du 22 novembre 2007 |
INTERNATIONAL |
D'ÉVREUX À MELBOURNE EN PASSANT PAR TOKYO ET HONG-KONG
Philippe Mouchel, un cuisinier voyageur
Melbourne (Australie) Voilà plus de vingt ans que ce disciple de Paul Bocuse sillonne le monde pour apporter aux autres pays ce que la cuisine française à de meilleur à leur offrir.
Philippe Mouchel. |
Sous
le plus grand casino d'Australie, entre le velours vert des tables de jeu du Crown
Casino de Melbourne et le blanc amidonné qui nappe celles de la brasserie de
Philippe Mouchel, il n'y a que quelques étages. Une volée de marches
à la moquette épaisse, que les joueurs comme les gastronomes n'hésitent
pas à emprunter pour se plonger, le temps d'un repas, dans les délices
d'une cuisine estampillée 100 % française qui fait, depuis février
2003, la renommée de The Brasserie By Philippe Mouchel.
Un nom qui n'a pas été choisi au hasard.
Le chef français jouit en effet d'un statut très particulier dans la
capitale du Victoria où il a déjà officié dans les années
1990, sous une autre signature, légendaire celle-là, celle de Paul Bocuse.
Pendant sept ans, ce grand gaillard a délivré, du fond de sa cuisine,
la bonne parole du maître. Le temps de compiler les récompenses et d'habituer
les palais australiens au savoir-faire incomparable de la haute gastronomie française…
avant de devoir fermer le restaurant. "Nous étions arrivés trop tôt.
Le pays n'était pas encore prêt pour ce genre d'expérience",
sourit aujourd'hui Philippe Mouchel. Les adeptes de l'époque n'ont pourtant
rien oublié. Ils sont aujourd'hui les premiers à venir se mettre les
pieds sous la table, en souvenir des plaisirs culinaires découverts douze ans
plus tôt.
"J'ai toujours eu la bougeotte"
Ce n'était pas la première
fois que Philippe Mouchel venait évangéliser les contrées lointaines
à la cuisine Bocuse. "J'ai toujours eu la bougeotte", déclare-t-il.
L'histoire a démarré chez lui à Evreux, où il fait ses deux
années d'apprentissage à l'Hôtel du Grand Cerf, starisé du
Michelin. Il descend ensuite à Bordeaux travailler dans les cuisines
de l'Hôtel Frantel. C'est là que son destin va basculer vers des horizons
plus lointains. Il y rencontre en effet un ancien de chez Bocuse qui propose au
jeune cuistot de l'aider à pousser les portes du plus toqué des chefs
français. À 21 ans, le commis de cuisine débarque alors à
Collonges. "Une expérience inoubliable", se souvient Philippe Mouchel,
qui a la chance de pouvoir observer 'Monsieur Paul' derrière ses fourneaux.
Chez lui, il apprend à y faire les soupes aux truffes, ses loups en croûte.
Il découvre aussi la médiatisation de son métier. "C'était
le début de la nouvelle cuisine, les télévisions venaient des quatre
coins du monde pour filmer les cuisines." Dans ce contexte si particulier, Philippe
apprend vite, et lorsque Paul Bocuse ouvre en 1979 son premier restaurant à
Tokyo, il embarque le Normand dans cette aventure du bout du monde. C'est lui qui
pendant quatre ans veillera sur l'héritage gastronomique du 'maître'.
C'est également derrière les rôtissoires du Renga-Ya que Philippe
Mouchel comprend qu'il doit adapter la cuisine française aux habitudes culinaires
locales. "Il faut faire ce que veut manger le client", résume-t-il aujourd'hui.
En prenant garde néanmoins
de toujours respecter l'essence même de la gastronomie bleu-blanc-rouge. Un
principe auquel il ne dérogera plus. Philippe l'appliquera pendant quatre ans
à Hong-Kong, toujours sous l'enseigne Bocuse, puis pendant une année
seulement au Texas, du côté de Houston. La seule expérience mitigée
de notre cuisinier globe-trotter. "J'avais toujours rêvé d'aller aux
États-Unis, mais je me suis heurté à un véritable clash
culturel. La clientèle ne comprenait pas ce que l'on faisait."
Échanges et influences
Retour donc à la
case Japon. Il décide alors de s'émanciper du Grand Paul pour ouvrir son
restaurant, La Belle Époque, et proposer sa propre cuisine. Il échange
beaucoup avec un autre grand cuisinier, le Japonais Ono, ambassadeur de la cuisine
française dans son pays. Nouvelle influence pour une nouvelle expérience.
"Avec 25 personnes en cuisine, j'ai énormément appris en termes de management", précise le chef français. Six ans plus tard et malgré
la notoriété de son établissement, il décide pourtant de tenter
un nouveau challenge. "Je m'ennuie un peu après un certain temps." Lorsque
son ancien mentor le contacte alors en 1991 pour ouvrir un restaurant à Melbourne,
il saute sur l'occasion. De l'Australie, Philippe avoue qu'il ne connaissait pas
grand-chose. Cela ne l'empêchera pas de marquer vite son territoire. Sous
l'étiquette Bocuse d'abord, avant de décider de voler de ses propres ailes,
en montant sa brasserie-rôtisserie. En 2001, il décide pourtant de retourner
dans son pays d'adoption, le Japon. "J'étais un peu fatigué de la cuisine",
reconnaît-t-il. Philippe en profite pour retourner un peu plus en France,
pour voir sa famille et surtout rester en contact avec cette gastronomie française
"qui évolue constamment". Une parenthèse qui se refermera donc
en 2003, lorsque Philippe décidera de revenir à Melbourne. "L'expérience
me plaît et j'aimerais bien la poursuivre encore un peu", espère-t-il
aujourd'hui. Avant d'aller peut-être voir ailleurs demain. À 50 ans,
il lui reste un rêve à réaliser : "J'adorerai ouvrir une auberge
à la campagne, avec quelques chambres et qui proposerait une cuisine simple,
à base de produits locaux."
Olivier
Caslin
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En
dates
1956 Naissance à Evreux (27)
1972 Apprentissage à l'Hôtel du Grand Cerf
à Evreux
1977 Arrive comme commis chez Paul Bocuse à Collonges
1979 Première expatriation à Tokyo
1983 Travaille pour Paul Bocuse à Hong-Kong
1991 Débarque en Australie à Melbourne
2003 Ouvre The Brasserie by Philippe Mouchel
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L'Hôtellerie Restauration n° 3056 Hebdo 22 novembre 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE