"Pertes d'exploitation : évitons les confusions et la démagogie
Le sujet de l’indemnisation des pertes d’exploitation, non liées à un dommage matériel (incendie, dégâts des eaux…) fait grand bruit en France, et dans le monde, depuis le début de la terrible crise sanitaire que nous traversons. Et c’est un sujet majeur auquel nous attachons une très forte importance et qui nous touche beaucoup, car nous mesurons les difficultés de nos clients qui ont vu leur chiffre d’affaires s’effondrer.
Depuis le début de cette crise, la position de très nombreux assureurs, dont AXA France et de la Fédération Française de l’Assurance (FFA), a toujours été très claire : le risque pandémique est exclu des garanties perte d’exploitation car il n’est pas assurable. Pourquoi ? parce qu’il ne répond pas aux deux piliers qui constituent la base de l’assurance : être confronté à un aléa et une mutualisation du risque.
Par ailleurs, qui peut penser que l’arrêt presque total de notre économie pourrait être supporté par les seuls assureurs ? Un seul chiffre : l’indemnisation des pertes d’exploitation est évaluée à 20 milliards d’euros par mois, ce qui mettrait gravement en péril l’existence même d’un nombre important d’assureurs. Tous les acteurs politiques et économiques l’ont rappelé à plusieurs reprises. Bruno Lemaire, a déclaré à L’Argus de l’Assurance, le 28 avril dernier : « La prise en charge par les assureurs des pertes d’exploitation, liée à la pandémie porterait atteinte à leur équilibre économique… » et réaffirmé le 13 mai sur la couverture des pertes d’exploitation : « la solution ne peut pas être de faire payer les assureurs a posteriori pour des risques qu’ils n’ont pas couverts. La prise en charge des assureurs des pertes d’exploitation liées à la pandémie, en dehors de toute possibilité pour elles d’en avoir organisé au préalable la couverture financière par les mécanismes habituels de cotisations des assurés, provisions et réassurance, porterait atteinte à leur équilibre économique… »
C’est pour cette raison que les grandes catastrophes naturelles que nous connaissons (inondations, tempêtes, sècheresses…) dont chaque événement coûte plusieurs milliards d’euros, sont prises en charge par un régime spécial Public - Privé, depuis 1982, dans lequel l’Etat et les assureurs prennent chacun leurs responsabilités, à proportion de leurs moyens.
Chez AXA, nous avons la chance d’avoir la confiance de 13% des artisans et commerçants en France, une faible part d’entre eux ayant souscrit une garantie perte d’exploitation sans dommage. Ces garanties sont très encadrées d’un point de vue contractuel et protègent parfois le commerçant ou l’artisan en cas de fermeture administrative spécifique à l’établissement, décidée par une autorité de police, comme un Maire ou un Préfet. Pour un restaurant, par exemple, cette option particulière pourra couvrir une fermeture imposée en conséquence du non-respect de la règlementation en matière d’hygiène et de sécurité, sans faute intentionnelle de sa part bien sûr. Ces garanties proposées, pour faire face à des situations isolées d’arrêt total d’activité, et propres à l’établissement concerné, n’ont bien évidemment rien à voir avec la décision des Pouvoirs Publics du 14 mars dernier, de portée générale, et qui interdisait à tous les restaurants, bars, discothèques, notamment, de recevoir du public.
La grande majorité de nos clients ont compris cette situation et nous sommes bien sûr conscients des difficultés que cette interdiction peut entraîner. C’est pour cette raison que nous avons engagé, depuis le début de la crise, 400 millions d’euros de soutien pour, notamment, annuler deux mois de primes, effectuer des reports d’échéances tout en maintenant nos garanties et rester en permanence au chevet des entrepreneurs les plus touchés. Nous avons également été le plus grand contributeur privé au Fonds de Solidarité mis en place par l’Etat pour soutenir les entreprises. Ce sont au total plus de 350 000 entreprises et professionnels qui ont bénéficié de nos aides depuis deux mois et je me réjouis de la vigilance de l’Etat, qui, le moment venu, souhaite vérifier et mesurer tous les engagements des assureurs.
Nous avons analysé l’ensemble de nos contrats et chaque fois que nous estimions être tenu d’indemniser, ce qui est le cas pour quelques centaines de contrats, nous avons identifié et contacté les clients concernés afin de les indemniser immédiatement.
Il se trouve que certains assurés ont des clauses contractuelles aux termes desquelles nous considérons ne pas être tenu à une indemnisation. Parmi eux se trouve un restaurateur parisien à la tête de quatre établissements, M. Stéphane Manigold, qui a décidé de mener une croisade médiatique, avec l’appui d’avocats et de communicants, puis de nous attaquer en justice, comme c’est son droit le plus strict. Il l’a fait en tenant sur AXA et l’assurance en général, des propos erronés, ne correspondant à aucune réalité, qui décrédibilisent une profession dans laquelle travaillent 150 000 personnes en France et qui portent atteinte à l’image de notre compagnie en particulier. L’attaque qui m’a le plus interpelé fut celle d’avant hier matin sur le plateau de Jean-Jacques Bourdin (RMC) lorsque M. Manigold affirma, à plusieurs reprises, qu’AXA pariait sur la mort des entreprises (nos clients donc !) et que nous affirmions que les restaurateurs avaient fermé volontairement leur établissement lors de la crise sanitaire. Tout cela est caricatural et me choque profondément. M. Manigold tente de manière déloyale de tirer des généralités et contrevérités d’une argumentation juridique développée devant le Tribunal de commerce de Paris, par rapport à son cas particulier. Il est en effet absolument évident que les conséquences graves de l’interdiction d’accueillir du public sur les activités des commerçants, des artisans et des entreprises, ne relèvent pas du tout de leur choix, mais sont bel et bien la conséquence de l’arrêté ministériel du 14 mars dernier. M. Manigold a déclaré également le 15 avril dernier sur France 3 que les assureurs peuvent payer car ils ont des liquidités disponibles comme les 1700 milliards d’encours de l’assurance Vie. Aurait-il oublié qu’il s’agit de l’argent qui nous a été confié par les épargnants français et non le nôtre, et que ce type de spoliation n’est envisagée par personne, ni les épargnants, ni les autorités, ni par notre compagnie ?
M. Manigold est en colère, inquiet et nous pouvons le comprendre. Mais il a refusé toute forme de main tendue en rejetant l’idée d’une conciliation. Nous avons présenté, comme lui, nos arguments devant le juge des référés du Tribunal de commerce de Paris qui a décidé de reporter sa décision au 22 mai. Ne pas être d’accord sur l’interprétation d’un contrat est une chose qui peut arriver, mais cela n’empêche pas de se mettre autour de la table pour comprendre et échanger sur les différents points de vue et, si le dialogue n’est pas possible, laissons alors la justice trancher sereinement.
AXA assurance #manigold#
jeudi 14 mai 2020