du 9 mars 2006 |
L'ÉVÉNEMENT |
Face à la crise du moustique 'chik'
LE TOURISME RÉUNIONNAIS TENTE DE LUTTER CONTRE LA DÉSAFFECTION DES TOURISTES
Le virus du Chikungunya fait rage sur l'île de La Réunion. De quoi mettre à terre les professionnels du tourisme qui voient leurs réservations fondre comme neige au soleil. Ces derniers demeurent actifs et évoquent déjà la relance de demain.
D'après différentes sources concordantes,
une petite quarantaine de touristes seulement a été touchée par le
virus.
La Réunion plus forte que le Chik." Voilà le slogan qui va s'afficher d'ici à quelques jours sur les tee-shirts d'un grand nombre de commerçants et autres salariés d'entreprise de tourisme à travers l'île de La Réunion. Lancée à l'initiative du Medef, l'opération ne manque pas d'humour. Encore moins de courage connaissant la situation dans laquelle se trouve aujourd'hui l'île. Bien sûr, elle vise d'une part à rassurer les vacanciers effrayés par le virus du Chikungunya. "Il faut impérativement réagir. Parce que les médias n'y sont vraiment pas allés de mainmorte ces derniers temps à notre égard. Certains ayant poussé le bouchon jusqu'à écrire que nous manquions de cercueils", confie un restaurateur scandalisé par ces procédés. D'autre part, il s'agit de remonter au plus vite le moral des insulaires qui - avouons-le - font l'objet d'une crise sans précédent. D'ailleurs, ce n'est pas un hasard si Dominique de Villepin s'est rendu lui-même sur place fin février. "Inutile de se voiler la face : l'île affronte indiscutablement une véritable épidémie", avoue sans détour Philippe Doki-Thonon, président de l'Umih 974. Une épidémie qui, d'après différentes sources, aurait déjà fait 186 000 malades avec 93 décès directs ou indirects.
De quoi évidemment déstabiliser l'activité de ce département d'outre-mer, dont le tissu économique est constitué à 80 % de TPE. Donc, de sociétés très fragiles. En particulier dans le secteur du tourisme qui génère des recettes annuelles de l'ordre de 360 ME et concentre 10 000 emplois directs. "On ne va pas tourner autour du pot : nos affaires sont complètement par terre. Autre élément très difficile à vivre, nous avons chacun des membres de nos familles touchés par le virus", confie Jean-Paul Bordier, président du Club de la grande hôtellerie de la Réunion (28 hôtels). Et de poursuivre :"Concrètement, nous avons déjà enregistré 26 000 annulations depuis le mois de janvier. Et la situation va empirer dans les mois qui viennent."
Très peu de touristes infectés
En effet, beaucoup de professionnels du tourisme estiment que le pire reste à venir. "Les carnets de commande sont complètement vides pour les prochains mois. Certains établissements, dont l'activité dépend essentiellement du tourisme, ont fermé ou envisagent des fermetures provisoires au cours des prochaines semaines", indique le président de l'Umih. "La situation est très préoccupante et les conséquences de l'épidémie sont évidemment très lourdes pour les professionnels du tourisme", surenchérit Christian Mantéi, patron d'Odit France.
Un avis partagé également par le Ceto, association des tour-opérateurs français, qui constate aujourd'hui le report massif des départs des vacanciers vers d'autres destinations. À la tête de 3 établissements sur l'île, le groupe Accor admet aussi constater plusieurs annulations.
Et pourtant ! À l'heure actuelle, d'après différentes sources d'informations concordantes, une petite quarantaine de touristes seulement a été touchée par le virus. "Et pour cause. Ces derniers se protègent davantage que les habitants de l'île. Ajoutons que nous fournissons des répulsifs à tous nos clients et démoustiquons nos hôtels comme il se
doit", rappelle Jean-Paul Bordier. De fait, loin de rester inactifs, les professionnels du tourisme - notamment les hébergeurs - ont mis très vite en place une charte rappelant les mesures de prévention et actions entreprises par leurs soins pour éviter la propagation du virus Chikungunya.
Au Salon International de l'Agriculture, les exposants réunionnais ne manquaient pas non plus de rassurer les vacanciers de demain. "D'autant qu'après tout, ce n'est pas l'enfer à La Réunion contrairement à ce que décrivent certains journaux. Il suffit de se protéger avec des tee-shirts à manches longues, des pantalons et de s'asperger d'anti-moutisque. Et puis le risque zéro n'existe pas", raconte un hôtelier souhaitant garder l'anonymat. /font>
Espoir dans le plan de sauvetage de l'état
Certes. En attendant, le tourisme réunionnais a bel et bien été piqué au vif. Reste maintenant à inverser la tendance. Ce qui en l'occurrence relève de l'exploit compte tenu de la psychose qui s'est installée dans l'esprit de maints et maints voyageurs. Les professionnels du secteur n'en demeurent pas moins combatifs. À commencer par le Comité du tourisme de La Réunion (CTR) qui a récemment fait appel à Leo Corporate, cabinet-conseil en stratégie d'informations du groupe Leo Burnett. L'objectif de la démarche vise entre autre à ce que les tour-opérateurs ne "rayent pas La Réunion de leurs catalogues" et lutter contre la désaffection des touristes.
Parallèlement à l'action menée avec le Medef - "La Réunion plus forte que le Chik" -, une autre opération est également engagée en partenariat avec l'association Puissance XV à l'occasion du prochain match de rugby France-Angleterre . "1 000 supporters arboreront un tee-shirt spécifique. Les joueurs devraient le porter aussi durant leur entraînement", note le président de l'UMIH. Sans oublier une vigilance de tous les instants concernant les opérations de démoustification. "Il va falloir que les autorités aient le courage d'éradiquer le vecteur du virus. Tant que cela n'aura pas été fait, le tourisme ne repartira pas", estime Jean-Paul Bordier.
D'ici là, le secteur touristique espère que le plan promis par Dominique de Villepin (76 ME dont 60 ME pour l'économie réunionnaise) pourra les aider à garder la tête hors de l'eau. Léon Bertrand, ministre délégué au Tourisme, a d'ores et déjà annoncé une série de mesures non négligeables telles la mise en œuvre de moratoires sur les dettes sociales et fiscales, la prise en charge de la rémunération minimale jusqu'à 100 % en matière de chômage partiel ou bien encore la création d'un fonds d'aide exceptionnelle pour les entreprises du secteur.
À noter également la mise
sur pied de manière immédiate de l'observatoire de tourisme réunionnais.
Et dans l'avenir : le lancement d'une campagne d'image et de promotion auprès
des marchés français et étrangers via Maison de la France ; l'étude
d'aide spécifique portant sur la garantie des avances et prêts bancaires
et la formation des acteurs du tourisme. Sur ce dernier point, l'Umih 974 a mis
les bouchées doubles. La preuve. L'organisation syndicale a récemment
signé un accord cadre avec l'État, la Direction du travail, de l'emploi
et de la formation professionnelle, la Région et les organismes paritaires
collecteurs. "Il s'agit de promouvoir la formation professionnelle des salariés
de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme, comme action d'accompagnement
au chômage technique partiel", souligne Philippe Doki-Thonon.
Claire
Cosson zzz99 zzz70 zzz16
Il va falloir que les autorités aient le courage d'éradiquer
le vecteur du virus. Tant que cela n'aura pas été fait, le tourisme ne
repartira pas.
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L'Hôtellerie Restauration n° 2967 Hebdo 9 mars 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE