Le choc aurait eu lieu vers 21 h 30 lorsque la double coque à tribord a été éperonnée par une barre de rocher provoquant une déchirure d'une centaine de mètres. Le commandant mettra une heure à donner l'ordre d'évacuation, le bateau gîte à 80 % empêchant de mettre les chaloupes à la mer, des passagers se jettent à l'eau, certains gilets de sauvetage ne sont pas aux normes et ne disposent pas de lumière de position, des scènes de panique provoquent des bousculades, l'équipage se comporte en héros mais ne parvient pas à communiquer clairement avec les voyageurs en raison des multiplicité des langues, les serrures électroniques de certaines cabines ne fonctionnent plus à cause des pannes électriques et retiennent prisonniers des passagers. Les naufragés évoquent en choeur des scènes dignes du film Titanic. Ajoutons la crainte d'une malédiction avec la date fatidique du vendredi 13 et le mauvais présage d'une bouteille de champagne qui refuse de se casser sur la coque le jour de l'inauguration du bateau en 2005 : de quoi effrayer de nombreux candidats à l'expatriation maritime.
Après le drame, les questions
Il faudra du temps aux compagnies de croisières pour regagner la confiance des voyageurs qui plébiscitaient chaque année un peu plus cette formule touristique, et ce pour plusieurs raisons. D'abord la modernisation d'une flotte qui propose désormais des paquebots ultra équipés, des séjours all inclusive à partir parfois de 480 € euros la semaine (comme c'était le cas pour certains Français présents à bord du Costa Concordia), un rajeunissement de la clientèle qui a chassé l'image vieillotte des migrations maritimes mais aussi - et paradoxalement face aux événements actuels - un sentiment de sécurité à bord. On constate en effet que les crises internationales, écologiques comme le tsunami en Thaïlande ou politiques comme les révoltes du Maghreb, renforcent la fréquentation des navires de croisières dont la capacité de repositionnement au large de pays réputés calmes, rassure les voyageurs.
Le bilan actuel de 11 morts et 29 disparus, le chaos d'un navire récent de 114 500 tonneaux échoué sur des récifs, la pleutrerie d'un officier et de son second… devraient provoquer une mise à plat des règles de fonctionnement d'un secteur porté depuis quelques années par une course sans limite au gigantisme. Ainsi, comment les procédures de ces compagnies peuvent-elles mettre en péril le sort de 4 229 voyageurs en confiant leurs vies à un seul homme, le commandant ? Comment un officier peut-il quitter sa route pour venir fanfaronner à quelques mètres des récifs ? Comment ont été conçues les évacuations de navires qui peuvent atteindre une capacité d'accueil de 8 000 occupants (équipages et passagers) comme sur l'Oasis of the Seas de la compagnie Royal Caribbean International ? Voilà bien des questions que les compagnies ont sans doute envisagées. Il s'agira désormais d'y répondre afin de limiter les effets collatéraux de la parade funeste de Francesco Schettino au large de la petite île de Giglio.
Publié par Francois PONT