Leaders, savez-vous repérer les profils dans votre équipe ?

Parce que, depuis la nuit des temps, les hommes et les femmes sont ce qu'ils sont, avec leurs bons et leurs mauvais côtés, Laurent Combalbert, ancien négociateur du RAID (unité d'élite de la police) et expert en management, vous aide à savoir vous entourer. À l'ère agricole, ceux que l'on appelle aujourd'hui des leaders visionnaires étaient des défricheurs. Depuis, la société s'est complexifiée, mais les hommes et les femmes sont restés les mêmes. Alors, arriverez-vous à joindre les différents profils et les repérer dans votre équipe ?

Publié le 01 février 2023 à 10:54

► Au début, il y a un défricheur/leader visionnaire. Quelqu’un qui a une idée, une vision. Quelqu’un qui décide d’aller là où les autres ne vont pas, parce que c’est trop loin, trop dur, trop risqué, ou que cela semble sans intérêt. Le défricheur/leader visionnaire, lui, a du nez. De l’idée. Des idées, parfois trop. À un moment donné, l’une de ses idées va le pousser à penser qu’il y a quelque chose à faire, à construire, à inventer. Il va se heurter aux pessimistes : “Non, ça ne marchera jamais.” Aux nombrilistes : “J’ai déjà eu cette idée, mais je n’ai pas eu le temps de la développer.” Aux pollueurs : “Vous allez vous planter, c’est sûr, votre idée ne vaut rien.” Aux égoïstes : “On ne vous aidera pas et on ne vous prêtera rien pour y aller.” Heureusement, le défricheur/leader visionnaire va aussi croiser des optimistes : “C’est une bonne idée, il faut foncer.” Des altruistes : “Si je peux vous aider, je serai là.” Alors, le défricheur/leader visionnaire va y aller parce que ce qui le caractérise, c’est l’esprit pionnier. Inventer. Tenter le coup. Prendre l’initiative. Arrivé sur place, le défricheur/leader visionnaire va se mettre à préparer le terrain. Dégrossir, tester, tenter, recommencer. Jusqu’au jour où son terrain va commencer à ressembler à quelque chose. Là, il va devoir trouver un ou plusieurs laboureurs.

► Le laboureur/............. n’est pas un défricheur/leader visionnaire. Il n’aime pas arriver sur un terrain brut, vierge, aride, parfois hostile. Quand le défricheur/leader visionnaire a la tête dans le ciel et regarde au loin, le laboureur a les pieds bien ancrés dans la terre. Et en regardant le travail du défricheur/leader visionnaire, en sentant le sol du bout de ses orteils, en écoutant la vision et le projet, il se dit : “Oui, effectivement, il y a certainement quelque chose à faire ici.” C’est à ce moment-là que la vision du défricheur/leader visionnaire devient la mission du laboureur. Il peut se heurter aux pessimistes : “Cette terre n’est pas très bonne, j’ai peur que tu laboures et que tu travailles pour rien.” Aux pollueurs : “Tu ne devrais pas suivre ce gars-là, ça ne marchera pas.” Aux nombrilistes : “Viens plutôt avec moi, on va faire pareil mais mieux.” Aux égoïstes : “On ne vous prêtera rien pour travailler le sol ou pour travailler sur ce projet.” Pourtant, le laboureur croit à la vision du défricheur/leader visionnaire, il va alors commencer son travail, en rendant possible l’idée du défricheur/leader visionnaire, en lui donnant du corps, de la matière. Il va travailler le sol pour l’ameublir, il va travailler le projet pour l’enrichir, lui donner une forme un peu différente pour correspondre à la réalité. Et le terrain va commencer à ressembler à un champ et le projet à une mission. Mais un champ ne donne rien tant qu’il n’est pas couvert de quelque chose et un projet ne donne rien tant qu’il n’est pas mis en œuvre sur le terrain. Alors, le défricheur/leader visionnaire et le laboureur vont devoir trouver des planteurs. Et le laboureur sait reconnaître et manager les planteurs.

