Il y a deux grandes façons d’évaluer le succès durable d’un restaurant : quand on patiente plusieurs semaines avant de trouver une table en fin de semaine, même après une pandémie mondiale, ou quand on raconte plusieurs dizaines de fois le souvenir d’un repas passé. En cela, Balagan coche sans mal les deux critères.
Au printemps 2017, un nouveau visage bien connu des gastronomes israéliens pointe le bout de sa barbe dans le Ier arrondissement de Paris : Assaf Granit. Ce fervent admirateur d’Alain Passard arrive avec des idées bien claires. Au rez-de-chaussée de l’hôtel Renaissance Paris Vendôme, le chef monte Balagan - dont le nom signifie ‘joyeux bordel’ en hébreu - avec ses trois compères, Dan Yosha, Uri Navon et Tomer Lanzman. Ce dernier est le directeur des lieux. À 36 ans, celui qui a toujours aimé recevoir garde un souvenir ému du premier service : “Quand les premiers clients ont découvert l’ambiance avec la musique forte et les jeux de lumière, ils ont été assez surpris. Mais l’expérience gustative leur a permis de se laisser aller.”
Balagan, c’est un peu “l’histoire d’une bande de fous qui débarque à Paris pour créer un lieu chaleureux, convivial et élégant. Le cœur du concept - très courant à Tel Aviv ou Jérusalem - est de proposer une cuisine de partage et de qualité (mezzés, brioches tièdes et kebabs déstructurés font l’unanimité) dans une ambiance sonore et décontractée. Ici, pas de frontière entre la cuisine et la salle : tout le monde se fond dans le même décor. Ainsi, chaque soir, le restaurant prend des allures de lieu de fête où on peut danser sur ‘Habib Galbi’ et boire des shots d’arak avec les serveurs. “Cette joie de vivre, elle n’est pas feinte. Les clients se rendent compte d’eux-mêmes du plaisir que prend l’équipe. Le plus important, c’est d’avoir la sensibilité de cerner les clients et de leur apporter la même expérience.”
Souvenirs mémorables
Forcément, pour faire vivre un tel lieu - ouvert tous les jours du matin au soir -, il faut des moyens humains. Près de 65 personnes en cuisine et salle se relaient pour contenter les 70 places assises de l’établissement. “Le besoin des clients est différent le midi et le soir. Mais l’objectif reste le même : rendre les gens heureux. Pour y parvenir, il ne faut jamais perdre deux valeurs sacrées, à savoir l’humanisme et la créativité.”
Dans la tête du Tomer Lanzman résonnent des milliers de souvenirs aussi fous qu’émouvants. Quelques exemples réjouissants : la visite du roi du Maroc qui devait dîner en quarante-cinq minutes avant d’y rester… quatre heures au total ; le dîner-surprise de Lady Gaga pour l’anniversaire de sa mère - “elle est même partie derrière les fourneaux pour préparer les assiettes”- ; ou encore les demandes de mariage de clients enflammés. “Balagan a le don de mettre les gens à l’aise. Quand on voit que des personnes du Moyen Orient font la fête sur de la musique israélienne, on se dit qu’un restaurant a un sacré pouvoir de communion.”
S’il n’a pas pris de vacances depuis deux ans et demi, le manager ne s’en offusque pas. “Je m’amuse, vraiment, plus que je ne travaille.” Le manager ne précise pas qu’il cumule plusieurs casquettes à succès, que ce soit Shabour, le restaurant devenu étoilé en 2021, etTekes, orienté vers les cuisines du monde, qui ouvrira ses portes en novembre prochain. “On devrait également ouvrir un établissement à Berlin”, précise le trentenaire qui sait, peut-être, que Balagan a sacrément dynamisé les codes du service à la française.
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Publié par Stéphane POCIDALO