En restauration rapide, l’offre végétale a longtemps été aux abonnés absents. Mais “en cinq ans, le végétal a changé d’image aux yeux du consommateur, et la restauration rapide, tirée par le fast casual, entame un virage. En France, le nombre d’enseignes de fast good healthy [sain NDLR] est passé de 22 à 32 entre 2015 et 2018, soit un bond de 252 à 410 unités”, souligne Nicolas Nouchi, directeur des études Worldwide chez CHD Expert. D’après une enquête menée par le cabinet sur les tendances alimentaires des Français, le flexitarisme (un régime qui n’est pas exclusivement végétarien, avec une consommation limitée de viande) est en pleine croissance : un sondé sur cinq consomme occasionnellement ou régulièrement des produits vegans en restauration hors domicile. Le végétal permet en effet de répondre aux nouvelles attentes de la clientèle. “Une offre végétale est accessible à tous ceux qui ne consomment pas de viande, pour des raisons éthiques, environnementales ou cultuelles. Elle correspond aux aspirations santé des consommateurs, tout en satisfaisant leurs besoins nutritionnels. Enfin, elle rassure en s’inscrivant dans la dimension du fait maison, plus brute et locale”, poursuit-il.
Chez EXKi, par exemple, “la nature est la base de la promesse culinaire”, rappelle Robin Blondel, responsable produit et marketing. La moitié des plats sont végétariens, 30 % sont végétaliens, et “il y en a pour tous les goûts : sans gluten, sans lactose...” La proportion de plats végétariens et vegans a légèrement augmenté ces dernières années, car il est devenu “indispensable de proposer ce genre de recettes à nos clients”, et chaque mois, la marque d’origine belge met à l’honneur un légume de saison, décliné en trois ou quatre créations éphémères.
De son côté, le réseau de bars à salades sur mesure Jour affiche plus d’un tiers de recettes végétariennes ou végétaliennes. “Aujourd’hui, un client sur deux compose une salade sans protéine animale dans nos restaurants, note le président fondateur, Thomas Battistini. Dans le top 3 de nos verrines, nous avons deux desserts vegans : le mango-coco chia pudding et le coco-crush au granola sans gluten et yaourt coco.” L’entrepreneur, qui veut “donner le choix sans prendre parti”, songe d’ailleurs à augmenter cette proportion de plats végétaux : “C’est un moyen de montrer que l’alimentation ne se base pas uniquement sur les protéines animales et qu’elle peut être très variée et gourmande lorsque l’on explore les produits de saison.”
Gourmand, sain et créatif
Gaspacho, smoothies, jus, steak veggie, salades, bowls associant légumes, légumineuses et céréales… Le végétal génère des offres protéiformes. Certaines enseignes misent sur une carte 100 % vegan et healthy, comme Wild & the Moon ou Copper Branch. D’autres ont à cœur de casser les codes et de réconcilier légumes et gourmandise. Chez Gemüse, les kebabs regorgent de légumes crus ou cuits – une version entièrement végétarienne est même disponible. Des fast-foods végétaliens fleurissent, à l’instar d’East Side Burgers ou Hank. Le bar à avocat Avocateria, quant à lui, revendique un positionnement “green porn”, autrement dit des recettes gourmandes et riches, mais exemptes de beurre, de sucres raffinés, d’additifs et de conservateurs. Même les principales chaînes de restauration rapide s’y mettent. McDonald’s a étoffé son offre de salades et lancé un burger végétarien, Burger King teste un Whooper veggie, Domino’s Pizza propose des recettes vegans…
Effet de mode ? “Comme toute prise de conscience, il y a peu de retour en arrière possible. Ce qui était à l’origine une niche sur le marché de la restauration va s’étendre de plus en plus à l’ensemble de notre secteur. Cela se voit déjà sur le comportement d’achat des jeunes générations et l’offre grandissante de produits healthy et végétaliens”, juge Thomas Battistini. Millennials, femmes, végétariens, vegans, flexitariens… Le végétal séduit une palette de plus en plus large de consommateurs. “Nos clients sont omnivores à 70 %, probablement car nous proposons un menu très copieux et rassasiant, à l’inverse de l’image que l’on peut avoir de l’assiette végétarienne composée d’herbes et de cailloux”, sourit Pierre Doléans, à la tête de Hank.
Dernier atout : le végétal est, selon Nicolas Nouchi, “l’expression d’une restauration créative et innovante”, venant satisfaire une clientèle friande de nouveautés. Cerise sur le gâteau : les végétaux, riches en couleurs, sont très photogéniques pour Instagram. Quatre mois après son ouverture, Avocateria compte ainsi plus de 5 500 followers grâce ses clichés polychromes.
Publié par Violaine BRISSART