La Bohème du Tertre, "un état d'esprit"

Paris (75) Il y a un siècle, Toulouse-Lautrec y avait son rond de serviette. Aujourd'hui, les artistes y sont toujours les bienvenus. Ce café, restaurant et cabaret parisien surfe sur son passé, sans pour autant se transformer à un musée.

Publié le 17 septembre 2019 à 12:17


Au début du XXe siècle, c'était un QG de la vie montmartroise. Le restaurant-café Bouscarat, idéalement situé sur la place du Tertre à Paris (XVIIIe), portait le nom de son patron, un pinardier auvergnat. Les artistes du quartier venaient chez lui : Degas, Puvis de Chavanne, Toulouse-Lautrec… faisaient partie des habitués. C'est en 1961 que l'établissement adopte son nom actuel, La Bohème du Tertre. Avec aux manettes, à partir de 1985, Lucien Valéry, une figure de Montmartre, et son fils Serge. En 2015, ce dernier décide de travailler de concert avec sa femme, de formation commerciale doublée d'un CAP de boulanger et d'une initiation à la cuisine dans le centre de formation pour adultes du groupe Alain Ducasse. Ensemble, ils ont un objectif : "Rendre ses lettres de noblesse à La Bohème, sans pour autant transformer l'établissement en musée. Nous voulons rester une vitrine de Paris à l'international, tout en faisant remonter les Parisiens sur la butte", explique la cogérante du lieu.

 

"Je laisse des comédiens venir répéter à leur guise dans le cabaret"

Pour relever ce défi, il a fallu se retrousser les manches. Cuisine, peinture, mobilier, déco, tout a été métamorphosé. En explorant les différents espaces de cet établissement, capable d'accueillir quelque 300 personnes dans ses différentes salles et une centaine en terrasse l'été, la propriétaire s'est aperçue que le sous-sol transformé en débarras n'était autre qu'un ancien cabaret. L'été dernier, elle a donc fait réhabiliter cet espace d'une capacité d'une centaine de personnes. "Je projette d'y organiser des thés dansants, ainsi que des conférences", confie le gérante.

Sans pour autant négliger ce qu'elle appelle "l'esprit de Montmartre et l'état d'esprit de La Bohème" : "Je laisse des comédiens venir répéter à leur guise dans le cabaret." Et quand l'un des peintres de la place du Tertre lui demande de quoi manger, elle l'accueille bien volontiers, en échange d'une toile, "comme autrefois". "C'est ma façon de perpétuer la tradition", confie-t-elle, en expliquant qu'elle expose également des oeuvres d'artistes sur les murs du restaurant.

 

"Je recherche photos, dessins, objets qui racontent le passé de La Bohème"

La Bohème compte au total 38 salariés en hiver et une cinquantaine de personnes dès le retour des beaux jours. "Nous sommes le plus gros employeur de la place du Tertre", précise la gérante. D'ailleurs, tout le monde la connaît dans ce qu'elle appelle "un petit village". À commencer par le facteur qui profite de déposer le courrier pour prendre un café avec elle. "Je lance un appel, confie-t-elle encore. Pour reconstituer le fil de l'histoire de La Bohème, je recherche photos, dessins, objets… qui racontent le passé de cet établissement, sans pour autant verser dans le kitsch." Car, si elle veut bien regarder dans le rétroviseur, elle ne perd pas de vue que nous sommes en 2017 : "Chez nous, tout est fait maison, mais on trouve aussi bien de la blanquette et des cuisses de grenouille que des pizzas et des burgers." Autre de ses souhaits : "J'aimerais réunir la jeune génération de restaurateurs parisiens. Pour échanger, partager, se rencontrer. Personne ne le fait. Aucun endroit ne nous accueille. Alors réunissons-nous à La Bohème !"

 

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Publié par Anne EVEILLARD



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