Les requins, "un désastre pour le tourisme réunionnais"

La Réunion Après un recul de la fréquentation de plus de 10 % au premier semestre 2013 dans les hôtels réunionnais suite aux attaques de requins, Frédéric Veyrier, président de l'Union des hôteliers de la Réunion (UHR-Fagiht) nous fait part de ses inquiétudes.

Publié le 23 août 2013 à 18:39

L'Hôtellerie Restauration  : La Réunion a connu deux attaques mortelles de requins depuis le début de l'année 2013, qui ont été largement relayés par les médias. Qu'en pensez-vous ?

Effectivement, on a l'impression qu'il y a une multitude d'attaques de requins à la Réunion ! Même s'il ne faut pas minimiser ce qui se passe, la dernière attaque ayant coûté la vie à une adolescente, il faut ramener les choses à leur juste proportion. Sur l'île, il y a plus de morts dus à des piqûres de moustiques ou de morsures de méduses qu'à cause des attaques de requins. Mais, celles-ci sont plus spectaculaires et renvoient à des peurs irrationnelles, donc cela prend des proportions démesurées relayées dans la presse de manière récurrente et sans mise en perspective.

 

Quel est l'impact de cette crise pour les hôteliers ?

Depuis la dernière attaque, nous avons enregistré 16 000 annulations ! Autant dire que cela constitue un désastre pour le tourisme réunionnais.

Or, notre activité constitue un véritable poumon de la Réunion. C'est le seul secteur porteur en termes d'emplois directs ou indirects, capable de sortir le département de son marasme économique dans les prochaines années. Il est donc impératif de rétablir l'image de la Réunion, qui mérite très largement sa place dans le monde du tourisme.

 

Comment les choses s'organisent-elles localement ?

L'IRT [Île de la Réunion Tourisme, NDLR] a l'élaboré un guide de prévention de tous les risques liées aux activités pratiquées : rafting, randonnée, plongée, parapente, etc. C'est un support pédagogique qui permet d'informer les visiteurs, mais aussi une manière de ramener la problématique des attaques de requins à sa juste place.

 

Qu'est ce que l'UHR-Fagiht attend des pouvoirs publics face à cette crise ?

Il est urgent d'accentuer la surveillance. Il existait des miradors d'où l'on guettait la présence de requins sur des zones délimitées. Ces dispositifs ont été retirés un temps jusqu'à la dernière attaque : ils doivent être remis en place et ce, sur toutes les plages ouvertes à la baignade. La mise en place de surveillance par des jet-skis aurait deux avantages : effrayer les squales et avertir les baigneurs de leur éventuelle présence. Il faut également que les plongeurs et apnéistes continuent à occuper l'espace sous-marin, ce qui dérange généralement les squales.

Enfin, la réhabilitation de bassins de baignade doit être entreprise avant la fin de l'année. Il en existe quatre, mais d'autres pourraient être construits.

 

Au-delà de ce problème, quelles mesures pourraient être adoptées pour soutenir l'activité touristique ?

La Réunion souffre d'un déficit de desserte aérienne. Nous demandons depuis longtemps l'ouverture de nouvelles lignes étrangères pour développer notre offre touristique. En période de basse saison, les avions sont remplis par la clientèle affinitaire, ce qui ne laisse que peu d'espace aux touristes d'agrément qui résident dans les hébergements  marchands.

Le tourisme réunionnais ne peut pas vivre que de la clientèle locale. Il faut inciter les résidents d'Europe continentale à venir visiter la Réunion. Nos voisins [île Maurice, Seychelles, NDLR] y sont parvenus depuis des années. Nous devons suivre leur exemple et consolider nos positions en Europe, en Allemagne, Belgique, ou Suisse par exemple. C'est d'autant plus nécessaire que la concurrence dans l'Océan Indien est rude.

 

Dans quel état d'esprit se trouvent les hôteliers réunionnais face à cette situation ?

Nous avons la conviction que notre île est merveilleuse. La Réunion est un terrain de jeux exceptionnel pour des touristes fervents de nature, de sites classés mais aussi pour ceux qui recherchent une hospitalité fondée sur la mixité et dotée d'une gastronomie authentique et bigarrée.

Le classement de l'île au patrimoine mondial de l'Unesco en 2010 prouve bien que la Réunion dispose d'un cadre exceptionnel. Pourtant, cette distinction n'a pas permis d'obtenir des retombées commerciales escomptées. En général, un an après ce type d'annonce, la nombre d'arrivées de touristes augmente de 20 à 30%. Dans notre cas, nous n'avons malheureusement pas noté cette progression. Nous gardons espoir et travaillons avec le parc national et l'IRT à la mise en avant de ce titre et à une labellisation des hébergements qui respecterait une charte liée aux espaces naturels.

L'offre sur place est de grande qualité et répond à tous les types de demandes. Par ailleurs, les hôtels classés de l'île n'ont rien à envier à ceux des îles soeurs. De plus, la Réunion est un département français qui offre  des espaces sécurisés ainsi qu'une couverture sociale et sanitaire équivalente à celle de la métropole, ce qui n'est pas le cas dans d'autres  destinations. Nous avons besoin que ce message soit celui qui l'emporte sur tout autre. C'est ce à quoi l'UHR-Fagiht s'attelle depuis sa création. Et nous continuerons à le porter !



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