La cuisine note à note ? Mes amis cuisiniers commencent à savoir qu'il s'agit d'une cuisine 'de synthèse', qui se définit comme la musique de synthèse par rapport à la musique classique : au lieu d'avoir les notes toutes faites sur les instruments classiques, les synthétiseurs construisent les sons, les timbres, avec lesquels on fait de la musique ; de même, pour la cuisine note à note, on utilise des composés pour construire des aliments.
Dans la construction des plats note à note, les protéines sont moins 'exotiques' que l'isothiocyanate d'allyle, présenté lors de l'article précédent, mais elles sont tout à fait essentielles.
Par exemple, récemment, je reçois un message d'une cuisinière qui me dit avoir cherché un ingrédient qui aurait remplacé le jaune d'oeuf, notamment dan la réalisation de choux (oui, on peut parfaitement faire la pâtisserie note à note). Elle avait déjà utilisé de l'amidon, de la fécule… Ce n'est pas cela qui manquait, mais des protéines ! En effet, un jaune d'oeuf, c'est moitié d'eau, et, pour la moitié restante, des protéines et de matière grasse (entre autres). Ce qui manquait, dans sa préparation, c'est l'oeuf qui, en coagulant, donne de la cohérence aux choux.
Blanc d'oeuf, lait, légumineuses
Plus exactement, pour ce qui concerne la cuisine, il y a des protéines de deux types principaux : celles qui coagulent à la cuisson, et celles qui ne coagulent pas.
Par exemple, le blanc d'oeuf est fait de 90 % d'eau et de 10 % de protéines… qui coagulent à la cuisson. D'ailleurs, on peut parfaitement produire comme un blanc d'oeuf cuit sur le plat en cuisant dans une poêle un mélange d'une cuillerée de poudre de blanc d'oeuf et de neuf cuillerées d'eau. L'intérêt ? Si on utilise un jus d'orange à la place de l'eau (ou du bouillon, du café, du vin), on peut faire une matière qui durcisse à la chaleur.
D'autres protéines ne coagulent pas à la chaleur : c'est le cas de la gélatine, dont on sait bien que, en solution dans un liquide, elle reste liquide à chaud, mais gélifie à froid, quand il y en a plus que 5 %.
Dans le lait ? Il y a des protéines des deux sortes : certaines, qui font la peau du lait, coagulent à la chaleur, tandis que d'autres coagulent uniquement par l'ajout d'acide, ou de présure, par exemple.
Mais les végétaux, surtout les légumineuses, contiennent également des protéines, et, mieux, des protéines des deux sortes: celles qui coagulent à la cuisson et celles qui ne coagulent pas. Par exemple, on peut extraire des protéines des pois, du chanvre, du soja, des lentilles… mais, bien sûr, pour ne pas déséquilibrer la balance commerciale de la France, j'invite mes amis cuisiniers à ne pas utiliser de protéines de soja et à utiliser plutôt des protéines extraites de végétaux locaux.
Finalement, dans une cuisine moderne, qui se fournirait dans une épicerie moderne, je vois bien les cuisiniers faire leurs bons d'économat en stipulant 'protéines coagulant à la chaleur', ou bien 'protéines gélifiant à froid', par exemple.
Publié par Hervé THIS
jeudi 29 décembre 2016