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du 20 avril 2006
L'ÉVÉNEMENT

RENCONTRE AVEC LE DÉPUTÉ THIERRY MARIANI

Le permis d'exploitation, véritable "CPE des CHR"

Bientôt en place, le permis d'exploitation concerne les licences 2, 3, 4 et restaurant. Thierry Mariani, député UMP du Vaucluse et président du Groupe d'études sur les métiers de l'hôtellerie, de la restauration et des loisirs à l'Assemblée nationale, qui a défendu le dossier, fait le point en exclusivité pour les lecteurs de L'Hôtellerie Restauration.
Propos recueillis par Sylvie Soubes


Thierry Mariani : "Le permis d'exploitation sera pour les professionnels, je le répète, un moyen pratique qui peut éviter les fermetures administratives, un moyen pour savoir comment se défendre."

L'Hôtellerie Restauration : La profession espère beaucoup de ce permis d'exploitation. Pouvez-vous nous en rappeler l'esprit et les objectifs ?
Thierry Mariani : Le permis d'exploitation existe désormais dans l'article 23 de la loi relative à l'égalité des chances du 31 mars 2006, la 'fameuse' loi où était envisagée la création du CPE. J'ai voulu répondre à une demande forte du secteur de l'hôtellerie et de la restauration. Le texte adopté reprend mot pour mot la proposition de loi déposée par mes soins le 15 octobre 2003, et améliorée suite à de larges concertations avec les syndicats du secteur, l'Umih et le Synhorcat notamment. Ce texte avait déjà été adopté à l'unanimité le 26 février 2004 dans le cadre du projet de loi relatif aux responsabilités locales, et ce n'est qu'en raison de l'obstruction parlementaire de l'opposition lors de la 2e lecture de ce texte que mon amendement n'avait pas été retenu lors de l'utilisation de l'article 49, alinéa 3, de la constitution. Cette fois-ci, mon amendement a pu aller jusqu'au bout de la procédure parlementaire et devenir réalité. C'est l'aboutissement de plus de 2 ans de travail du Groupe d'études sur les métiers de l'hôtellerie, de la restauration et des loisirs que je préside à l'Assemblée.

Concrètement, en quoi va-t-il consister ?
Le permis d'exploitation est en fait une attestation de participation à une formation faite pas les syndicats du secteur. Cette formation doit permettre aux exploitants de débits de boissons de connaître toutes les législations qui leur sont applicables. Ce permis sera valable 10 ans. La plupart des pays européens ont depuis longtemps un système identique. Ainsi, en 3 jours environ, les futurs exploitants apprendront la législation relative à la prévention et la lutte contre l'alcoolisme, la protection des mineurs et la répression de l'ivresse publique, mais aussi de la législation sur les stupéfiants, la revente de tabac, la lutte contre le bruit, les faits susceptibles d'entraîner une fermeture administrative, les principes généraux de la responsabilité civile et pénale des personnes physiques et des personnes morales, et la lutte contre la discrimination. Pour moi, il convenait d'inverser la logique en matière de responsabilité des débitants de boissons. En effet, je préfère informer que sanctionner. Aujourd'hui, les débitants de boissons sont souvent sanctionnés par des fermetures administratives, parfois abusives. Pourtant, ils sont, de fait, dans l'incapacité de connaître toutes les législations et réglementations diverses qui leur sont applicables. C'est pourquoi ce permis leur permettra de connaître, enfin, toutes ces informations légales et réglementaires pour mieux se défendre. Par exemple, dans la même loi sur l'égalité des chances, le gouvernement a choisi de renforcer la législation relative aux discriminations. Il a décidé d'autoriser les victimes et les associations à recourir au 'testing' à l'entrée des lieux publics, qu'il s'agisse de boîtes de nuit, de bars à vins ou de restaurants. Un exploitant doit connaître ces
nouvelles règles du jeu qui, en cas de non-respect, peuvent entraîner la fermeture pour plusieurs mois de son exploitation. Le permis d'exploitation sera pour les professionnels, je le répète, un moyen pratique qui peut éviter les fermetures administratives, un moyen pour savoir comment se défendre.

Qu'est-ce qui vous a fait vous investir plus particulièrement dans ce dossier ?
Quand j'étais maire, j'ai vu plusieurs personnes, qui avaient mis toutes leurs économies dans l'achat d'un bar, ruinées à cause de fermetures administratives qu'elles auraient pu éviter si elles avaient eu connaissance à temps de certaines lois. Je ne veux plus voir ça ! Plutôt que d'être toujours dans la logique de sanction de l'exploitant, il me paraissait important de les informer de l'étendue de leurs obligations, mais aussi de leurs droits. Il ne faut en effet pas oublier que les métiers de l'hôtellerie et de la restauration sont les seuls où n'importe qui peut s'établir sans qualification professionnelle particulière. Une ancienne agricultrice, un ancien maçon et même un ancien député, peut ouvrir demain un débit de boissons. Sans formation, pensez-vous qu'ils seront bien armés pour réussir ?
Il me paraissait important d'accompagner les organisations représentatives du secteur dans leur démarche de valorisation des compétences professionnelles du secteur. Comme pour la réforme des fermetures administratives que j'ai fait adopter dans la loi Sarkozy du 12 mars 2003, j'ai été saisi de ce projet en tant que président du Groupe
d'études sur les métiers de la restauration, de l'hôtellerie et des loisirs par André Daguin, président de l'Umih. Ensemble, nous avons élaboré une première proposition, auditionné les autres syndicats, puis nous avons présenté un texte accepté par toutes les organisations syndicales.

