Fraises des bois et poivron rouge, panais et
mandarine, chocolat et fenouil, soufflé à l'avocat… Les légumes en dessert, une
nouvelle tendance ? "Ce n'est pas nouveau", tranche la
journaliste culinaire Estérelle Payani, auteur de L'Encyclopédie de la cuisine végétarienne (éditions Flammarion). "Dans la région de Nice, on a toujours
cuisiné une tourte aux blettes sucrée.
Dans les années 1980, Guy Martin a
été l'un des premiers chefs étoilés à travailler le légume en dessert avec une
glace aux petits pois." Mais comme toute mode qui se respecte, elle
s'en est allée avant de revenir. En 2007, Pierre
Hermé imaginait un gâteau tomate, fraises, mascarpone à l'huile d'olive et
olives noires. En 2012, Julie Andrieu
publiait Les Insolites de Julie, 30
recettes de desserts aux légumes (Éditions culinaires). Depuis, et
davantage encore ces derniers mois, les légumes ont la cote auprès des
pâtissiers, d'autant qu'ils rejoignent une autre tendance, celle des desserts moins
sucrés. "Dans les fruits, il y a souvent beaucoup de sucre, alors que les
légumes apportent d'autres éléments intéressants, tantôt de l'amertume, de la
fraîcheur", analyse Stéphane Corolleur, le chef-pâtissier
du Restaurant Michel Sarran à
Toulouse, 2 étoiles Michelin. On
a récemment pu voir sa déclinaison du dessert céleri-pomme dans l'émission Top
Chef sur M6. Les légumes en dessert sont devenus sa signature culinaire et
permettent en outre de donner un fil conducteur au repas. "Cela permet aussi de casser
les codes, d'apporter un effet de surprise autour d'éléments que l'on retrouve
traditionnellement en dessert type fruit ou chocolat, poursuit-il. Le
panais apporte des notes d'épices, l'artichaut se marie très bien avec le
fromage blanc et j'utilise aussi la roquette pour son côté racé et frais qui
vient structurer un dessert autour des fruits rouges."
Asperges et concombre
"Au début, les légumes ont été utilisés dans une logique de remplacement
avec des légumes naturellement doux et sucrés comme la carotte ou la betterave, raconte Estérelle Payani. Ce qui change, c'est qu'aujourd'hui, on va de
plus en plus loin dans les légumes 'hardos' !" Le topinambour a par
exemple inspiré à David Toutain l'une de ses créations signature, le Topinambour
confit au pralin, chips d'épluchures de topinambour et glace au lait. À Lyon, Gaëtan Gentil, chef du Prairial (1 étoile Michelin), est un adepte du végétal en
dessert et travaille par exemple l'asperge en glace, avec une chantilly à la
cardamome et pamplemousse, ou le concombre en sorbet avec rhubarbe et meringue
à la rose. Prisés pour leur texture ou pour leur goût, les légumes sont
finalement une source inépuisable d'inspiration aussi bien salée que sucrée.
Publié par Julie GERBET