► Les planteurs/............. ne sont ni des défricheurs/leaders visionnaires, ni des laboureurs. Ou du moins pas encore. Ils ne sont pas encore assez audacieux pour partir à l’aventure seuls, mais ils savent planter ou ils ont une compétence technique. Et quand on leur dit où et quoi planter, quand on leur dit où agir, ils sont très efficaces. Ils savent sélectionner les plants, creuser les cuvettes d’arrosage, choisir le bon positionnement des rangées de plants. Ils savent sélectionner les méthodes, les techniques, choisir le bon moment pour agir. Quand le défricheur/leader visionnaire et le laboureur leur donnent une part du pouvoir de décision, ils font des merveilles parce qu’ils se sentent responsables de la récolte ou du résultat. Ils rendent la mission efficace. Il se peut que les planteurs rencontrent des pessimistes : “Vous êtes sûrs que c’est une bonne idée de planter là-bas ?” Ou bien : “Vous êtes sûrs que c’est une bonne idée de travailler là-bas ?” Des nombrilistes : “Si tu viens planter chez moi, je te paierai plus.” Des égoïstes : “On ne vous donnera rien pour semer.” Ou bien : “On ne vous donnera aucun moyen pour mener à bien ce projet.” Certains planteurs partiront, attirés par des nombrilistes : “Je m’en vais parce que l’on me paie mieux, parce que l’on me dit que c’est mieux ailleurs.” Ce n’est pas grave, parce que les planteurs qui seront engagés par la vision du défricheur/leader visionnaire et motivés par la mission du laboureur vont commencer à planter ou à faire leur travail. Ils vont prendre des initiatives, mettre plus de graines et de plants. Qui vont commencer à donner des arbres, puis des fruits. Beaucoup de fruits. Ou tester de nouvelles méthodes, de nouvelles techniques. Qui vont commencer à donner des résultats. Beaucoup de résultats. Alors le défricheur/leader visionnaire, le laboureur et quelques-uns des planteurs les plus audacieux vont devoir trouver des cueilleurs.

► Les cueilleurs/.............. ne sont ni des défricheurs/leaders visionnaires, ni des laboureurs. Trop risqué. Trop inquiétant. Ce ne sont pas encore des planteurs, parce qu’ils ne cherchent pas la responsabilité de planter, de prendre des initiatives, de choisir des plants, de définir l’axe des rangs. Ou parce qu’ils ne cherchent pas la responsabilité d’agir, de prendre des initiatives, de choisir des méthodes, de définir la façon de les mettre en œuvre. Mais quand on leur dit exactement quoi faire et comment le faire, ils sont efficaces. Consciencieux. Ils attendent des instructions claires. Il se peut que les cueilleurs rencontrent des pessimistes : “Vous êtes sûrs qu’il y aura des fruits et des résultats ?” Des nombrilistes : “Les fruits sont plus beaux chez moi.” Ou bien : “Les résultats sont meilleurs chez moi.” Des égoïstes : “On ne vous donnera rien pour cueillir ni aucun moyen pour agir.” Mais les cueilleurs, rassurés par la vision du défricheur/leader visionnaire, la mission du laboureur et l’engagement des planteurs, vont commencer leur travail. Ils ne prendront pas d’initiatives, ne sortiront pas des rangs, mais cueilleront consciencieusement les fruits ou participeront consciencieusement aux résultats. Certains, en regardant les planteurs, voudront faire comme eux et changer de profil, en acceptant de prendre quelques décisions, de recevoir une délégation du pouvoir. D’autres resteront à leur place de cueilleurs, parce qu’elle leur convient et qu’ils s’y sentent à l’aise.