Quel est, aujourd'hui, le calendrier de sa mise en route ? Que reste-t-il à mettre en place ?
Le permis d'exploitation nécessite encore un décret d'application pour devenir réalité, et ce décret devra obligatoirement être publié au plus tard un an après la promulgation de la loi du 31 mars 2006. Ce décret précisera notamment le programme détaillé de cette formation, ainsi que les conditions dans lesquelles seront agréés les organismes de formation qui ne pourront être mis en place que par les syndicats professionnels nationaux représentatifs du secteur de l'hôtellerie, de la restauration, des cafés et discothèques. Ce décret devrait donc sortir avant le 1er avril 2007, date à laquelle tous ceux qui déclareront l'ouverture, la mutation, la translation ou le transfert d'un débit de boissons devront obtenir le permis d'exploitation. En revanche, les personnes qui déclareront des licences restaurant ne seront concernées qu'à compter du 1er avril 2009,
3 ans après la publication de la loi du
31 mars 2006.

Le permis d'exploitation ne sera donc pas obligatoire tout de suite pour tout le monde.
En effet, il faut être réaliste et pratique. Mieux vaut se hâter lentement et se donner le temps du dialogue pour que l'administration, en relation étroite avec les syndicats du secteur - et j'y tiens -, élabore un programme utile aux professionnels. C'est pourquoi nous avons choisi de rendre obligatoire le permis d'exploitation, d'abord pour les nouveaux débitants de boissons, puis pour les nouveaux restaurateurs, et, au fil du temps, tous ceux qui changeront d'établissement devront aussi passer ce permis d'exploitation. Les cafetiers qui auront ouvert avant le 1er avril 2007 et les restaurateurs qui auront ouvert avant le 1er avril 2009 et qui n'envisagent pas de changer d'établissement ne sont pas concernés par cette mesure. Ce permis d'exploitation est l'occasion d'améliorer la relation de confiance entre les restaurateurs, les clients et l'administration. Je suis persuadé que le secteur de l'hôtellerie, de la restauration, des cafés et discothèques a un grand avenir, mais on ne peut plus être cafetier ou restaurateur au XXIe siècle, comme il y a 50 ans, et, dans l'intérêt de tous, il me semble essentiel que chacun soit mieux informé de l'étendue de ses droits et devoirs. zzz74v

Complément d’article 2973p4

Article 23 loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances

I - Après l’article L. 3332-1 du Code de la santé publique, il est inséré un article L. 3332-1-1 ainsi rédigé :
“Art. L. 3332-1-1. - Une formation spécifique sur les droits et obligations attachés à l’exploitation d’un débit de boissons ou d’un établissement pourvu de la petite licence restaurant ou de la licence restaurant est dispensée, par des organismes agréés par arrêté du ministre de l’intérieur et mis en place par les syndicats professionnels nationaux représentatifs du secteur de l’hôtellerie, de la restauration, des cafés et discothèques, à toute personne déclarant l’ouverture, la mutation, la translation ou le transfert d’un débit de boissons à consommer sur place de deuxième, troisième et quatrième catégories ou à toute personne déclarant un établissement pourvu de la petite licence restaurant ou de la licence restaurant.
“A l’issue de cette formation, les personnes visées à l’alinéa précédent doivent avoir une connaissance notamment des dispositions du présent code relatives à la prévention et la lutte contre l’alcoolisme, la protection des mineurs et la répression de l’ivresse publique mais aussi de la législation sur les stupéfiants, la revente de tabac, la lutte contre le bruit, les faits susceptibles d’entraîner une fermeture administrative, les principes généraux de la responsabilité civile et pénale des personnes physiques et des personnes morales et la lutte contre la discrimination.
“Cette formation est obligatoire.
“Elle donne lieu à la délivrance d’un permis d’exploitation valable dix années. À l’issue de cette période, la participation à une formation de mise à jour des connaissances permet de prolonger la validité du permis d’exploitation pour une nouvelle période de dix années.
Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État.”

II. - Après le cinquième alinéa (4°) de l’article L. 3332-3 du même code, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
“5° Le permis d’exploitation attestant de sa participation à la formation visée à l’article L. 3332-1-1.”

III. - Les dispositions de l’article L. 3332-1-1 du Code de la santé publique sont applicables à l’issue d’un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi aux personnes déclarant l’ouverture, la mutation, la translation ou le transfert d’un débit de boissons à consommer sur place de deuxième, troisième et quatrième catégories.
Elles sont applicables à l’issue d’un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi aux personnes déclarant un établissement pourvu de la « petite licence restaurant ou de la licence restaurant.

IV. - L’article L. 3332-15 du même code est ainsi modifié :

Le 2 est complété par une phrase ainsi rédigée :
“Le représentant de l’Etat dans le département peut réduire la durée de cette fermeture lorsque l’exploitant s’engage à suivre la formation donnant lieu à la délivrance d’un permis d’exploitation visé à l’article L. 3332-1-1.” ;
Le 3 est complété par une phrase ainsi rédigée :
“Dans ce cas, la fermeture entraîne l’annulation du permis d’exploitation visé à l’article L. 3332-1-1.”

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L'Hôtellerie Restauration n° 2973 Hebdo 20 avril 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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