En 1964, lors d'une réunion à Sévrier, les professionnels des deux Savoie, FNIH* à l'époque, estimèrent que leur colère contre les mesures gouvernementales n'était pas relayée par leurs représentants nationaux. La scission donna lieu quatre ans plus tard à la création officielle de la Fédération autonome générale de l'industrie hôtelière et touristique. Vous voici aujourd'hui sous la bannière du Groupement national des indépendants. Quelle est la place de la Fagiht au sein du GNI ?
Claude Daumas : La Fagiht représente des entreprises de séjour et saisonnières. Ce n'est pas une branche mais un métier transversal, qui va de l'hôtellerie à la restauration, du café au bar de nuit. Nous avons créé avec le Synhorcat le Groupement national des indépendants afin de présenter un bloc uni de professionnels indépendants et de peser ainsi davantage sur les pouvoirs publics, en mutualisant les forces et les moyens. Depuis avril, la CPIH nous a rejoints comme vous le savez. Chacun apporte sa connaissance approfondie des problèmes de gestion des entreprises qu'il représente au bénéfice de l'ensemble et conserve au sein du GNI la maîtrise de sa spécificité et son identité. La Fagiht reste la Fagiht.
Comment voyez-vous l'avenir du secteur ?
Les professionnels que nous représentons vont de plus en plus mal. Les problèmes de rentabilité s'accentuent. Les mises aux normes imposent des investissements suicidaires pour l'entreprise et les mauvaises saisons se succèdent. Cet été, en montagne, les chiffres d'affaires ont chuté de l'ordre de 30 à 50%. Si les banques ne soutiennent pas ces entreprises, nous allons au désastre. Mais c'est maintenant qu'il faut des solutions et pas dans six mois ou dans un an. Derrière le problème des hôteliers se cachent aussi la réalité du tourisme et du pouvoir d'achat des français. On nous parle aujourd'hui du tourisme mondial dont il faut profiter. Mais si les hôtels indépendants ferment, quelles seront les conditions d'accueil de ces touristes ? Au congrès de Val Cenis, nous avions présenté dix mesures pour sauver l'hôtellerie. Le seul changement que nous avons constaté, depuis 2012, c'est l'aggravation de la situation. L'Etat doit revenir sur un certain nombre de contraintes qui détruisent l'esprit d'entreprendre. Les chefs d'entreprise que nous représentons, en plus de leur métier, doivent faire face à de multiples obligations administratives et fiscales devenues intenables. L'entreprise saisonnière doit pouvoir faire des réserves de trésorerie destinée à des investissements rapides. On doit revoir tout ce qui touche la transmission ou la mutation. Les droits de succession payés à l'Etat sont contre productif. S'ils étaient réinjectés dans l'investissement de l'entreprise, cela serait synonyme de travaux, d'emplois, d'un meilleur accueil des touristes, etc. Dynamiser l'entreprise et l'économie, crée l'emploi et multiplie les rentrées fiscales.
L'accord sur la modulation du temps de travail doit vous satisfaire ?
Il était important pour les saisonniers que les syndicats de salariés et les organisations patronales s'accordent sur la modulation du temps de travail. La problématique porte maintenant sur le temps partiel. Le climat social s'était dégradé et il reprend de manière constructive. C'est une très bonne chose.
Que pensez-vous, en tant que saisonnier, du Fait Maison ?
Pour nous, les critères qui ont été retenus constituent un bon équilibre entre la nécessaire information du consommateur et les contraintes de gestion de la très grande majorité des entreprises de restauration. Nous l'avons rappelé d'ailleurs le mois dernier dans un courrier que nous avons adressé à la Secrétaire d'Etat, Carole Delga. Ce que réalise un restaurateur dans son établissement dépend d'un nombre considérable de facteurs : emplacement, nombre de couverts, prix de vente, durée d'ouverture, facilités d'approvisionnement, possibilité ou non d'embaucher des apprentis, dépendance aux conditions géographiques et climatiques. Le procès d'intention fait aux produits bruts surgelés ou sous vide est ridicule car c'est ignorer les aléas d'approvisionnement ou de la fréquentation de l'établissement, mais également un grand nombre de règles d'hygiène que doivent respecter les professionnels. Le Fait Maison répond à la demande des consommateurs d'identifier les plats qui sont le reflet du savoir-faire du restaurateur. Le Fait Maison n'est pas un label, c'est une volonté de transparence. Aujourd'hui, il faudrait sans doute que le ministère engage une campagne de communication positive à laquelle la Fagiht est prête à s'associer.
*La Fédération nationale de l'industrie hôtelière, devenue l'Umih.
Publié par Propos recueillis par Sylvie Soubes