Depuis le 1er octobre 2016, le code civil donne une
définition légale de la force majeure qui s'applique aussi au contrat de
travail (art 1218 du code civil - avant on s'en remettait à la définition issue
de la jurisprudence).
Il en résulte qu'un employeur peut rompre un contrat
de travail pour force majeure si : - il doit faire face à un à un événement échappant à
son contrôle ; - qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la
conclusion du contrat de travail ; - et dont les effets ne peuvent être évités par des
mesures appropriées.
Exemples issus de la jurisprudence antérieure à
la définition légale de 2016 : - un incendie d'origine criminelle ayant
entièrement détruit les locaux de l'entreprise, et mettant l'employeur dans l'impossibilité
absolue et durable de poursuivre l'exécution des contrats de travail (Cass.
Soc. 30 avril 1997) ; - cataclysme naturel entraînant la destruction
totale des locaux de travail sans réexploitation possible ou envisageable; - décès du salarié.
• Quelle est la procédure et les sommes à
verser ?
La force majeure permet de rompre les contrats de
travail sans préavis. La rupture est donc immédiate, dès que l'état de force
majeure est constaté.
- Pour les CDI
Pour les CDI, pas besoin de respecter la
procédure de licenciement ou de verser une indemnité de licenciement.
Seule l'indemnité compensatrice de congés payés est
due (art. L 1234-12, L 3141-26 du code du travail).
Toutefois, quand la force majeure résulte d'un
sinistre (comme par exemple un incendie, ou un cataclysme naturel) vous devez
quand même verser à vos salariés une indemnité compensatrice de préavis et une
indemnité de licenciement et ce, même si vous n'avez pas à respecter la
procédure de licenciement (art. L 1234-13 du code du travail).
- Pour les CDD
Pour les CDD, la force majeure est un cas légal
de rupture anticipée. Le salarié n'a pas droit à l'indemnité de fin de contrat.
Mais il a quand même droit à une indemnité compensatrice égale aux
rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat (L1243-1, L1243-4
du code du travail).
Dans tous les cas, les documents obligatoires à remettre
en fin de contrat doivent être délivrés au salarié.
• Attentat:
peut-on rompre le contrat de travail sur la base de la force majeure ?
Réponse d'Aurélien
Ascher, avocat.
La réponse dépend notamment des conséquences de l'attentat
sur le fonctionnement d'un établissement.
Si l'empêchement est définitif, le contrat à durée
indéterminée, résolu de plein droit, est alors rompu immédiatement sans que l'employeur
n'ait à engager de procédure de licenciement (cass. soc. 19 novembre 1980, n°
78-41574). Il suffit à l'employeur de constater la rupture du contrat pour
force majeure. Par ailleurs, la cessation de l'entreprise pour cas de force
majeure libère l'employeur de l'obligation de respecter le préavis et de verser
l'indemnité de licenciement (article L 1234-12 du code du travail).
Pour le CDD rompu avant l'échéance en raison d'un
sinistre relevant d'un cas de force majeure, les conséquences financières sont
plus lourdes pour l'établissement car le salarié a droit à une indemnité dont
le montant est égal aux rémunérations que le salarié aurait perçues jusqu'au
terme du contrat (art. L 1243-4 al 2 du code du travail).
Si l'empêchement est temporaire, le contrat de travail
est suspendu (sauf à justifier d'un empêchement particulièrement long
justifiant la rupture du contrat). Pendant cette période l'employeur n'est plus
tenu de payer les salaires. Il ne doit pas verser de congés payés pour la
période de fermeture mais doit faire une demande d'allocation de chômage
partiel prévu à l'article L 5122-1 du Code du travail. À noter que l'employeur
est tenu à une obligation générale de sécurité à l'égard des salariés. La
décision de fermer temporairement l'entreprise pour des motifs de sécurité est
donc admise. La fermeture de l'entreprise dans un contexte d'attentats paraît
pouvoir relever d'une telle situation.
► La résiliation judiciaire
La résiliation judiciaire est la rupture du contrat de travail prononcée par le juge en cas de manquement grave de l'une des parties à ses obligations contractuelles.
• Principe
En principe, seul le salarié peut faire une demande de résiliation judiciaire. Le juge ne prononcera celle-ci que s'il constate la réalité d'un manquement grave de la part de l'employeur à ses obligations contractuelles (ex. : discrédit jeté sur un salarié, l'affectant personnellement et portant atteinte à son image, sa fonction et son autorité, suppression d'un véhicule professionnel mettant le salarié dans l'impossibilité de travailler, propos dégradants tenus à l'encontre d'un salarié et portant atteinte à sa dignité, discrimination).
• Exception
Par exception, un employeur peut demander la résiliation judiciaire dans le cadre spécifique du contrat d'apprentissage après la période d'essai de 45 jours, peut aussi être demandée par l'employeur en cas de faute grave ou de manquements répétés de l'apprenti à ses obligations ou en raison de son inaptitude à exercer le métier auquel il voulait se préparer (art. L 6222-18 du code du travail).
• Comment faire ?
Le salarié doit saisir le conseil de prud'hommes (CPH) d'une requête de résiliation judiciaire. Il devra notamment remplir une Requête aux fins de saisine du conseil de prud'hommes (CPH) par un salarié et remplir le bordereau des pièces qu'il souhaite produire à l'appui de sa requête.Pendant toute la procédure judiciaire, le salarié continue de travailler dans les conditions habituelles. Toutefois, le contrat peut être rompu (démission, licenciement, rupture conventionnelle, prise d'acte) pendant la procédure prud'homale.
• Conséquences
- Si le juge prononce la résiliation judiciaire
La fin du contrat du contrat de travail prend effet à la date du jugement, ou, si le salarié a été licencié pendant la procédure, à la date où le contrat de travail a été rompu. Si le contrat est un CDI, la résiliation judiciaire a les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse : indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de préavis, indemnité compensatrice de congés payés. Si le contrat est un CDD, la résiliation judiciaire a les effets d'une rupture abusive : dommages et intérêts pour rupture anticipée au minimum égaux aux salaires qu'aurait perçus le salarié jusqu'au terme du CDD + indemnité de précarité.
- Si le juge rejette la demande
Le contrat de travail se poursuit normalement et aucune indemnité n'est due au salarié. Si l'employeur a licencié le salarié en cours de procédure, le juge se prononce sur la validité de ce licenciement après avoir rejeté la demande de résiliation du salarié. Dans tous les cas, l'employeur doit remettre au salarié les documents de fin de contrat auxquels il a droit.