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du 9 mars 2006
JURIDIQUE

Le conseil des prud'hommes sanctionne une rupture manifestement abusive

Le contrat nouvelles embauches (CNE) devant les tribunaux

L'affaire a fait grand bruit : un employeur a été condamné à verser des dommages-intérêts pour rupture abusive d'un 'contrat nouvelles embauches'. D'aucuns ont conclu trop vite à la remise en cause de ce nouveau contrat. Mais le jugement des prud'hommes de Longjumeau (91) ne fait que sanctionner une utilisation abusive de ce contrat. Explications.

Le contrat nouvelles embauches (CNE) a été présenté par le gouvernement comme un contrat permettant aux employeurs d'adapter leur recrutement à leur activité économique, en leur permettant une rupture simplifiée dudit contrat. Mais la flexibilité de ce dernier ne doit pas servir à précariser la situation d'un salarié en éludant le droit du licenciement.

Un même salarié embauché en CDI puis en CNE
M. P. P. a été embauché en tant que contrôleur technique automobile par contrat à durée indéterminée en date du 21 mai 2005. Il a pris ses fonctions après agrément préfectoral le 7 juin 2005. Son contrat prévoyait une période d'essai de 1 mois renouvelable. Celle-ci a été renouvelée par son employeur le 6 juillet 2005. Le 6 août, l'employeur notifiait à son salarié par lettre remise en main propre contre décharge la rupture de la période d'essai de son contrat à durée indéterminée. Le jour même - soit le 6 août -, le salarié était embauché dans une autre société, toujours pour le même poste de contrôleur technique mais avec un contrat nouvelles embauches. Puis le 30 août, l'employeur notifiait à son salarié par lettre remise en main propre la rupture de son contrat en cours de période de consolidation. Dans cette affaire, il a été montré les liens étroits entre les 2 sociétés dans la mesure où le gérant qui avait rompu le CDI de ce salarié avait ensuite rompu le contrat nouvelles embauches mais en tant que directeur commercial.

Rupture du contrat à durée indéterminée…
Premier contrat conclu en CDI et premier abus. Le tribunal rappelle que la période d'essai est destinée à permettre aux cocontractants d'évaluer les capacités professionnelles du salarié et les conditions de travail dans l'entreprise. Et de justifier à l'appui de son argumentation que "la Cour de cassation a pu préciser que le caractère prématuré ou tardif de la rupture de la période d'essai est un élément d'appréciation d'un abus de la part de l'auteur de la rupture". Dans cette affaire le juge constate que la première période d'essai du salarié a été renouvelée le 6 juillet, soit le dernier jour de celle-ci. À l'issue de ce renouvellement pour un autre mois, là encore, la période d'essai sera rompue le dernier jour, soit le 6 août.
Pour le tribunal, ces éléments font présumer l'abus de l'employeur dans l'utilisation de son droit au renouvellement et de son droit à la rupture de la période d'essai.
Le conseil considère que la rupture de la période d'essai est abusive, car elle n'avait pas pour motif le manque de compétences du salarié, mais était destinée à éluder l'application du droit protecteur du licenciement par le recours au CNE au sein d'un proche partenaire de l'employeur.
D'autant que, précise le conseil, dans la mesure où ces 2 sociétés étaient étroitement liées, il n'était pas concevable que le salarié qui n'aurait pas montré ses compétences techniques dans la première société soit embauché au même poste dans la seconde.

… puis conclusion et rupture du CNE
Le conseil rappelle que le contrat nouvelles embauches est destiné, d'après le rapport présenté au président de la République, à rassurer les chefs d'entreprise ayant des difficultés à anticiper l'évolution de la conjoncture économique ou à apprécier les qualités du salarié. Et les juges d'ajouter que le contrat est destiné - comme son nom l'indique - à favoriser de nouvelles embauches. Qu'il ne peut être utilisé dans le seul but de précariser la situation d'un salarié et d'éluder le droit du licenciement. /font>
Et d'insister que l'utilisation de cette forme contractuelle n'est en aucun cas justifiée par l'intérêt de l'employeur, qui pouvait avoir recours au CDI de droit commun, ou si besoin, au CDD de remplacement de salariés en congé pendant le mois d'août.
Dernière erreur de l'employeur : la rupture de la période de consolidation a été faite par lettre remise en main propre contre décharge alors que les textes - et plus précisément l'article 2 de l'ordonnance du 2 août 2005 - imposent que cette rupture soit notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Le montant de l'indemnisation
Le conseil a jugé qu'il s'agissait d'un licenciement abusif en raison de la rupture abusive de la période d'essai ainsi que de la période de consolidation, dont le montant des dommages-intérêts doit se calculer conformément à l'article L.122-14-5 du Code du travail. S'agissant d'un salarié qui a moins de 2 ans d'ancienneté et qui travaillait dans une entreprise de moins de 11 salariés, les dommages-intérêts sont calculés par les juges en fonction du préjudice subi. Les 2 employeurs seront respectivement condamnés à verser 8 220 E (ce qui représente un peu plus de 7 mois de salaire du salarié) pour rupture abusive du contrat. À ce titre, le salarié percevra une somme totale de 16 440 E.
Ils ont également été condamnés à verser 92,75 E au titre de l'indemnité de rupture de 8 %, sans compter les 23,19 E au titre de la contribution Assedic qui représente 2 %, ainsi que 500 E au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Pascale Carbillet zzz60c

Comment utiliser le CNE sans souci ?

Dans le sujet interactif La pratique du droit du travail en CHR : tous les contrats de travail, vous trouverez un chapitre entier consacré au contrat nouvelles embauches avec mode d'emploi et modèle, mais surtout des questions-réponses proposées par le ministère de l'Emploi qui répond aux principales interrogations des employeurs et des salariés sur ce nouveau contrat.
Vous pouvez consulter et vous abonnez aux sujets interactifs sur la page d'accueil de notre site www.lhotellerie.fr

Complément d'article 2967p11
Retrouvez la décision intégrale du conseil des prud'hommes de Longjumeau (91) du 20 février 2006 en cliquant sur ce lien

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