Grégory Marchand s'est installé à Paris en 2008 lorsque sa femme, Marie, s'apprête à mettre au monde leur premier enfant. Il revient
de New York, après être passé par Londres, Hong Kong, Marbella, l'Écosse...
Après une dizaine d'années à l'étranger sous l'influence de chefs tels que Jean George Vongerichten (Hong Kong),
Michael Anthony (New-York),
Arthur Potts Dawson (Londres), Jamie Oliver (Fifteen, Londres), ou d'entrepreneurs
tels que Danny Meyer (New York)
et Nick Jones (Londres), le jeune
chef de cuisine a envie de voler de ses propres ailes. "On a repéré un local
rue du Nil [IIe]. Je n'avais que 200 000 € d'économies, mais grâce à
des amis, on a pu rassembler un apport de 700 000 €, ce qui nous a
permis d'emprunter 750 000 € sur sept ans au taux de 4,5 % pour
acheter le fonds, réaliser quelques travaux et démarrer l'activité", se
souvient-il.
Ainsi est né Frenchie en avril 2009. Nommé en clin d'oeil au surnom que
lui avait attribué Jamie Oliver, le bistrot, de taille modeste (26 couverts) n'en
est pas un moins un endroit accueillant mettant à l'honneur des produits frais,
un menu simple, régulièrement renouvelé, le tout à un prix assez abordable pour
le client ait envie de revenir.
"À l'époque, la rue du Nil ne
comptait pratiquement aucun commerce", commente Marie
Marchand, encore étonnée de la rapidité et de l'ampleur du succès, qui les a conduits
à se développer et à se diversifier. Ainsi, en 2016, Frenchie c'est aussi un
restaurant tout juste rénové par Émilie
Bonaventure et à l'assiette plus élaborée, mais aussi Frenchie bar à vin,
ouvert en 2011 sur le trottoir d'en face, Frenchie to go qui, à quelques
mètres, sert des sandwichs et plats à emporter, et Frenchie Caviste né en 2015
de l'association avec le sommelier Aurélien
Massé. Bref, une entreprise familiale, gérée habilement par Grégory Marchand
aux fourneaux et Marie pour la partie gestion et marketing.
Londres, presque un retour aux sources
Quant à l'aventure Frenchie Covent Garden, à Londres, le dernier-né de
la famille, c'est un peu par hasard qu'elle est amorcée. "Sans que ce soit
vraiment précis, on se demandait si la prochaine étape de notre développement
ne serait pas d'ouvrir à l'étranger", raconte Marie Marchand. Ces sont des
rencontres fortuites et presque simultanées qui vont faire s'imbriquer les
pièces d'une belle histoire : d'un côté les représentants de CapCo, les
développeurs de Covent Garden à la recherche de renouveau pour ce quartier londonien.
De l'autre, Pedro Novo, de la
direction Export de Bpifrance, un client habitué de la rue du Nil, et qui est
prêt à les aider. Lentement, l'idée de s'exporter se transforme en opportunité
que le couple décide de saisir. D'autant que Londres, c'est presque un retour
aux sources pour le chef.
"Grégory et Marie Marchand ont réussi à créer une cuisine contemporaine,
un nom et une marque suffisamment autonomes pour pouvoir être exportés. Mais, à
Londres, avoir le bon produit au bon moment ne suffit pas. Une aisance
financière à la dimension de cette ambition est indispensable. C'est ce que
nous leur avons apporté", témoigne Pedro Novo, de Bpifrance.
La banque publique a en effet investi un million d'euros, pour moitié en
crédit, pour moitié en capital. C'est ainsi que depuis février 2016, Grégory
Marchand partage sa semaine entre Paris et Londres. Installé à Henrietta
street, qui donne sur la place historique du marché de Covent Garden, un
quartier commerçant, culturel et ultra-touristique en pleine mutation,
ce restaurant de plus de 60 couverts sur deux niveaux, ouvert 7 jours
sur 7 jours et employant une trentaine de personnes, est d'un tout autre
gabarit que son bistrot parisien. En plus d'un investissement financier
conséquent, il exige un important investissement personnel. "La présence du
chef sur place est un incontournable, tout comme savoir être actif et réactif
sur les réseaux sociaux, ce que l'équipe de Frenchie a su faire", glisse
Pedro Novo, qui se dit fier de contribuer au rayonnement international de la cuisine
française et d'avoir pu aider "ces artisans d'art de la gastronomie de
devenir des exportateurs avertis de la bistronomie."
Publié par Tiphaine BEAUSSERON