Or, la perte de la 3e étoile n'a jamais été évoquée par le guide Michelin. Comme l'atteste d'ailleurs le compte rendu de l'entretien en date du 6 novembre 2002 entre mon mari et le directeur du guide Michelin de l'époque, Monsieur Derek Brown, que vous avez publié. Mon mari n'a nullement été déstabilisé par cet entretien et n'a fait aucune tentative de suicide à la suite de cet entretien, ni dans les trois mois qui ont suivi.
Après le décès de mon mari, je n'ai incriminé personne. Cela ne l'aurait pas fait revenir. Pour moi les causes étaient plurielles. Tout ce qui a été publié ces derniers temps, alors que j'étais en voyage professionnel à l'étranger, m'a toutefois poussée à réexaminer la chronologie des faits, avec plus de recul.
C'est trois mois plus tard, suite à l'article de François Simon publié dans Le Figaro, début février 2003, qui prétendait que Bernard "perdrait légitimement sa 3e étoile", que Bernard a été déstabilisé. Ce jugement de valeur l'a anéanti. Il nous a alors répété, à son entourage et à moi-même, jour après jour, "à partir de maintenant, les médias veulent ma peau".
Deux semaines avant son décès (mon mari a disparu le 24 février 2003), le classement du nouveau guide Michelin était publié à la presse : le restaurant avait bien gardé sa 3e étoile. Contrairement à la théorie de L'Express, c'est bien après l'article du Figaro que Bernard a perdu pied, de façon irréparable...
Pour rendre son enquête encore plus croustillante, L'Express a consacré une page entière à un directeur du guide Michelin, Jean-Luc Naret, en incrustant la photo de Bernard, alors que Jean-Luc Naret n'était même pas chez Michelin à l'époque !
Cela fait bientôt dix ans que je me bats pour pérenniser l'oeuvre exceptionnelle de Bernard qui a donné tant de bonheur aux autres. Œuvre qui fait partie du patrimoine gastronomique français et qui mérite un autre hommage et à tout le moins du respect."
Publié par Dominique Loiseau