#coronavirus : Pour ou contre, la vente à emporter divise les restaurateurs

Autorisée par les pouvoirs publics, la vente de repas à emporter dans les restaurants se présente comme un recours pour tenir avant la réouverture. Certains professionnels voient dans cette option un moyen de maintenir une source de revenu, leur moral mais aussi une relation avec les clients, d'autres redoutent une perte de temps, d'argent et même de réputation.

Publié le 20 mai 2020 à 12:38

 

  • POUR : Laurent Favier, chef du restaurant Chai Nous Comme Chai Vous, à la Flotte-en-Ré (Charente-Maritime)

“Plus pour le moral que pour la trésorerie”

Sans fichier client, rien n’aurait été possible. L’envoi d’une centaine de SMS, juste avant le week-end de Pâques, a fait démarrer en trombe la vente à emporter. Elle se déroule devant l’établissement, deux fois par semaine : le mercredi avec un menu unique à 20 € et le samedi avec un repas à 30 €. Nous avons baissé, sans succès la carte des vins de 50 %. Les gens peuvent sans doute s’en procurer facilement dans les magasins. L’insularité rendait notre projet compliqué, pourtant les trois premières semaines furent un succès avec une centaine de repas emportés chaque semaine, puis la demande a décliné un peu.

Usure des consommateurs, concurrence car beaucoup de confrères se lancent désormais ou l’espoir que la crise touche à sa fin ? Je ne sais pas. Nous travaillons uniquement avec les riverains même si nous comptons sur le déconfinement pour capter les clients à 100 km à la ronde, les week-ends surtout. Un collègue à Niort cartonne car il faisait déjà de la vente à emporter avant la crise. Je travaille seul et les quelques revenus sont bienvenus mais j’ai surtout revu des clients et reçu beaucoup de soutien. Les Rétais commandent aussi par solidarité. Ça touche !

Je m’inscris dans une démarche durable car si, à la réouverture, la limitation du nombre de couverts et les contraintes sanitaires font de mon restaurant un Ehpad, je ferai du traiteur”, envisage Laurent Favier qui est maître-restaurateur et membre du Collège Culinaire de France (CCF).

 

  • NI POUR NI CONTRE : Annabelle Logerot, propriétaire de la Villa Vauban à Langres (Haute-Marne)

“Je n’y crois guère mais j’y réfléchis quand même”

Les étrangers ne reviendront pas de sitôt alors que parfois, ils remplissaient ma terrasse à eux seuls. Je dois trouver d’autres sources de revenus sans mettre en danger notre réputation. Dans mon congélateur, je n’ai que des glaces. Tous nos produits sont frais ce qui, dans la vente à emporter, peut engendrer des pertes alors que nous n’en sommes plus à vouloir prendre des risques. En outre, il faudra encore des investissements, ne serait-ce que pour les contenants”, explique Annabelle Logerot, alors qu’elle achevait une visioconférence avec des collègues de la région en partie sur ce thème qui divise la profession.

Quand on me parle de drive, j’ai les poils qui se hérissent. Je pense à un fast-food ! Pourtant, nous devons nous réinventer. On réfléchit beaucoup et puis des étoilés se mettent à la vente à emporter avec succès. Je vais d’ailleurs en appeler un pour m’informer sur ses modèles d’emballages. Si je devais me lancer, il faudrait refaire toute la carte mais je ne proposerai qu’un plat, une fois par semaine. De quoi douter de la rentabilité de la démarche. Pour l’heure, je ne sais pas. Je ne suis ni pour ni contre”, confie la restauratrice.

 

  • CONTRE : Jean-Michel Turin, chef étoilé du Château de Vauchoux (Haute-Saône).

“Ce n’est pas mon métier !”

Notre entreprise a 50 ans. Nous n’avons plus de prêts bancaires, pas de dettes fournisseur et notre trésorerie nous permet de faire face à ces crises qui perturbent régulièrement l’activité dans la restauration, même si celle du Covid-19 est particulièrement sévère. Notre gestion de père de famille nous protège de devoir faire n’importe quoi. L’activité de vente à emporter repose sur d’autres usages pour la fabrication et l’expédition. Ce n’est pas notre métier. Pourquoi faire de la concurrence aux traiteurs ? À emporter, les prix sont bas et donc il faut faire du volume. Pourquoi mettre en danger sa réputation alors qu’une entreprise sérieuse devrait avoir un fond de roulement pour pallier une baisse d’activité imprévue ? L’État nous aide et nous sommes confiants dans la reprise même si cette crise va provoquer une sélection dans la profession. Dans nos métiers, il faut s’inscrire dans la durée. Dernièrement, je suis passé en Alsace devant chez Haeberlin. Tout était fermé. J’ai trouvé cela digne”, explique, d’une voix optimiste, Jean-Michel Turin, cuisinier étoilé depuis 1980.

 

#LaurentFavier#  #AnnabelleLogerot# #JeanMichelTurin#


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Publié par Francois PONT



Commentaires
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gerard caille

vendredi 22 mai 2020

Faire de la vente à emporter n'est pas n'importe quoi mais peut être un moyen de faire rentrer un peu de trésorerie. Donc rien d'indigne dans cette démarche mais plutôt une volonté de s'en sortir et d'avancer. Pas plus de concurrence déloyale vis à vis des traiteurs. Quant au fond de roulement, il faut des années pour qu'une entreprise arrive à se constituer un solide fond de roulements, vous le savez cher Maître!

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