du 30 mars 2006 |
ÉDITO |
Le bruit et l'image
Avant
toute décision grave, les hommes politiques devraient relire dans La République
de Platon le fameux dialogue de la caverne entre Glaucon et Socrate. Ils se souviendraient
que seule la lumière est capable de guider l'intelligence de l'homme,
alors que la pente naturelle de ce dernier le pousse à demeurer dans l'ombre
confortable des ténèbres. Bref, pour poursuivre les allusions à
la sagesse antique, nous préférons aujourd'hui trop souvent rester le
'valet de charrue' d'Homère plutôt que d'affronter les périples
de l'Odyssée.
C'est du moins l'impression fortement perçue, particulièrement
à l'étranger, d'un peuple accroché à des privilèges
d'un autre âge qui, comme tout privilège, ne profitent qu'à une
minorité bien décidée à maintenir le statu quo envers et contre
tout.
Revenons à la situation tendue d'aujourd'hui. Dans un livre
prémonitoire (Le cri de la Gargouille), Dominique de Villepin écrivit
naguère : "Le pouvoir doute, le citoyen s'inquiète et l'autorité
faiblit quand la rue devient le lieu d'expression de toutes les contestations…
L'épreuve de force tourne presque toujours en faveur des manifestants parce
qu'ils sont le bruit, l'image, le nombre visible, la couleur et la vie contre le
silence gris des conseillers et des courtisans."
Voilà de saines réflexions qui ne serviront sans doute pas
à grand-chose pour sauver les actuelles tentatives de réforme du marché
du travail face au flot de démagogie, de complaisance médiatique, de surenchère
de syndicats trop heureux de se refaire une santé défaillante à
bon compte, sans oublier le traditionnel aveuglement d'une foule dont la capacité
d'analyse est inversement proportionnelle au volume sonore de ses slogans.
Certes, toute décision gouvernementale est susceptible, en
bonne démocratie, de provoquer le débat, et il est évident que les
pistes ouvertes pour tenter de juguler le cancer du chômage sont loin de faire
l'unanimité. Mais contrairement au fatalisme de naguère ("contre le
chômage, on a tout essayé", soupirait le président Mitterrand),
il serait peut-être utile de laisser le temps de l'expérimentation aux
propositions gouvernementales, à moins de s'enfermer dans des arrière-pensées
politiciennes qui font fi de l'intérêt général.
Et c'est précisément parce que la profession, loin de
jouer la carte du pourrissement, poursuit envers et contre tout sa stratégie
de création et de développement qu'il faut avec espoir garder. À
condition que l'attention ne reste pas exclusivement focalisée sur ceux qui
"sont le bruit et l'image". Comme vous le lirez dans ce numéro de L'Hôtellerie
Restauration, des lauréats
des Palmes du Leaders Club aux élèves vainqueurs du Championnat de France
du Dessert et tous les autres, ils méritent considération et respect.
L.
H. zzz80
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L'Hôtellerie Restauration n° 2970 Hebdo 30 mars 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE