pour un prix moyen sympa", commente Vanina Minassian-Sommer, responsable des relations publiques Starwood Hotels & Resorts Paris. "La première demande est venue d'un client et depuis que nous le proposons, ce service fonctionne très bien et l'hôtel est très content du retour. Il y a une très grosse demande sur la plateforme. La consommation au bureau est plus appropriée au déjeuner quotidien, parce que les clients ont moins de temps, et pas forcément envie de manger au restaurant tous les jours."
Le Sheraton Paris Airport, situé dans le Terminal 2 à Roissy, a lancé en avril
dernier un service de plateaux-repas livrés dans un rayon de 15 km.
Loisirs et affaires, un marché en pleine expansion
Côté loisirs, les hôtels-restaurants des Grandes Etapes Françaises se sont aussi
adaptés aux attentes et aux habitudes de leur clientèle en proposant des paniers
pique-nique qui permettent de déjeuner hors de l'hôtel et de mieux profiter de la
découverte de la région. "C'est une question de mode de vie. En vacances ou en
week-end, on mange de façon moins élaborée le midi en privilégiant la gastronomie le
soir", commente-t-on aux Grandes Etapes. Ainsi, au Château D'Esclimont, près de
Chartres, les paniers pique-nique peuvent se consommer au domaine sur ses 9 km de
chemins... à pied, en VTT, en voiturette ou en barque !
L'origine du plateau-repas se trouve évidemment chez les traiteurs, qui constatent eux
aussi une forte évolution du marché. Chez Dalloyau, cela fait 20 ans que la gamme de
plateau-repas existe, et se renouvelle deux fois par an. "En proposant cette offre
corporate, nous avons créé une nouvelle demande et c'est une manne substantielle de
business pour nous...", affirme Nicolas Desanti, directeur du développement des
marchés pour Dalloyau. "Notre activité s'est accrue grâce au tertiaire. Nos
consommateurs sont des cabinets d'avocats, bureaux de consulting, experts-comptables. La
grosse évolution, c'est la flexibilité commerciale. Avant, les clients savaient combien
ils allaient consommer de repas par semaine. Aujourd'hui, on est challengé pour répondre
très rapidement. Le département corporate pack dédié à l'univers de l'entreprise
représente 6 personnes chez nous, et se doit d'être de plus en plus rapide, il faut
répondre du tac au tac. Pendant l'année, c'est le déjeuner au bureau et en été, c'est
beaucoup de plateaux pour le dîner..." Serait-ce parce que ces messieurs restent
plus tard au bureau et que madame est en vacances ? L'offre haut de gamme des
plateaux-repas Dalloyau, 'Parcours de saveurs' (65,41 e), servi sur une assiette en verre
poli, est une nouvelle version du pique-nique de luxe, qui attire une clientèle "d'ambassadeurs,
de ministres... Ça émane d'une demande, mais on n'en vend pas 150 par jour, on en vend
environ 20 par semaine dans les ministères, à l'Elysée ou à Matignon. Ça a un côté
fun. Et savoir que la République s'amuse aussi autour de la tendance pique-nique, c'est
une vraie bonne nouvelle..."
La demande de plateaux-repas ne cesse d'augmenter, et a même vu naître des entreprises
spécialisées dans ce créneau, comme L'Affiche, filiale événementielle et commerciale
de Sogeres (qui gère les hippodromes de Paris Vincennes et Longchamp, le Racing Club de
France, l'Atelier Renault sur les Champs-Elysées et le Roland Garros), une entreprise
née en 2000 avec comme credo 'la gastronomie s'invite au bureau'. En 3 ans, ses plateaux
froids ont séduit 700 entreprises, essentiellement en Ile-de-France (la société n'a pas
de projet de développement en province), aidée par les conseils et l'image de
Jean-Pierre Vigato (l'Apicius) qui participe à l'élaboration de la carte. "Le
plateau-repas est un phénomène qui existait déjà mais qui s'est développé avec les
35 heures. Il y a plus de réunions, on va moins au restaurant. Depuis 3 ans que nous
sommes sur ce marché, nous sommes passés de 0 à 250 plateaux en moyenne par jour, ce
qui est une belle progression", explique Céline Galetti, chargée du
développement. "Malgré le fait que nous n'ayons pas de boutique, nous avons un
fonds de roulement stable aujourd'hui. Nos clients ont 50 salariés minimum, et recouvrent
tous les secteurs d'activité. Le plateau, c'est un mode interne de politique
d'entreprise, souvent déterminé par le p.-d.g. Nos produits phares, la volaille et le
saumon, souvent commandés à la dernière minute, le matin même. Ce ne sont pas les
plateaux les moins chers qui sont forcément les plus commandés. Les clients regardent de
près le rapport qualité-prix et le produit compte énormément, en moyenne cela tourne
autour de 22-23 e. Au niveau tarif, nous nous situons sur le même créneau que
Flo, nos concurrents sont beaucoup de petits traiteurs sur le marché. Au-delà du service
et de la renommée, il faut que le produit soit irréprochable, avoir une marque connue ne
suffit pas. Ces derniers temps, les clients font beaucoup plus attention au prix, nous
fonctionnons de plus en plus par appel d'offres, et les commandes sont centralisées dans
l'entreprise qui veut faire des économies, ce qui était moins le cas avant. Nous
ressentons aussi les conséquences de tous les événements extérieurs." <
Le Château de Gilly propose un panier pique-nique à 25 e, composé de produits
du terroir bourguignon.
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L'Hôtellerie Restauration n° 2841 Magazine 2 octobre 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE