Pour leur restaurant Flesh (Paris, IXe) ouvert en octobre dernier, David Vidal et Arnaud Champetier voulaient une cuisine peu onéreuse et qui plairait au plus grand nombre. "Quand les gens partent en vacances ou en week-end, ils pensent souvent à aller acheter de quoi faire un barbecue. On pensait au barbecue comme moyen de tout griller sans matières grasses, de donner un goût que l'on n'avait pas à Paris et une latitude intéressante jusqu'aux fruits que l'on propose en dessert", explique David Vidal. Leur rencontre avec le chef Simon Lewis, américain d'origine et passé par Spring et Frenchie, a été déterminante. "Simon a compris que c'était une cuisine autour du barbecue que l'on souhaitait et non un restaurant américain."
L'autre rencontre, c'est celle avec le boucher Olivier Metzger. Il leur fait part de ses suggestions, les oriente vers des viandes grasses et plus persillées, comme une côte de veau ou une cuisse de dinde. Côté technique, le barbecue d'1,50 m de longueur a été trouvé dans l'Est de la France. Il fonctionne au charbon de bois et dispose d'un capot qui permet de fumer les produits entre les services avec un mélange de copeaux de bois (hêtre, chêne, merisier). Pas de sel ou de poivre sur les tables, les viandes sont assaisonnées de mélanges d'épices qui les imprègnent à coeur pendant la cuisson. "Même les accompagnements passent au barbecue, comme le pain pour les croûtons de la salade César, les épis de maïs et la courge butternut."
Une tradition américaine
Pour son projet de restaurant à Paris dans la plus pure tradition barbecue, Thomas Abramowicz s'est formé durant plusieurs mois au Texas auprès des spécialistes. "Aux États-Unis, il existe une tradition de barbecue de trois cent ans. C'est un mode de vie qui génère des compétitions, des rencontres et les gens sont très accueillants." Le jeune homme passe aussi dix jours près de Dallas dans l'entreprise qui fabrique les fumoirs. À son retour à Paris, il doit d'abord trouver le lieu qui peut être équipé d'une extraction puissante. The beast, le surnom qu'il donne à son fumoir (de deux tonnes et d'une capacité de fumage de 500 kilos de viande) comme c'est de coutume aux États-Unis, a demandé trois mois de fabrication et autant de transport en bateau.
Dans un décor de bois et de photos de viandes cuisinées au barbecue, The Beast (Paris, IIIe) a ouvert en octobre dernier autour d'une carte courte : poitrine de boeuf (brisket), plat de côte de boeuf, travers de porc (ribs), effiloché de porc et poulet (de 9 à 11 €, 24 € pour le plat de côte, 4 € l'accompagnement). "L'idée est de partager plein de choses dans un esprit convivial."
Thomas Abramowicz a sélectionné du boeuf Black Angus américain, "j'ai eu beau faire des essais avec des races françaises, c'est la plus persillée qui se prête à une cuisson de dix-huit ou vingt heures" et du porc et des volailles Label rouge. Le fumoir fonctionne à la bûche (chêne français) et 24 heures sur 24. "Le planning de cuisson des viandes est plus compliqué que celui du personnel", sourit-il. Les viandes, dont les cuissons varient de quatre à vingt heures, sont conservées pendant chaque service dans des armoires chauffantes qui maintiennent à bonne température sans cuire, arrivées elles aussi des États-Unis. Chaque client commande au stand order où le cuisinier coupe devant lui les morceaux, puis au stand pick up pour les accompagnements (coleslaw, BBQ beans, pomme de terre au four) et repart avec son plateau en salle. Toujours dans la tradition américaine, 70 bourbons figurent à la carte (proposés en 2 et 5 cl), "leur texture crémeuse et leur saveur douce accompagnent parfaitement les viandes". D'ailleurs, 20 à 30 % de la clientèle du soir est américaine.
Publié par Caroline MIGNOT