"Un collègue a été retenu car il avait sur lui un limonadier."
Question sécurité, il ne
valait mieux pas rigoler, le 30 novembre dernier pour le déjeuner d'ouverture
de la COP 21 au Bourget. Les 147 chefs d'État réunis ont
dégusté le menu concocté par Yannick Alléno (Pavillon Ledoyen à Paris,
VIIIe), Alexandre Gauthier (La Grenouillère à Montreuil-sur-Mer), Nicolas Masse (Les Sources de Caudalie
à Martillac), Marc Veyrat (La maison des bois à Manigod) et Christelle
Brua, la chef pâtissière du
Pré Catelan (Paris, XVIe), accompagnée de Frédéric Anton. "Nous sommes
partis à 6 h 30 du quai d'Orsay, témoigne un extra assermenté de l'Élysée tenu à
l'anonymat. En trente minutes, nous étions au Bourget. On voyait des tireurs
d'élite sur le parcours, un hélicoptère au-dessus du Bourget. Les contrôles de
sécurité étaient encadrés par des agents de l'Onu. Le personnel maison de l'Élysée
était déjà à l'ouvrage. Tout était dressé, aligné selon les usages des
réceptions officielles : une table d'honneur ovale et centrale servie par
des militaires de l'Élysée et des tables rondes satellites attribuées à des
équipes du quai d'Orsay ou des extras. La sommelière de l'Élysée était là comme
les argentiers. Les assiettes bleues de Sèvres venaient du palais par malles.
Les verres provenaient du Trianon. La vaisselle sale était rencaissée en l'état
dans les malles pour être lavée à l'Élysée. Nous avons installé les menus et
placé les serviettes. Ensuite, chaque cuisinier nous a briefé sur son plat. Le
plus compliqué fut celui de Marc Veyrat, avec des herbes au nom impossibles"
Un service à l'assiette en 1 h 15 chrono
Pour chaque plat, la cinquantaine de serveurs devait
entrer en salle en deux files alignées de telle sorte que les convives ne
voient qu'une tête par colonne. Pour chaque table de huit, deux maîtres d'hôtel
en frac et gants blanc étaient organisés ainsi : un premier posait les
assiettes sur table et un second portait le plateau. Les changes était faits à la
française. Le service à l'assiette - ou plutôt au plateau -
permettait d'assurer le service en 1 h 15 avec entrée, plat, fromage,
dessert et café. Un ordre de préséance simplifié avait été signifié par le
protocole : les femmes d'abord puis les hommes, et le président de table
en dernier. "À 14 h 30, le déjeuner s'est achevé puis nous avons débarrassé
les tables et lavé les verres estampillés RF [pour République française], à la
main, dans des bassines et avec précaution : ce sont des pièces uniques. Nous
avons quitté le Bourget avec des navettes, l'occasion de nouveaux échanges avec
des chefs qui étaient aux anges." L'extra n'aura pas eu le temps de
goûter les plats, en dehors d'un furtif coup de cuillère dans le paris-brest de
Christelle Brua, "un pur délice".
Publié par Francois PONT