“La production et le nettoyage des draps et des serviettes pour l'industrie hôtelière en France génèrent 470 000 tonnes de CO2 chaque année, ce qui représente plus de 10 millions de m3 de consommation d'eau et 15 000 tonnes de détergents”, pointe Hubert Vendeville, fondateur de Betterfly Tourism (conseil et formation en tourisme durable).
Choisir avec soin son linge
Pour alléger cette empreinte environnementale, mieux vaut miser sur des produits de qualité et s’assurer de leur provenance. “Plus la durée de vie du linge est longue, moindre sera l’impact environnemental. Choisir du linge transformé en France permet de réduire drastiquement son impact : en France, l’électricité est moins carbonée qu’en Asie, où les usines ont recours à l’énergie produite par des centrales au charbon”, souligne l’expert.
Afin de limiter le nombre de machines, les hôteliers peuvent opter pour des draps, des couettes ou des serviettes de grammages inférieurs, tout en maintenant la qualité du tissage.
La sélection des matières est elle aussi primordiale, mais délicate. “Le coton est gourmand en eau et en produits phytosanitaires. La microfibre et le polyester relâchent des microplastiques polluants. Le lin, en revanche, peut pousser en France, et sa production est moins impactante”, poursuit Hubert Vendeville. Accor a ainsi fait le choix de matières synthétiques - “plus faciles à sécher”, reconnaît Valérie de Robillard, vice-présidente senior Environnement chez Accor -, recyclées ou certifiées oekotex (label qui contrôle la présence ou non de substances nocives dans le textile). Le groupe Logis Hôtels a adopté des parures de lit 70 % coton, 30 % polyester, avec un effet “froissé chic” : “Cela permet de s’émanciper du repassage”, note son directeur Achats, Stéphane Roinet. Ava Moddabber, country manager France pour Eco-One (conseil et accompagnement en durabilité dans le secteur hôtelier), recommande pour sa part l’usage de coton bio.
Autre piste : le linge écru. “L’étape du blanchiment étant éliminée, moins de produits chimiques sont utilisés pour la production. Les fibres de linge écru ont une durée de vie plus longue. Le linge écru est donc moins consommateur de ressources, d’eau et d’énergie, explique Hubert Vendeville. Mais la communication auprès de la clientèle est fondamentale, sinon le produit pourrait être perçu comme sale ou de piètre qualité.”
Impliquer les clients
Le client qui séjourne à l’hôtel plus d’une nuit est invité, via des messages explicatifs, à réutiliser sa serviette. Une démarche désormais répandue dans le secteur hôtelier… mais pas toujours appliquée. “Parfois, le personnel de nettoyage remplace les serviettes de manière systématique. Il faut vérifier que les clients et les salariés jouent le jeu en comptabilisant le nombre de serviettes par personne accueillie, et établir un ratio mensuel”, observe Hubert Vendeville.
À l’Hôtel & Spa des Gorges du Verdon, les peignoirs sont disponibles sur demande uniquement, contre 3 € symboliques reversés à une association caritative. Résultat : la majorité des clients de ce 4 étoiles ne prend plus de peignoir. Sensibilisation à l’appui, “les retours clients sont très opposés et plutôt générationnels”, analyse la directrice Soizic Bogliorio-Taxil : “Une clientèle plus âgée ne comprend pas cette sur-implication écologique”, alors que “les plus jeunes trouvent que c'est très bien, et qu’effectivement les peignoirs ne sont pas forcément utiles”.
Étudier sa blanchisserie à la loupe…
“Le nettoyage représente entre 25 et 30 % de l’impact du linge en émissions de CO2”, rappelle Hubert Vendeville. Dans l’idéal, le prestataire doit donc être situé à proximité de l’hôtel, adopter des moyens de transport peu polluants et former ses chauffeurs à l’écoconduite. Il faut s’assurer de la durée de vie du linge et de la consommation d’eau, d’énergie et de produits lessiviels par kilo de linge. Les produits lessiviels doivent être écolabellisés, les machines dotées de filtres à microplastiques… Mais ces données sont souvent difficiles à récolter. “Les blanchisseries sont opaques”, déplore Ava Moddabber.
…ou internaliser le nettoyage
Le groupe Logis Hotels, dont la majorité des établissements sont de petite taille (20-25 chambres) et situés à la campagne, a décidé de réinternaliser le service de blanchisserie. “Parfois, les blanchisseries se trouvent à une centaine de kilomètres de nos hôtels. Nos établissements adoptent des machines professionnelles moins gourmandes en eau et électricité, on automatise les programmes entre 40 et 60 degrés, et on respecte le bon dosage de produits lessiviels. La durée de vie du linge est optimisée de 15 à 20 % par rapport à la blanchisserie, car le linge s’abime moins vite sans transports, et on devient maître de nos choix pour les matières”, constate Stéphane Roinet. Pour aller encore plus loin, “les machines peuvent même être alimentées par des panneaux solaires ou de l’énergie verte”, enchérit Ava Moddabber.
Recycler
Enfin, une fois que le cycle de vie du linge est achevé, privilégiez l’économie circulaire et le recyclage.
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Publié par Violaine BRISSART