Cuisine coréenne : un K de force majeure

Ces derniers mois, le dakgangjeong (poulet frit) et autre bibimbap (bol de riz garni) se sont invités à la table des grands. La K-food n’est plus simplement à la mode, c’est une tendance de fond qui conquiert les (jeunes) estomacs aussi rapidement qu’une story sur TikTok. Décryptage d’une cuisine parfaitement dans l’ère du temps qui ne connaît pas encore ses limites.

Publié le 24 janvier 2024 à 14:00

Elle est arrivée il y a vingt ans, sur la pointe des pieds. De la part d’un pays réputé pour ces matins calmes, rien de surprenant. Elle a vu défiler des voisines imposantes : la cuisine chinoise, la cuisine thaïe et, bien évidemment, la cuisine japonaise et ses menus ‘lettre-chiffre’ à n’en plus finir. Mais aujourd’hui, c’est son tour. Si la K-food est toujours celle du Pays du matin calme, elle réunit tous les ingrédients d’un succès durable : colorée, épicée et bon marché. De quoi séduire à la fois les ados, côté street-food, mais également les amateurs de cuisine saine avec ses produits frais et fermentés composant la majorité des bols.

 

Un phénomène culturel

Début 2024, sans compter les épiceries, on dénombre près de 200 restaurants coréens à Paris et environ 80 en province. Ces chiffres ont beaucoup évolué ces derniers mois. “C’est affolant”, affirme sans exagérer Sung Sik Kim, directeur général de Maison de Corée. Il y a six ans, cet ancien de l’école Ferrandi a créé en binôme cette marque qui fait le pont entre la France et la Corée du Sud. “Avant, la culture coréenne n’était pas encore démocratisée. On ne pouvait pas retrouver les vrais produits coréens.” Aujourd’hui, la Maison de Corée propose 55 références dans l’immense majorité des enseignes de la distribution.  “J’avais envie de présenter le savoir-faire coréen et sortir des stéréotypes. La Corée du Sud est un pays moderne et contemporain tourné vers les autres.”

La K-food s’inscrit dans un mouvement global de soft power coréen qui a explosé en 2021 avec la série phénomène Squid Game et le succès de la K-pop, gorgée de musiques et de chorégraphies formatées pour les réseaux sociaux, TikTok en tête. “Aujourd’hui, on se rend compte du pouvoir d’attractivité de la cuisine grâce à notre restaurant Nukim”, confie Sung Sik Kim. Situé à Nice, le concept-store restaurant - seul établissement coréen de la ville à ce jour - fait déplacer des curieux venus de Marseille et de toute la Côte d’Azur. Dans les prochains mois, l’entrepreneur souhaite ouvrir 3 à 5 points de vente en fixe.

 

Bonchon, fer de lance de la K-food

En mars 2023, une nouvelle enseigne s’est invitée discrètement au cœur du grouillant quartier des Halles (Paris, IIe). Vu de l’extérieur, rien de clinquant : un comptoir au style épuré et quelques graphiques ornant les murs. Pourtant, Bonchon est déjà un poids lourd de la street-food mondiale. Depuis 2006, son fondateur, le Coréen Jinduk Seo, a bâti un empire aux États-Unis avec 120 restaurants dans tout le pays, et plus de 400 établissements dans le monde.

Michel Abdelnour, directeur de Bonchon France, est celui qui doit faire de l’enseigne une star de la K-food en Europe. “Ma rencontre avec M. Seo m’a convaincu de la qualité de ce projet. Dès l’obtention d’une master franchise en France et en Espagne, j’ai fixé un objectif : l’ouverture de 25 restaurants dans les cinq prochaines années. »

Dès les premières semaines, le poulet frit - produit phare de l’enseigne avec sa panure réalisée à la main, sa double friture et sa sauce secrète confectionnée en Corée du Sud - a séduit la clientèle parisienne. Avec 7 personnes en cuisine, nous servons entre 400 et 500 clients par jour grâce, notamment, au succès du Click & Collect.”

Un an après, les habitudes ont néanmoins changé. Si le poulet croustille toujours, d’autres plats du restaurant sont plébiscités : le bibimbap, le bulgogi (plat de bœuf mariné) et le japchae (vermicelles de patate douce accompagnés de bœuf et légumes). “C’est la grande force de la cuisine coréenne : elle est non seulement variée mais également saine.”

 

À quand le plat phare ?

Si cette diversité a du bon, elle comporte aussi une faiblesse. “Si je vous parle de sushi, vous pensez instantanément à la cuisine japonaise. Mais, pour la K-food, il n’existe pas encore de plat phare”, explique le co-fondateur de la Maison de Corée. L’engouement émergent pour le corn dog pourrait changer la donne. Cette variante du hot-dog, qui se déguste à chaque coin de rue en Corée, a du potentiel avec son côté pratique - la saucisse panée est tenue par un bâtonnet - et créatif. On peut l’enrober de dés de pomme de terre, de fromage et/ou de sauces.

En attendant de le savoir, il reste une certitude : la K-food, avec son marketing surpuissant, n’a pas prévu de sortir de table.


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Publié par Stéphane POCIDALO



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