"Je suis une maniaque des détails." L'architecte d'intérieur Sybille de Margerie assume ce souci permanent de la perfection. De l'exception. C'est ainsi qu'au Mandarin Oriental à Paris (Ier), elle a customisé la housse de chaque sèche-cheveux à la tonalité de la chambre où il se trouve. Pour l'hôtel Cheval Blanc de Courchevel (Savoie), elle a imaginé un dressing d'entrée, "avec sa rigole en bronze", pour mettre les vêtements et chaussures mouillés au retour du ski. "Je ne cherche pas à laisser mon empreinte partout où je passe. Je cherche plutôt à révéler, à travers le design, l'âme propre et l'unicité d'un lieu", explique-t-elle.
Depuis 1989, son agence - aujourd'hui basée à Paris, Florence et Dubaï - privilégie le sur mesure. Chez les particuliers, comme dans l'hôtellerie de luxe. Outre le Mandarin Oriental parisien et le Cheval Blanc à Courchevel, on lui doit notamment l'Old and New Cataract à Assouan, l'Hôtel D à Strasbourg, The Grand à Amsterdam… D'ici à 2017, elle aura réalisé Le Barthélemy, boutique-hôtel et spa de luxe à Saint-Barthélemy, l'Hôtel Royal Champagne à Champillon (Marne), le Park Hyatt de Marrakech ou encore les parties communes et espaces résidentiels du futur Resort & Residences Royal Atlantis, à Dubaï. "Aujourd'hui, lorsque l'on séjourne dans un hôtel de luxe, on n'en retient que ce que l'on n'a pas fait ailleurs, poursuit-elle. Il faut donc surprendre la clientèle." De quelle façon ? "En étant créatif, avec simplicité. En modernisant la tradition. En donnant du charme à la technologie, partant du principe que celle-ci doit être instinctive, facile à utiliser." À cela s'ajoute une élégance des couleurs, une harmonie des formes, des espaces, des volumes, une obsession pour les fonctionnalités et le confort. Sans pour autant jouer la carte de la standardisation. Loin de là. "Chaque projet est une nouvelle page blanche", dit-elle. Car chaque destination, chaque ville, chaque bâtiment a "sa propre identité, son artisanat, ses tonalités, ses lumières, ses matières". L'architecte d'intérieur compare l'hôtellerie de luxe à "un laboratoire", "où l'on essaie tout le temps de se renouveler, d'avoir un regard curieux sur les choses, de s'adapter aux nouveaux comportements". Et ce, en dépit des contraintes liées aux normes et aux réglementations qui varient d'un pays à un autre.
"Une dimension immatérielle liée à une expérience vécue"
"Le projet d'un hôtel doit se faire avec les opérateurs [l'équipe projet, NDLR], mais sans les opérationnels, nuance toutefois Sybille de Margerie. Car s'ils savent gérer et diriger un établissement, ils ne peuvent pas en dessiner ni les contours, ni un intérieur. À chacun son métier." En revanche, elle a bien conscience que l'esprit d'un hôtel, une fois construit ou rénové, "doit être compris par l'hôtelier". Autrement dit : il doit pouvoir se l'approprier, vite. L'incarner, d'emblée. "Quitte à ce que nous expliquions notre travail au personnel, aux équipes, comme nous l'avons fait avant l'ouverture du Mandarin Oriental à Paris." Et ce d'autant qu'à un certain niveau d'offre, ce n'est plus la qualité de la literie qui va faire la différence, ni celle des technologies proposées en chambre. Sybille de Margerie parle de "dimension immatérielle", liée à des émotions et "une expérience vécue" : "une expérience globale où tout doit être en harmonie : des tissus au choix d'un papier à en-tête, en passant par un parfum d'intérieur". D'ailleurs, elle dessine désormais du mobilier sur mesure, des pièces exclusives. Elle vient même de créer une eau d'intérieur, qui mêle "notes d'angélique poudrée et d'immortelle aux accords d'anis, d'ambre et de vanille". "Un parfum à son image", dit-on.
Publié par Anne EVEILLARD
lundi 8 février 2016