L’Hôtellerie Restauration : Comment est né ce projet de bâtir une alliance entre hôteliers pour des achats responsables ?
Caroline Tissot : Nous nous engageons, dans l’alliance, à respecter scrupuleusement les lois et la règlementation en matière d’entente et d’abus de position dominante. Nous nous connaissons entre homologues car nous sommes amenés à échanger sur les mêmes problématiques en matière de développement durable. Nous sommes très conscients du fait que les achats sont primordiaux pour la transformation durable de l’hôtellerie, puisque les achats entrent dans nos entreprises. Plus ils seront éco-responsables, plus le bilan de nos entreprises le sera.
Quel est le but de votre démarche ?
Notre alliance a plusieurs buts :
- réfléchir ensemble à cette transformation durable puisque l’hospitalité contribue de 9 à 12 % - selon les différentes études publiées - aux émissions de gaz à effet de serre, et que les achats sont significatifs dans ces émissions. Il faut donc agir collectivement ;
- demander à nos fournisseurs de mesurer et diminuer leurs émissions carbone, en participant à des évaluations avec notre partenaire Ecovadis, et en élaborant des plans d’amélioration. Cette démarche est faite en une seule fois pour nos cinq groupes, ce qui permet de gagner en temps et en efficacité ;
- demander des plans de progrès à nos fournisseurs. Par exemple, avec Harp, nous souhaitons cette année nous concentrer sur la décarbonisation de la chaîne d’approvisionnement et l’amélioration du bien-être animal ;
- créer un pool de partenaires vertueux : chaque chaîne gagne du temps et chaque fournisseur sait qu’il pourra gagner des parts de marché en intégrant ce pool, car il sera mieux noté.
Comment les fournisseurs sont-ils évalués ?
Ils s’auto-évaluent sur la plateforme Ecovadis autour de quatre piliers : l’environnement, notamment les émissions carbone, le social, l’éthique, et la chaine d’approvisionnement. Les fournisseurs à risque et très à risque, comme la blanchisserie ou encore les produits alimentaires, doivent s'évaluer tous les trois ans. Toutes les réponses aux questions doivent être justifiées par des documents 'preuve' qui sont ensuite analysés par les experts pour notation.
Quelles sont les défis que vous avez rencontrés en cofondant ce groupe ?
Nous rencontrons les mêmes défis avec nos pairs Ce que nous souhaitons, c’est aller plus vite dans la transformation durable de nos achats, de façon cohérente, en partenariat avec nos fournisseurs qui sont souvent de plus petites entreprises que nous .
Est-il difficile d’impulser ces changements dans un groupe comme Accor ?
Les équipes sont convaincues de la nécessité de ces changements et que cela donne du sens à leur travail. Nous avons mis en place un grand chantier de formation, School for Change, pour que chaque salarié ait la même base de connaissances scientifiques sur la transformation durable.
Depuis que Brune Poirson [directrice du développement durable, NDLR] est arrivée chez Accor, elle a fait bouger les lignes et entraine toute l’entreprise derrière elle. Sa direction a été renforcée car le temps s’est accéléré, et toutes les directions sont touchées pour redéfinir les standards de la marque.
Quelles sont les axes de progrès au sein de la direction achats d’Accor pour l’avenir ?
Parmi nos chantiers, nous travaillons à rapprocher toujours plus les chaines d’approvisionnement des lieux de consommation, à trouver des solutions innovantes pour juguler l’inflation et à imaginer comment l’intelligence artificielle peut nous aider dans nos métiers. Nous menons par exemple un vaste projet pour réduire le gaspillage alimentaire grâce à des poubelles munies de balances capables d’analyser la nourriture jetée. Cela nous permet de revoir les portions des assiettes, nos concepts de buffets… Je pense qu’avec ces multiples actions, nous pourrons améliorer les choses petit à petit et faire bouger les lignes.
Publié par Roselyne DOUILLET