En ce dimanche de novembre, la pluie peine à gommer, dans ses ruissellements, les stigmates des affrontements de la veille, 24 novembre, lors de la manifestation parisienne des gilets jaunes : mobilier urbain détruit, feux de signalisation et pavés arrachés, bitume brûlé… Ces dégâts, que la voirie s’emploie à faire disparaître, perturbent à peine les passants qui se bousculent pour les dernières soldes du Black Friday. La queue est imposante devant Louis Vuitton, mais en face, c’est la gueule de bois.
Le Fouquet’s est en effet défiguré par les heurts de la veille à l’image des vitres et portes fracturés par les jets de volumineux projectiles. Une seule personne est attablée en terrasse. Deux gardes filtrent la porte. Les tables sont vides. Une charmante jeune fille voltige à la porte : “Nous avons beaucoup de visites de journalistes. La direction ne souhaite pas faire de commentaires.”
“Nous nous sommes enfermés dans le café”
Juste à côté, sur le même trottoir, dans un établissement voisin, un serveur habillé en marin sera plus prolixe : “J’étais là hier, pendant les événements, à mon poste au Deauville. Nous n’avons eu aucun dégât. Les casseurs se concentraient devant le Fouquet’s. À 12 h 30, nous avions tout rentré, terrasse comme jardinières”, explique le serveur qui cherche désespérément à placer des touristes dans son établissement bondé.
En Face au café George V, au 102, du côté des numéros pairs, les serveurs en tablier blanc répondent bien volontiers aux questions des clients et passants. “Je travaille ici depuis cinq ans et je n’ai jamais vu ça. Hier, à midi, nous nous sommes enfermés dans le café. Ce sont des casseurs qui s’en prenaient aux biens et pas les gilets jaunes. Ils ont jeté des projectiles sur la vitrine et mis le feu à la tente en toile de la terrasse”, explique Arnaud Abouche sans se départir de son sourire. Un passant l’interpelle « C’est chez vous que toutes les chaises ont été projetées sur les forces de l’ordre ?” “Non, chez Paul, plus bas !” En effet, plus on descend l’avenue, plus les dégâts semblent importants.
“Ce sont les gilets jaunes qui nous ont porté secours. Pas la police !”
Au 78, devant les enseignes la Brioche Dorée et Chez Paul règne une atmosphère de chaos. Une remorque brûlée est échouée le long de la chaussée. Les terrasses ne sont que cendres, vitres brisées et enchevêtrements de poutrelles métalliques. Un riverain s’indigne de l’utilisation du chantier voisin, au numéro 60, pour armer l’insurrection : “Pourquoi la police n’a pas sécurisé cette zone riche en projectiles ?”
Des reproches envers les forces de l’ordre que l’on retrouve dans la bouche de Nicole, la gérante, depuis une semaine à peine, de la Brioche dorée : “Ce sont les gilets jaunes qui nous ont aidés à rentrer la terrasse et à fermer. Nous n’avons jamais vu la police. À 15 heures, notre structure de terrasse a été vandalisée puis un seul casseur en a mis le feu à 18 heures. Ce sont encore des manifestants qui nous ont aidés à éteindre avec une douzaine de seaux d’eau car avec les câblages, l’incendie a été compliqué à circonscrire. Les vandales n’ont jamais menacé les personnes. Ils voulaient casser. À côté, nos collègues de chez Paul ont rapidement plié leur terrasse mais pour l’avoir laissée sur la voie publique, l’ensemble du mobilier ira alimenter les bûchers sur la chaussée. Toutes les chaises et les tables ont brûlé”, raconte la gérante, qui redoute le nouvel appel à manifester des gilets jaunes pour samedi 1er décembre, même si elle n’envisage pas un instant de fermer son restaurant où 25 personnes travaillent.
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Publié par Francois PONT