Son étude s'est faite à travers les événements marquants de l'histoire. Après une partie allant de l'Antiquité à la fin du XVIIe siècle, le travail universitaire de Gil Galasso se focalise sur la période de 1700 à nos jours. Il veut rétablir l'importance de ces gestes au sein de la profession et revaloriser le service en salle à la française.
L'Hôtellerie Restauration : Pourquoi avoir fait ce travail de recherche et replacé les techniques et gestes propres à la découpe dans un contexte historique précis ?
Gil Galasso : À 50 ans, j'ai une responsabilité sacralisée par mon titre de MOF maître d'hôtel : transmettre aux jeunes générations. Depuis une vingtaine d'années, je constitue une bibliothèque et une iconographie sur un art – la découpe à table – qui a disparu progressivement à partir de l'arrivée de la nouvelle cuisine. Ce sont mes deux années en histoire de l'art de 2014 à 2015 qui m'ont permis de retrouver de nombreux documents. Ensuite, j'ai dû choisir un contexte précis en histoire et l'université impose un choix entre quatre périodes. J'ai étudié l'époque contemporaine afin que mon travail s'inscrive dans une réalité professionnelle et non pas un souvenir.
Mes recherches ont prouvé que cet art des écuyers puis des maîtres d'hôtel trancheurs avait activement participé à la promotion de notre nation au travers des repas entre grands de ce monde, au plus près des rois et des nobles. J'ai aussi compris qu'il y avait une véritable école de la découpe à la française, très ancienne, qui pouvait permettre à la France de rester en haut du podium tout en collaborant avec les chefs en ces jours de mondialisation.
Pour réussir à faire renaître nos gestes du passé, je me suis appuyé sur des représentations et quelques manuels. Je me suis aussi mis dans la peau de mes ancêtres professionnels à travers les différentes époques et les contextes historiques et politiques dans lesquels ils évoluaient. En comparant les dates de l'édition des manuels, des enluminures, fresques et tableaux et celles d'événements historiques, je me suis aperçu qu'une récurrence apparaissait systématiquement. Les oeuvres et les manuels surgissent quand notre pays est en grande difficulté et l'art de la découpe est promu.
Pouvez-vous nous décrire précisément un fait historique ayant sublimé la découpe ?
Parmi beaucoup d'exemples, je peux vous citer le règne d'Henri III. En pleine période des guerres de religions, il faut que le roi représente la nation unie comme il peut. Il décide alors de mettre en scène son repas : il s'écarte de la table de la cour pour manger seul entouré de barrières. Seul l'écuyer tranchant, une personne de confiance et excellant dans la maîtrise des armes et des couteaux de tranche, effectue des découpes magistrales, à la volée - les pièces sont maintenues en haut d'une fourchette. On sauve ainsi les apparences - au moins pendant les moments du repas - alors que la situation du royaume est catastrophique.
À travers votre thèse, quel message souhaitez-vous transmettre aujourd'hui aux métiers du service et de la salle ?
Mon message est le même depuis plus de vingt ans. Il s'adresse aux chefs : faites confiance à votre maître d'hôtel, donnez-lui la possibilité de vous faire des propositions au travers des gestes, des techniques de salle, dans l'esprit de votre personnalité et de votre vision de la cuisine. Votre restaurant se démarquera alors et j'en fais la promesse. De mon côté, je vais diffuser mes recherches à tous mes confrères pour les aider à conseiller ces chefs.
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Publié par Camille BORDERIE
vendredi 13 avril 2018