► Parmi les cueilleurs, parfois parmi les planteurs, certains peuvent devenir des ramasseurs/.............. . Ils ne cueillent pas dans les arbres, ils ramassent au sol ce que les autres ont laissé tomber. Ils ne participent pas de manière active aux résultats. Ils vont un peu moins vite, récoltent un peu moins de fruits. Ils critiquent parfois les initiatives. C’est important que ni le défricheur, ni le laboureur, ni les planteurs, ni les cueilleurs ne les jugent parce qu’un jour, tout le monde peut devenir un ramasseur et que ce n’est pas honteux de simplement ramasser ou suivre. Il faudra les aider et comprendre pourquoi ils se contentent de ramasser ou de ralentir. Certains ne cueillent plus ou ne s’engagent plus parce qu’ils sont épuisés à force de monter aux arbres ou de faire des efforts. D’autres parce qu’ils ont peur de monter trop haut ou de prendre des risques. Certains ramasseurs diront même : “On a toujours fait comme ça, et vous changez la façon de cueillir ou de travailler. Pourquoi ? Je préfère me contenter de ramasser ou de suivre que d’apprendre une nouvelle façon de cueillir ou de travailler.” Ils craignent le changement, la nouveauté, l’incertitude.
Ce sera le moment pour le défricheur et le laboureur de leur remontrer le sens de ce qu’ils font, par la vision, par la mission. De les réengager : “Ce que tu fais ici, ce n’est pas simplement ramasser ou travailler. Ou cueillir. Ou produire des résultats. Ce que tu fais ici, avec nous, c’est donner des fruits à tous ceux qui en ont besoin, c’est participer à une action collective. C’est le sens de ce que nous faisons, donner des fruits à tous et participer à cette action collective qui doit être profitable à tous.” Donner du sens pour leur redonner envie de cueillir ou de travailler, et même de planter ou de s’engager. Mais s’ils souhaitent rester des ramasseurs, il ne faudra pas les juger. Ils contribueront aussi à la mission, même s’ils la ralentissent un peu.

► À un moment, des pilleurs/.............. finiront par arriver. Forcément. Parce que c’est toujours comme ça. Les pilleurs ne sont ni défricheurs, ni laboureurs, ni planteurs, ni cueilleurs, et encore moins ramasseurs. Quand tout sera bien en place, quand la terre ou le projet seront bien préparés, quand les arbres ou la mission seront bien installés, quand les fruits seront mûrs ou quand les premiers résultats arriveront, et que le défricheur, le laboureur, les planteurs, les cueilleurs auront pris tous les risques et auront tout organisé, les pilleurs arriveront en disant : “Stop, arrêtez ce que vous faites, cela ne va pas du tout.” Ils tenteront alors de faire croire que ce qui a été fait depuis le début ne tient pas la route. Qu’ils ont tout compris et qu’il faut tout changer. Ils auront de leur côté les pessimistes : “Je le dis depuis le début que cela ne peut pas marcher.” Les nombrilistes : “Moi, j’ai une idée pour faire mieux et beaucoup plus efficace.” Les égoïstes : “Nous avons bien fait de ne pas les aider.” À ce moment-là, il faudra mettre les pilleurs hors du champ. Vite et fort. Parce que s’ils veulent cueillir des fruits ou s’approprier des résultats, qu’ils commencent à défricher, labourer et planter par eux-mêmes. Ou à innover, organiser et lancer leur propre projet. Qu’ils choisissent une terre vierge, aride, hostile. Ou une mission difficile, hostile. Et qu’ils fassent leurs preuves.

 

Parce qu’au-delà des belles paroles, ce sont les actes et les faits qui font de nous des défricheurs/leaders visionnaires, des laboureurs/leaders missionnaires, des planteurs/opérateurs autonomes ou des cueilleurs/opérateurs encadrés. Alors leaders, chefs d’entreprise, chefs d’équipe, sachez partager votre vision et votre mission, sachez vous entourer, sachez repérer le potentiel de chacun à prendre plus de responsabilité et sachez être intraitable avec les pilleurs/ralentisseurs toxiques !

 

Management


Publié par Laurent COMBALBERT



Commentaires
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Claire Weiss

dimanche 5 février 2023

Excellent article, très riche et pertinent, reste toujours la mise en pratique en gardant un coeur sincère et authentique, tout un défi! Merci M. Combalbert!

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