Évelyne Maes, propriétaire de l'hôtel Abaca Messidor à Paris (XVe) et vice présidente de la fédération française de l'hôtellerie au sein de l'Umih et de l'Umih 75, a accueilli Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des PME, de l'Innovation et de l'Économie numérique, et Sylvia Pinel, ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, mardi 22 octobre dernier. Cette rencontre, organisée par l'Umih, avait pour but de faire comprendre aux ministres les problèmes des hôteliers face aux sites de réservations en ligne, ou OTA (pour Online Travel Agencies).
Evelyne Maes a détaillé les contraintes imposées par OTA. Son constat est alarmant : "Nous sommes une branche étranglée par ces intermédiaires dont nous sommes devenus dépendants." La litanie des doléances est sans fin. Tout d'abord, des taux de commission excessifs, allant de 20 à 25 %. Ces commissions sont calculées sur le prix TTC de la chambre et vont donc mécaniquement augmenter lors de la revalorisation du taux de TVA au 1er janvier 2014. Autre grief cité par l'hôtelière : l'absence de possibilité de négociation du contrat. Le seul choix réservé à l'hôtelier est d'accepter ou non. Viennent ensuite les clauses de parité tarifaire qui interdisent à l'hôtelier de vendre une chambre moins cher au client qui le contacterait en direct. Enfin, Évelyne Maes dénonce la mention 'hôtel préféré' sur ces plateformes : elle correspond en fait à des établissements qui payent des taux de commission plus élevés. Sans internet, les établissements hôteliers n'ont aucune visibilité, regrette l'hôtelière qui déclare dépenser 10 000 € par an en achat de mots-clés. Sans commune mesure toutefois avec le milliard de mots-clés achetés chaque année par Booking.
Moraliser les pratiques commerciales
"Nous ne demandons pas la mort des OTA", déclare Roland Heguy, président confédéral de l'Umih. Le syndicat souhaite rééquilibrer les pratiques commerciales et mettre en place un partenariat gagnant-gagnant. "Le numérique permet d'accroître sa visibilité, mais pas à n'importe quelle condition", reconnaît Sylvia Pinel. Sa solution serait de travailler sur un outil de régulation avec le concours d'Atout France, l'agence nationale de développement touristique, qui recense sur son site internet la liste de tous les établissements d'hébergement classés tourisme.
Fleur Pellerin dénonce cette dépendance croissante à l'égard des agences de réservation en ligne qui imposent à l'hôtelier de leur réserver un nombre minimum de chambres, tout en l'interdisant d'avoir sa propre politique tarifaire. "Ces grandes multinationales ont un comportement qui empêche la régulation du marché." La ministre a relativisé l'intérêt d'une action judiciaire, rappelant que le contentieux avec Microsoft a duré plus de dix ans. En revanche, elle souhaite porter le débat au niveau européen, car de nombreux pays ont la volonté commune de travailler sur la régulation de ces plateformes de réservation.
Publié par Pascale CARBILLET