du 30 mars 2006 |
VIE PROFESSIONNELLE |
JUGÉE "DÉMAGOGIQUE, IRRÉALISTE ET DANGEREUSE" POUR CERTAINS
FAUT-IL UNE TVA à 5,5 % DANS LA RESTAURATION ?
À l'occasion d'un petit-déjeuner européen organisé par le Centre des études européennes de Strasbourg, l'Euro Info Centre et le Sofitel à Strasbourg, Pervenche Berès, député européenne, a débattu sur la question d'un taux réduit de TVA dans le secteur de la restauration avec notamment Robert Sengel, président des hôteliers-restaurateurs et débitants de boissons du Bas-Rhin, et Dany Deleval, vice-présidente des restaurateurs de l'Umih.
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Sceptique
sur l'efficacité de cette mesure, Pervenche Berès dénonce une
proposition qu'elle qualifie de "démagogique, irréaliste et dangereuse"
:
Démagogique, parce que, s'il est évident
que tout le monde est d'accord pour payer moins, qu'il s'agisse des restaurateurs
français, allemands, suédois ou de tout autre profession, comment les
États membres financeraient-ils alors leurs systèmes sociaux ?
Irréaliste dans la mesure
où, en matière de TVA, l'unanimité est requise au Conseil. Et comment
imaginer qu'Angela Merkel, nouvelle chancelière allemande élue sur un
projet d'augmentation de la TVA de 3 points, puisse accepter cette proposition française
?
Dangereuse, parce que, dans
une Europe à 25, monopoliser la voix de la France sur cette question, alors
que se jouent, au même moment, au Conseil européen, les perspectives
financières de l'Europe pour 2007-2013, c'est oublier une partie de l'intérêt
général, en particulier, donner à l'Europe les moyens de ses actions
! Des règles communes sont nécessaires pour garantir le fonctionnement
effectif du marché intérieur dans l'Union européenne. L'harmonisation,
même partielle de la TVA, en fait partie. Ainsi, le droit communautaire prévoit
que le taux de TVA est fixé librement par les États à l'intérieur
de certaines fourchettes (entre 15 et 25 % pour le taux 'normal', entre 5 et 9 %
pour le taux 'réduit'). Et c'est précisément ce qui permet de limiter
le dumping fiscal.
En quoi le taux réduit
pour la restauration entraverait-il le marché intérieur ?
Pourtant, Robert Sengel,
président des hôteliers-restaurateurs et débitants de boissons du
Bas-Rhin, se demande en quoi un taux réduit de TVA dans la restauration 'entraverait-il'
le fonctionnement du marché intérieur.
Pervenche Berès estime
que, même si cette mesure n'a effectivement pas d'effet direct sur le marché
intérieur, on ne peut pas demander l'harmonisation fiscale afin de faciliter
les échanges de marchandises et de services entre États et, dans le
même temps, démanteler le système existant en multipliant les dérogations.
Par ailleurs, il existerait d'autres
moyens juridiques de fixer un taux réduit de TVA dans la restauration : en
proposant un taux réduit à l'intérieur de la marge 'normale' de
15 à 25 %, ou en révisant l'annexe État K et en substituant la
restauration à un autre secteur "à
forte
densité de main-d'oeuvre". De tels instruments existent et permettraient au
secteur de la restauration de bénéficier d'un taux de TVA réduit
sans pour autant remettre en cause la règle commune.
Ne doit-on pas laisser la
liberté aux États de fixer certains taux ?
Est-il vraiment nécessaire
que ce type de questions, appliquées à un secteur pour lequel l'impact
sur le marché intérieur est faible, soit traité au niveau européen,
s'interroge Dany Deleval, vice-présidente des restaurateurs de l'Umih. Ne devrait-on
pas plutôt, en vertu du principe de subsidiarité, laisser chaque État
déterminer librement le taux de TVA applicable dans certains secteurs ?
Pour Pervenche Berès, la
subsidiarité n'est pas là, et si on laissait effectivement chaque État
régler ses histoires de TVA de son côté, que dirait-on aux entreprises
lorsque, par exemple, l'Allemagne ou tout autre État aurait fixé un
impôt sur les sociétés à 0 % ou une TVA à taux ultra-réduit
sur tous les secteurs ?
EEn France, le débat sur les problèmes
auxquels est confronté le secteur de la restauration s'est cristallisé
sur la seule question de la TVA… stigmatisant l'Europe comme empêchant
tout un secteur de fonctionner. Mais des solutions portant sur d'autres aspects
(poids des charges sociales par exemple) pourraient être mises en oeuvre au
niveau national.
Cécile Coyer
de l'Euro Info Centre de la CCI de Strasbourg
zzz99
Pour en savoir plus : www.strasbourg.cci.fr/eic
Les Petits-déjeuners européens
Organisés par le Centre des études
européennes de Strasbourg, l'Euro Info Centre de la CCI de Strasbourg
et du Bas-Rhin, et le Sofitel sont l'occasion de débattre, 8 fois par an, de
manière ouverte et informelle avec un parlementaire européen sur l'actualité
communautaire. Au programme des prochains Petits-déjeuners : le 7e Programme
cadre de recherche et développement (PCRD), l'évolution de la directive
sur les services dite directive 'Bolkestein', bilan de la présidence autrichienne
de l'Union et perspectives d'avenir…
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L'Hôtellerie Restauration n° 2970 Hebdo 30 mars 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE